Lorsque j’ai réellement pris conscience de ma situation et de mes pensées de plus en plus négatives, j’me suis dit qu’il serait bon de sortir de cet état et que seul l’extérieur et les gens qui s’y trouvent pouvaient m’apporter ce que je recherchais vraiment c’est-à-dire… la vie.
Tu connais maintenant la véritable raison de mon annonce. Elle était basée sur la recherche de ma personnalité, ainsi que sur le souffle, l’oxygène, l’échange et la « reconstruction » de moi-même. Besoin d’avoir « un œil averti » qui serve de reflet à mes mots.
Je pense que les gens du « dehors » ne savent pas à quel point la liberté est précieuse. Je me dis que le simple fait d’aller chercher une baguette devient pour vous un calvaire, alors que je donnerais beaucoup pour le faire et sentir cette odeur de pain chaud au réveil. Tout comme m’installer à une terrasse de café à regarder les gens passer et respirer le plaisir d’être à cette place. Même se promener sur les quais de Seine, et laisser mes rêves se disperser dans l’eau… Je pense qu’il faut être privé de cette liberté pour prendre conscience de ces petits plaisirs.
Il m’aura fallu une annonce… Quelques mots triés dans le coin de mon cerveau, pour que je puisse avoir l’idée de ne plus être « oublié »… Oublié du monde extérieur. Là où la devise est « chacun pour soi, et à chacun son soi »… Un monde où les gens qui crèvent de faim et dorment dans le froid ne sont même plus regardés… De là vous êtes venue, pareille à une ombre solaire, pareille à une note musicale, éclaircir cette cellule où l’oubli et l’isolement avaient fait place au « quotidien ». Maintenant, la vie sourit enfin.
Quand je te parlais de publier quelque chose ensemble, j’y pensais très sérieusement. Mais tu sais, tout ce que nous pourrions écrire à présent serait moins fort, moins sincère et moins spontané que les quatre-vingts lettres que nous nous sommes adressés. Si nous devons publier quelque chose, c’est certainement cette correspondance.
Bien sûr, cela sous-entend ouvrir son ventre, son cœur et ses tripes à d’éventuels lecteurs. Ce n’est pas simple. Il faut réfléchir là-dessus.
L’espoir d’une lettre et de quelques mots me fait attendre chaque jour le « facteur » avec la peur au ventre de ne pas voir arriver cette lumière, cette douceur et cet attachement que me procurent vos écrits. Je ne sais comment décrire l’émotion qui fait que mes battements de cœur se font plus rapides, à la vue de l’écriture sur le dessus d’une enveloppe. Votre écriture… Décrire ces contenus et la puissance des mots qui sont déposés sur le papier.