Lora Ly

« — J’avoue que je n’y reste pas souvent. C’est plus un endroit pour m’isoler quand j’ai envie de tranquillité. En général, je passe la majorité de mon temps chez Björk. Tu as carte blanche pour l’aménager à ta guise ou nous pouvons trouver autre chose qui te conviendrait mieux. Tant que ce n’est pas trop éloigné, l’argent n’est pas un problème.
Kyle taquina le loup, haussant les sourcils, arborant un air vénal.
— Vraiment ? J’ai tiré le gros lot ?
Vince le toisa de toute sa taille, se montrant d’un mouvement du bras.
— Tu ne pourrais avoir mieux, bébé. Je suis beau, fort, sexy, intelligent et riche. Le loup parfait !
— Tu oublies modeste, narcissique, vantard, autoritaire et j’en passe.
— Aussi ! approuva le loup, s’approchant, une lueur chaude dans le regard. Et une bête de sexe ! À ne pas négliger ! »

Ne repérant toujours aucune réaction du comité d’accueil, Kyle décida de pousser le bouchon encore plus loin. Il inclina la tête.
— Björk ne m'a pas fourni le mode d'emploi du contact « métamorphe » alors nous devons nous débrouiller seuls. Ce sont des loups, non ?
— Ouais, si nous sommes bien au bon endroit, répliqua Manuel d'un air sceptique, ne comprenant pas où Kyle voulait en venir.
— Alors, nous n’avons qu'à essayer un truc canin.
— Ooook, mais encore…? Désolé, Kyle, tu pars bien trop à l’ouest pour moi.
— Le chien de ma voisine salue ses potes en leur reniflant le cul. Peut-être que c'est ce qu’ils attendent ?
— Alors, c'est sans moi ! s'offusqua Christophe. Hors de question que je renifle le cul de qui que ce soit. Je préfère encore qu’ils me bouffent !
L'expression sérieuse des métamorphes passa à un ahurissement total tant ils étaient abasourdis par ce qu'ils entendaient. Puis, sans prévenir, Lana explosa tellement de rire, que Tristan dut l’empêcher de tomber du capot du 4X4.
— Je les aime, Vince, on les garde ! s'exclama le roux en soutenant la louve, toujours agitée de soubresauts.
Les deux plus grands métamorphes abandonnèrent leurs postures défensives avec un immense sourire. Ils s'avancèrent enfin vers les hommes d'un air décontracté.
— Très bien les comiques, vous nous avez bien eus. Bienvenue dans l'équipe. Je suis Vinceslav Markaël, mais appelez-moi Vince, bêta de la meute et voici Boris, notre tacticien. Notre compagne s’appelle Lana et le roux à ses côtés est Tristan. Ben est notre petit génie de l’informatique, ne vous fiez pas à son air d’enfant de chœur, si vous le faites chier, il videra vos comptes bancaires en un clin d’œil, rien ne lui résiste.

Kyle ne réagit pas au grognement et s’échappa, vite suivi par le loup. À peine fut-il rentré dans la chambre qu’il se retrouva plaqué au mur par le corps du métamorphe.
— Putain, j’ai tellement envie de toi. Dis-moi, oui !
Vince pencha la tête et lui prit la bouche avec sauvagerie. Kyle l’accueillit, suçant le muscle épais. Ils se battirent quelques instants jusqu'à ce que l’homme s'avoue vaincu et laisse le bêta diriger leur baiser. Le loup grogna, le son résonnant délicieusement dans sa poitrine. Il vint agripper les hanches de l’adjudant, les doigts s'enfonçant dans sa chair. Kyle était certain qu’il laisserait des marques, ce dont il se moquait. Il enroula ses bras autour des épaules musclées de son loup, caressant ses cheveux, heureux de sentir la texture soyeuse des mèches sur sa nuque. Vince n’y allait pas de main morte, malmenant son compagnon avec désir, faisant s'entrechoquer les objets sur l'étagère à ses côtés. Il glissa une main à l'arrière de sa cuisse et vint chercher la pliure du genou pour soulever la jambe de Kyle, l'enroulant autour de ses hanches. Cambrant les reins, Kyle les rapprocha avant de se frotter contre le corps du bêta sans aucune retenue.

« Christophe lâcha aussitôt le tireur. Stupéfait, il se tordit le pied contre le bord du trottoir. Il plongea en avant, transforma sa chute en une superbe acrobatie, roula sur une épaule et se redressa en époussetant sa manche. Le sergent releva la tête lorsqu’il discerna l’effort peu subtil de son collègue pour réprimer un éclat de rire. Il le défia du menton, ce qui amplifia l’hilarité du sniper. Manuel serra ses abdos douloureux de ses bras, le corps plié en deux.
— Je l’ai fait exprès !
La mauvaise foi de Christophe ne l’aida pas à récupérer son souffle. Quand ses éclats se raréfièrent, Manuel posa son bras sur les épaules de son ami et baisa sa joue.
— Putain, mec ! Tu es impayable. Si tu n’existais pas, il faudrait t’inventer.
Un sentiment de fierté envahit Christophe.
— Tu as remarqué la superbe maîtrise du roulé-boulé ?
Le sergent exécuta une danse de la joie, indifférent aux regards stupéfaits des quelques promeneurs, puis redevint sérieux. »

Crois-tu vraiment que l’excitation que tu ressens à mon égard est passée inaperçue ? ajouta-t-il, son souffle frôlant l’oreille du sergent, ce qui déclencha une vague de chair de poule et redressa son sexe. Tu me désires ! Si j’avais voulu une séance de sexe débridée, tu ne m’en aurais pas empêché.
— Je ne suis pas gay ! s’exclama Christophe avec humeur.
Il s’était reculé d’un pas.
— Pourquoi vouloir mettre une étiquette sur tout ? demanda Mika, légèrement échauffé. C’est bien un truc débile… Mon peuple se moque d’attribuer un nom sur une préférence quelconque. Si quelqu’un nous attire, peu importe son genre, nous fonçons. Arrête de te compliquer la vie avec des broutilles.

Mika gravit les marches jusqu’à ce qu’il soit à un pas du sergent.
- Je suis soulagé, avoua le loup. J’aurais eu du mal à te faire la cour par téléphone interposé, ajouta-t-il avec espièglerie.
- Me faire la cour ? Qui donc parle ainsi de nos jours, boule de poils ? ricana Christophe.
- Moi, microbe parce que telle est mon intention. Je t’apprivoiserai, je te couvrirai d’attentions, je creuserai ma place tout en douceur jusqu’à ce que tu succombes à mon charme et que tu ne puisses plus me résister.
- Hum… programme alléchant, répondit Christophe d’une voix rauque. Si déjà tu commençais par une salutation un peu moins formelle, histoire de m’en donner un avant-goût ?

— Tout ça pour te dire que, peu importe la personne qui éveille des réactions en toi, il faut savoir faire abstraction de nos habitudes, s’ouvrir à de nouvelles expériences pour ne pas louper sa chance.
— Papa, on ne parle pas d’une couleur de cheveux là ! Mais d’être attiré par un mâle. Je suis hétéro ! s’emporta Christophe.
— Hétéro, bi, transsexuel, homo, ce ne sont que des cases créées par une société qui aime sectoriser, s’énerva son père. Es-tu attiré par Tristan ?
— Quoi ? Bordel, non !
— Ton langage ! rouspéta Mary-Anne.
— C’est pourtant un très bel homme, ajouta Carlo.
Christophe contempla son père avec ahurissement.
— Les autres mecs ne m’attirent pas. Les loups sont bien foutus, j’en ai reluqué pas mal afin de comprendre ce qui m’arrivait. J’ai inspecté tous ceux qui passaient à ma portée. Ils n’ont eu aucun effet sur moi. Définitivement NON !
— Donc, seul cet homme… comment s’appelle-t-il ? s’enquit Mary-Anne.
— Mika !

« — Ton cou va enfin dégonfler, ricana Christophe. Pas trop tôt, tu n’arrivais plus à respirer. Ma blessure n’est pas un souci poursuivit-il plus sérieusement, je suis opérationnel. Si j’évite les conneries inutiles, cela devrait aller.
Tristan s’esclaffa. Il saisit son binôme par la nuque.
— Alors, on est foutus ! « Connerie » est ton deuxième prénom. Je surveillerai les fesses de cet imbécile au plus près, ne vous inquiétez pas.
— Je préfèrerais que tu protèges au-dessus de la ceinture, grogna Mika qui s’était hérissé à ses paroles. Ses fesses m’appartiennent !
La tablée se tourna vers l’exécuteur, étonnée de sa répartie. Christophe recracha la gorgée d’eau qu’il était sur le point d’avaler sur le tee-shirt de Manuel, installé en face de lui. Ce dernier ne réagit pas, trop intéressé par la suite de la discussion. La rougeur sur les joues du sergent et son asphyxie momentanée étant trop amusantes pour s’offusquer d’un peu d’eau. »

« Vince pencha la tête.
— Si moi j’avais envie de te protéger, que répondrais-tu ?
Kyle resta un peu perplexe, essayant de deviner si c’était une boutade en réponse à sa taquinerie. Comme Vince lui retournait un regard franc, dépourvu d’espièglerie, son cœur fit un bond. Cet homme magnifique proposait-il vraiment de veiller sur lui ? Il se sentit flatté même s’il savait que c’était une mauvaise idée d’être autant attiré par un coéquipier.
— Dans d’autres circonstances, j’aurais été intéressé.
Vince lui caressa la joue.
— Je peux être têtu quand je veux vraiment quelque chose. Et je n’ai jamais désiré une personne aussi fort que toi. Mon corps réagit à ta proximité comme il ne l’a jamais fait et j’ai des années de sexe derrière moi… j’ai donc bien l’intention de te faire changer d’avis, alors accroche-toi mon beau, parce que ça va décoiffer. Allons-y ! »

« Kyle leva les mains en geste de paix.
— OK, OK, il est à toi, j’ai compris. Quoique… tu me connais, je suis têtu. J’ai perdu cette bataille, pas la guerre, répliqua-t-il d’un air espiègle avant d’envoyer un baiser imaginaire vers le serveur.
— Que vais-je faire de toi ? murmura Tommy en soupirant. Bon, trêve de plaisanteries, mon pote. Comment vas-tu ? Toujours pas trouvé d’homme prêt à supporter ton caractère de chien ?
— Mais qu’avez-vous tous aujourd’hui à vouloir me caser ? demanda Kyle, un peu exaspéré devant l’ingérence de ses amis dans sa vie amoureuse. Je ne peux pas faire une chose pareille. Imaginez la déception de tous ces beaux mâles devant la perte de l’homme parfait. Je ne peux que me dévouer afin de leur permettre de goûter à ma magnificence… »