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Critiques de Louis-Marie Barnier (5)
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Le plein-emploi, c'est possible !

Ruptures avec l’ordre salarial régressif



La Fondation Copernic propose des analyses et des solutions détaillées alternatives à l’ordre-désordre du monde. Il convient en effet, autant se faire se peut, de démontrer la faisabilité des revendications sociales, des projets émancipateurs dans/hors/en rupture avec les cadres actuels.



Pierre Khalfa, Louis-Marie Barnier, Pierre Concialdi, Guillaume Etiévant, Michel Husson, Sabina Issahane, Stéphanie Treillet abordent, entre autres, le travail salarié, les traitements statistiques du chômage, les réponses « socialement régressives et économiquement illusoires », les notions de compétitivité, l’histoire de la baisse du temps de travail. « Notre logique, qui suppose trois prérequis – rompre avec l’austérité, en finir avec la gestion financières des entreprises, reprendre le contrôle du système financier -, s’appuie sur la réduction massive du temps de travail, sur la réorientation de l’investissement productif privé et public vers la satisfaction des besoins sociaux et la transition écologique, et sur la protection des salarié·es par la mise en place d’une sécurité sociale professionnelle et d’un statut du travail salarié ».



Les auteur-e-s critiquent les interprétations néolibérales, le lien entre baisse de « charges » (il s’agit en fait de baisse des salaires, dont la contrepartie est principalement la hausse des dividendes et non l’investissement) et emploi (en complément possible, Michel Husson : Créer des emplois en baissant les salaires ?), la flexibilisation du marché du travail, le soit disant allégement du Code du travail (« obèse » de ses dérogations), les inventions statistiques, les politiques dites d’activation…



Elles et ils comparent les situations et les effets des politiques menées dans certains pays, en particulier en Europe.



Pierre Khalfa, Louis-Marie Barnier, Pierre Concialdi, Guillaume Etiévant, Michel Husson, Sabina Issahane, Stéphanie Treillet expliquent en détail les « prérequis » d’une nouvelle politique économique et avancent des propositions concrètes. Elles et insistent sur de nouveaux droits des salarié-e-s ou des instances représentatives du personnel (« le comité d’entreprise devrait être élargi pour assurer la représentation des salarié·es des sous-traitants et celles des parties concernées par l’activité de l’entreprise (par les risques de pollution, nuisances, etc.)… »), la réduction (les conditions nécessaires) du temps de travail, « La RTT est d’abord une question de répartition des gains de productivité », l’émancipation « du travail et dans le travail » (la notion employée semble écarter le travail domestique, encore une fois non reconnu comme un travail), la réorientation des dépenses publiques, l’articulation entre transition écologique et sociale, la responsabilité collective des employeurs dans le rapport salarial, le statut du travail salarié ou la sécurité sociale professionnelle… « Une rupture politique est donc nécessaire qui doit s’accompagner de mobilisations sociales pour briser les résistances patronales ».



S’il est utile de présenter dans le détail, les arguments et les possibles, ici le plein-emploi, il faudrait, me semble-t-il, mettre en rapport les « éléments pour une politique de gauche » avec la crise systémique du capitalisme, rompre définitivement avec les illusions d’un passé – irréversiblement achevé – en particulier les dites Trente glorieuses, (voir par exemple, le récent ouvrage de Nicolas Béniès : Le basculement du monde).



C’est bien du coté de l’auto-organisation des groupes sociaux, du remodelage de l’ensemble des rapports sociaux, de la fin de la division du travail (dont sa division sexuelle), de la rupture avec l’ordre du rapport salarial, de l’automation, de la réduction massive du temps de travail (Le mouvement ouvrier au début du XXème siècle avançait les 8 heures par jour, avec les énormes progrès de la productivité du travail, c’est la demi-journée de travail (4 heures par jour) qui est aujourd’hui à l’ordre du jour), de la transition énergétique, de la satisfaction des nouveaux besoins sociaux, qu’il nous faut élaborer…






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Demain le syndicalisme

La question sociale est toujours une question politique



Dans leur introduction,Louis-Marie Barnier, Jean-Marie Canu, Christian Laval, Francis Vergne insistent, entre autres, sur les mesures coordonnées et cumulatives des politiques néo-libérales. Il s’agit à la fois de refondre les relations salariales, voire le rapport salarial lui-même, briser les cadres de négociations antérieurs, profiter (de) et accentuer la dégradation du rapport de forces au détriment du monde du travail, des salarié-e-s.



Il y a une accélération dans le déploiement des mesures, une véritable « radicalisation ». Il est juste de parler, non d’un ensemble de politiques, mais bien d’un système politico-économique, ce qui n’exclut pas d’en souligner les contradictions.



Tout cela concourt à « une transformation profonde des conditions de l’action syndicale ». Cependant il convient non seulement de décrire le « retard pris par le mouvement syndicale », mais d’en analyser les multiples causes. Je trouve les explications des auteurs pas assez critiques des pratiques syndicales. J’ajoute que l’histoire de la structuration (et des choix) des organisations, l’incapacité à prendre en compte (hier et aujourd’hui) les effets de la division sexuelle du travail (dans et hors de l’entreprise), le centrage « national », l’aveuglement sur les processus de racialisation, la défense et l’alignement sur des choix industriels (nucléaire par exemple), le peu de prise en compte des réalités de la mondialisation (centralisation des décisions et de la richesse créée et extension/fragmentation de la « chaine de valeur »… Sans oublier, et les auteurs le soulignent, les rapports aux pouvoirs publics et à l’Etat, au détriment de l’autonomie des dominé-e-s et de leurs organisations.



Louis-Marie Barnier, Jean-Marie Canu, Christian Laval, Francis Vergne soulignent que l’Etat est un agent actif de l’ordre néolibéral, que la difficulté à imaginer une (des) alternatives à la crise et à cet ordre néolibéral le renforce. Si le syndicalisme est en premier lieu la construction et la défense du « collectif », la mise en concurrence généralisée des salarié-e-s (déjà « divisé-e-s » par les différentes formes d’oppression, écartelé-e-s par les logiques d’entreprise) rend plus difficiles les solidarités professionnelles ou territoriales, sans parler des coopérations plus larges. Pourtant c’est bien la construction d’alternative(s) d’ensemble passant à la fois par l’indépendance syndicale et des alliances larges qui « est » à l’ordre du jour.



Ce livre se veut « une contribution à la réflexion sur l’alternative ». Les auteurs abordent le projet historique du néoliberalisme et en particulier les orientations antisyndicales et antidémocratiques. Ils insistent sur la volonté de réduire la taille des syndicats « dont le périmètre d’action ne devra jamais dépasser celui du site de travail, donc rester en deçà du périmètre de l’entreprise au sens économique du terme ». Ils reviennent sur la défaite des mineurs en Grande-Bretagne, sur les lois qui limitent les possibilités d’action des organisations de salarié-e-s, ou la criminalisation de l’action syndicale…



Louis-Marie Barnier, Jean-Marie Canu, Christian Laval, Francis Vergne analysent les effets de la concurrence généralisée et l’impact pervers sur les tâches des syndicalistes. Ils soulignent certains aspects du rôle historique du syndicalisme, dont l’unification du salariat « comme sujet collectif », les dimensions de coopération inhérente au travail, le lien entre exploitation et syndicalisme. Ils mettent l’accent, entre autres, sur les « normes prescrites en matière de relation clients/fournisseurs au sein même des entreprises », l’individualisation des salaires et la « logique de compétence », les négociations « au service » de la concurrence, le silence sur « les processus qui ont produit les contraintes qui pèsent sur l’entreprise », les effets du néolibéralisme sur la fonction publique dont ceux sur l’école…



Les auteurs poursuivent sur l’enlisement dans le dialogue social, hors de tout (et de toute construction de) rapport de force. Ils reviennent sur l’histoire du « paritarisme », l’enchaînement des contre-réformes, la promotion du « cadre de l’entreprise », le renversement des normes, et plus généralement sur les effets déstabilisateurs de ces pratiques, faisant fi à la fois des dimensions systémiques de l’exploitation des salarié-e-s et de la subordination de celles-ci et ceux-ci dans le rapport salarial…



Il convient donc (re)penser l’action syndicale au niveau européen et mondial. Je souligne la nécessité de répondre (construire des solidarités) au niveau même du champ d’action du capitalisme mondialisé pour enrayer l’opposition construite des un-e-s contre les autres. Les auteurs évoquent l’Association internationale des travailleurs (AIT), les mouvements des indignés, la lutte du LKP en Guadeloupe, les limites de la CES, etc. ; et parlent d’écosyndicalisme.



Enfin, Louis-Marie Barnier, Jean-Marie Canu, Christian Laval, Francis Vergne abordent des renouveaux, quelques fois sous forme inédite, des luttes et des jonctions internationales. Ils soulignent la nécessité de nouveaux droits démocratiques pour les salarié-e-s (droit attaché à la personne), parlent de Sécurité sociale professionnelle, de nouvelles coopérations, de reconstruction de solidarités…



Le dernier chapitre est intitulé « Pour un horizon syndical commun ».



Un petit ouvrage pour débattre, reconstruire un présent futur fait de coopérations et de solidarités, dans « le respect le plus absolu des formes les plus démocratiques de délibération et de décision dans l’action » ; pour un syndicalisme renouant avec son objectif d’émancipation de toutes et tous et d’auto-organisation sociale.
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La santé n'a pas de prix : Voyage au coeur de..

Retrouver les chemins de la remise en cause de la société entière



Dans sa préface, Serge Volkoff rappelle que « les contraintes et les expositions professionnelles sont un facteur important de mortalité différentielle ». Il souligne aussi les retards pris pour agir contre « l’ampleur des dégâts potentiels du travail » et développer la prévention, d’autant que les risques professionnels sont niés, invisibilisés ou naturalisés. A noter que cette naturalisation est genrée : soit disant-résistance physique pour les hommes et soit-disante patience des femmes ; derrière les mots, le mythe de l’inné sexualisé.



Aux risques sous-évalués, s’ajoute un second mythe, celui du progrès (enrichissement du travail, autonomie accrue, etc.).



Pourtant, derrière des descriptions très contestables du travail « néolibéral », il y a l’ajustement de la production en temps réel ; l’intensification générale du travail ; les flux tendus, les petites séries, « les pressions » de la demande, des clients ; l’extension aux commerces et aux services, des normes de contrôles et de productions industrielles. L’auteur souligne que « la pression du temps réduit l’espace des choix possibles », entraînant entre autres, des « risques psychosociaux » pointant, au delà du terme vague et en vogue des « processus de fragilisation divers et redoutables ».



Les problèmes de santé ne sont pas pris en compte dans les choix financiers, commerciaux et organisationnels des entreprises, alors que « L’aveu assumé d’une intensification, présentée aujourd’hui comme inévitable, pourrait faire à terme davantage de dégâts que les formes de dénégation qui l’ont précédé ces dernières décennies ».



Les points de vue managériaux et patronaux sont très contestables tant du point de vue de « l’organisation du travail, de l’enrichissement des compétences, et de la préservation de la santé et de l’environnement ». Et dans cette contestation, une instance représentative du personnel peut jouer un rôle important : les Comités Hygiène Sécurité et Conditions de Travail (CHSCT).



En introduction, Hélène Adam et Louis-Marie Barnier soulignent que pour l’employeur « si la santé n’a pas de prix elle a un coût ! ». J’ajoute, que tout est « coût » dans une entreprise, sauf les rémunérations faramineuses des « hautes directions » et les dividendes versés, en contrepartie de risques, aussi inexistants que valorisés, des actionnaires…



Les auteur-e-s expliquent leur conception du travail « expression d’un rapport social qui dépasse largement le lieu de travail » et rappellent la « hausse considérable de la productivité » depuis 30 ans, la déconnexion recherchée, par les employeurs, entre santé et travail, la responsabilité rejetée sur la/le salarié-e « négligent-e » de « son » accident du travail et montrent la « double nature » du CHSCT (« lieu simultané d’affrontement et de consensus »).



Elle et il présentent leur livre : « Un des fils conducteurs de cet ouvrage est la prise de conscience que le syndicalisme doit se réfléchir comme un mouvement social à part entière, intégrant la remise en cause des rapports de travail dans un schéma large d’évolution des rapports de la société ». Elle et il réfléchissent à la question de la santé au travail sous l’angle d’une contradiction : « le rapport autodestructeur du capitalisme avec ceux-là mêmes qui tous les jours participent à l’accumulation capitaliste ». La santé est un élément des rapports sociaux de production, du rapport de travail, ce qui implique de réfléchir à la fois sur les « les lieux de travail » et sur « l’ensemble des rapports sociaux de production ». Les auteur-e-s expliquent les rôles du CHSCT, les tensions entre individuel-le et collectif, entre résistance et compromis et soulignent que cette instance n’est pas utilisée « dans toute sa puissance ».



Elle et il n’oublient pas que « Une analyse spécifique de la santé au travail des femmes nous semble essentielle pour interroger une approche traditionnelle très masculine » ( Sur le travail des femmes, voir, entre autres, Danielle Kergoat : Se battre disent-elles…), et indiquent que c’est particulièrement l’organisation du travail et ses conséquences, dans un « contexte de reconfiguration néolibérale » qui seront analysées.



Les auteur-e-s s’appuieront sur des textes et expériences syndicales et sur des exemples d’« entreprises » (essentiellement, dans les Télécommunications, le Transport aérien ou au Ministère des finances).



En suivant le plan de l’ouvrage, je ne présente que certains éléments.



Dans la première partie « Émanciper le travail », Hélène Adam et Louis-Marie Barnier commencent par un rappel nécessaire « L’émancipation du travail demeure un objectif majeur du mouvement ouvrier. Elle a été pensée historiquement sur deux modèles, la réduction du temps de travail dégageant le temps libre et émancipateur, et l’émancipation du travail lui-même. Les deux démarches sont inséparables, chacune n’étant que le revers de l’autre ».



Loin de cette émancipation, la reconfiguration néolibérale du travail se traduit par « un contrôle en hausse des salariés, un éclatement des collectifs, un appel à investir sa subjectivité », sans oublier l’intensification du travail, l’allongement des horaires, etc.



Cette partie est divisée en quatre chapitres :



« De la santé publique à la responsabilité de l’employeur, histoire d’un enjeu social ». Les auteur-e-s analysent les évolutions, des Délégués à la sécurité des mines, à la naissance de l’Inspection du travail, de la reconnaissance de l’indemnisation des accidents du travail à l’émergence de la responsabilité patronale, de la généralisation des délégué-e-s du personnel à la création de la Sécurité Sociale, des Comités d’entreprise, des CHS, aux Lois Auroux et au CHSCT, jusqu’aux problématiques actuelles de la santé physique et mentale…, tout en mettant en parallèle les transformations des organisations et des conditions de travail au sens le plus large du terme.



« Les CHSCT face au travail néolibéral ». Hélène Adam et Louis-Marie Barnier analysent les reconfigurations du travail, la place de la notation (« L’évaluation des salariés est au cœur des processus de transformation du travail par le néolibéralisme »), les nouvelles contraintes pesant sur les salarié-e-s, les notions d’adaptation, la valorisation du comportement individuel, les exigences contradictoires pesant sur les salarié-e-s, les risques psychosociaux (« Mais demeure le risque d’isoler, dans une problématique unique des risques psychosociaux, l’ensemble des évolutions de l’organisation du travail »), les transformations de la Médecine du travail. Elle et il terminent sur la nécessité de ne pas en rester au niveau local, d’utiliser les enquêtes pour analyser les modifications organisationnelles et de comprendre les enjeux plus globaux du néolibéralisme.



« Femmes productrices ou reproductrices ? ». Comme l’indiquent les auteur-e-s, « Les femmes ont en effet toujours travaillé mais elles n’ont pas toujours été reconnues comme salariées, donc insérées dans un processus de travail collectif » et l’analyse « des atteintes à la santé des femmes au travail reste à construire ». Dans l’histoire du travail des femmes, il convient de prendre en compte son extension, les améliorations des conditions de travail, le rapport spécifique des femmes à l’emploi et au travail, (comme le dit Danielle Kergoat « Travailleuse n’est pas le féminin de travailleur »). Il faut aussi analyser la division sexuelle du travail comme construction sociale, les moindres responsabilités hiérarchiques et accès aux formations, leur relégation dans les emplois les moins qualifiés, les emplois « invisibles », le temps partiel imposé, la double journée de travail avec le travail domestique, etc. Sans oublier les violences, le harcèlement sexuel qui « s’inscrit dans une relation de domination et concerne tout acte ou parole visant à rabaisser les femmes à un objet sexuel ». Ces éléments impliquent « une démarche syndicale volontariste » pour dégager des axes d’intervention pour les CHSCT. Les auteur-e-s concluent : « Agir sur la santé des femmes implique de prendre en compte le rapport au travail, le lien avec la vie personnelle et temps de travail, les actes d’atteinte à la dignité comme les atteintes à la santé, donc de considérer l’ensemble du rapport social de domination ».



« Une autre organisation du travail ? ». Hélène Adam et Louis-Marie Barnier centrent leur présentation sur le « Document unique », l’évaluation des risques, les mesures de préventions. Pour cela il faut commencer par « identifier les dangers et analyser les risques. Ces deux notions se différencient ainsi : le danger est la capacité interne ou intrinsèque d’un équipement, d’une substance ou d’une situation de travail, de causer un dommage au salarié. L’analyse des risques, est le résultat d’une étude des conditions d’exposition des travailleurs à ces dangers. Elle mène donc à interroger l’organisation du travail. C’est le résultat de ces étapes que le document unique vise à transcrire ». Elle et il montrent le lien entre « situation » individuelle (risque poste à poste) et dimension collective (organisation du travail) et soulignent que « Tout accroissement de la dimension collective du salariat agit comme ferment d’émancipation ».



La seconde partie « Entre État et employeur ». Les auteur-e-s reviennent, entre autres, sur les normes « Avancer d’autres normes de travail et d’autres valeurs que celle du profit, reconstruire du collectif, autant d’enjeux fondamentaux portés par l’action pour la sécurité au travail ».



« Le travail sous contrôle des normes de sécurité ». Le travail néolibéral déstructure les collectifs et renvoie chaque salarié-e-s à sa « responsabilité », son « employabilité », son « investissement », sa « disponibilité » alors que le travail est de plus en plus socialisé, que chacun-e est plus dépendant-e de la collaboration avec d’autres salarié-e-s, d’organisations globales du travail. Concernant la sécurité, les auteur-e-s soulignent « L’enjeu du port des équipements de protections individuelles, alors même que le Code du travail impose de considérer d’abord les éléments collectifs de protection, revient au même débat visant à faire porter au salarié la responsabilité de sa propre sécurité. Il en va certes d’enjeux économiques importants (« qui est responsable de tel accident »), mais aussi d’une conception générale du contrat de travail et de la place de l’engagement individuel dans ce contrat ».



« Le collectif face à l’éclatement du travail ». Les auteur-e-s traitent de la responsabilité des employeurs, de « l’imagination destructrice » pour faire baisser les coûts, émietter les collectifs, mettre en concurrence les salarié-e-s, développer la précarisation des contrats, augmenter la sous-traitance et l’externalisation de tâches. Elle et il nous rappellent que l’élaboration de plans de prévention concerne à la fois les entreprises donneuses d’ordre que les entreprises sous-traitantes et proposent la mise en place de CHSCT de site. A juste titre, les auteur-e-s soulignent que limiter le CHSCT à un périmètre restreint « revient pour l’entreprise à le »dépolitiser » en quelque sorte ». A l’inverse les élu-e-s et plus largement les syndicalistes devraient « dépasser la fragmentation des situations locales » et « construire la responsabilité de l’employeur ».



« Négocier ou imposer la loi ? ». Les auteur-e-s présentent, exemples à l’appui, les débats en regard du Code du Travail et de l’objet de la sécurité et de la santé et tirent quelques bilans de négociations. Elle et il soulignent qu’il faut que « Rendre sa dimension politique à la santé au travail passe donc par l’application pleine et entière de la puissance étatique », que « Ce regard de la société (et du droit pénal) porté dans l’entreprise vise à briser la particularité d’un espace privatif du droit » et concluent que « comme l’intervention du droit pénal le démontre, la santé au travail ne peut-être l’objet de négociation, tout au plus de travail en commun et de consensus pour construire ensemble cet objet étranger et antagonique au rapport d’exploitation, la santé des salariés ».



« L’état employeur, une figure en transformation ». Souffrance au travail dans de multiples secteurs de la fonction publique, à « commencer » par l’Éducation nationale, droit « hors du commun » par le principe de parité, Révision générale des politiques publiques et privatisations, etc. La mise en place « récente » des CHSCT rompant avec « la sacro-sainte parité » est une avancée mais comme le disent les auteur-e-s « L’assimilation au droit privé en matière de santé au travail se révèle néanmoins contradictoire, dès lors qu’elle nierait la spécificité du rapport de l’agent du service public. Cette avancée dans la santé au travail pour les fonctionnaires deviendrait alors un pas de plus vers la banalisation du public en son opposé, le privé ».



Dans la troisième partie « Une démarche syndicale de dimension politique », les auteur-e-s proposent des réflexions, des questionnements sur la pratique du syndicalisme, en ouvrant, entre autres, les débats sur le dépassement des « frontières d’un activité locale inscrite dans le seul tête-à tête avec un employeur ».



« Expertise et formation : la construction d’une parole légitime » : Entre appel aux salarié-e-s pour promouvoir le « point de vue de l’expérience ouvrière », recours aux experts, maîtrise de la formation des syndicalistes, il s’agit à la fois de se réapproprier le « sens du travail » en portant une « critique globale du travail » et de participer à la reconstruction d’une « autre légitimité, de tradition ouvrière » et d’améliorer les rapports de force.



« Pour de nouvelles solidarités ». Hélène Adam et Louis-Marie Barnier reviennent sur la nécessité de rechercher des « ressources » hors de l’entreprise, sur le travail comme rapport social. Elle et il élargissent sur la division mondiale du travail, sur les contraintes écologiques, sur « un syndicalisme vert liant défense de l’environnement et de la santé des salariés » avec des exemples (AZF, Grand-paroisse, procès Eternit, amiante). La santé au travail relève à la fois d’une démarche de santé publique et d’un mouvement social, d’une jonction entre mouvement syndical et mouvement écologique.



« Le CHSCT, un pouvoir sous contrôle ». Alors que le champ d’intervention des CHSCT est très large, « simultanément, et paradoxalement, c’est la faiblesses des moyens qui étonne », moyens limités volontairement par les employeurs, sans oublier la « situation surveillée » des élu-e-s, leur statut, en tant que salarié-e-s, de subordination. Elle et il montrent les apports permis par les liens entre l’instance, ses élu-e-s et le syndicalisme (« la médiation syndicale donne à cet engagement sa dimension collective. Elle permet aussi de dépasser le cadre étriqué de la relation de domination dans le travail, élément structurel du rapport d’exploitation, et de penser dans un espace d’autonomie »), et dénoncent « le tabou de la discrimination » syndicale.



En conclusion, les auteur-e-s soulignent les stratégies patronales d’enfermer la question de la santé « dans un cercle restreint pour en évacuer la parole des salariés ». Dans ce livre, elle et il ont tracé des pistes d’émergence d’un autre syndicalisme « qui repose sur le postulat de la mobilisation des salariés, condition de la construction de ce rapport de force ». Les auteur-e-s posent la question du « droit de veto » des CHSCT sur « les projets sur lesquels ils sont consultés, un veto qu’ils peuvent justifier en défense du droit fondamental des salariés à la santé » et rappellent l’exigence « d’un minimum de moyens autonomes » de fonctionnement, de la réaffirmation de la responsabilité des donneurs d’ordre (sous-traitance) dans le domaine des conditions de travail et de la santé au travail. Et elle et il proposent « l’élection directe par les salariés de leurs représentants au CHSCT » et termine sur une « démarche syndicale globale ouverte sur la société ».



Un ouvrage très intéressant, illustré de multiples exemples, tant sur les réalités du travail que sur les possibles utilisations des CHSCT et plus globalement sur le syndicalisme. Un livre qui séduira toutes celles et tous ceux qui ne se satisfont ni de leurs conditions de travail, ni de leur travail, ni des rapports sociaux réellement existants, toutes celles et tous ceux qui réfléchissent à l’émancipation du travail.
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Travailler tue en toute impunité...

Chaque jour, trois salarié-e-s meurent au travail en France. Les accidents de travail se multiplient, les suicides à France Télécom font la une de la presse, les victimes de l’amiante vont se compter par dizaines voir par centaines de milliers.



« La frontière entre temps de travail et temps de repos s’est délitée. La flexibilité conduit le salarié à mettre son temps de repos au service de l’entreprise. » Dégradation des conditions de travail, effets sur l’environnement, chaines de responsabilité « il est difficile de s’opposer à l’entreprise en restant dans un seul cadre ».



Le premier chapitre met « la santé au travail en perspective » en insistant sur l’organisation du travail (dont le déni de la division sexuelle du travail), les sans papiers et la dissimulation accidents du travail, l’amiante comme lutte emblématique. Les auteur-e-s soulignent la rareté des « actions en faute inexcusable des employeurs ».



Le second chapitre « Lutter pour la santé au travail » souligne la déficience d’un certain syndicalisme centré sur la réparation alors que « toute avancée sur la question de la santé au travail suppose de faire reculer les prérogatives patronales de définition unilatérale des conditions de travail. »



Puis les auteur-e-s analysent la place du droit et préconisent des démarches civiles et pénales pour « Obtenir justice ». Elles et ils font des propositions autour de la représentation du personnel et le droit à la négociation collective, d’une loi sur la sous-traitance ou d’un service public de médecine du travail. Quelques propositions pour commencer à débattre dans des cadres unitaires.



Cette note est complétée d’une partie témoignages, dont ceux de syndicalistes de Renault, Schindler, Exxon Mobil, et de contributions dont une inspectrice du travail « La notion d’ordre public en santé sécurité au travail n’est pas au cœur de l’inspection du travail »



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Revendiquer et s'organiser ! : Représentativi..

Écrit par un collectif de syndicalistes et de chercheurs (sans femme !), la dernière note de la Fondation Copernic permet faire le point sur les possibles et nécessaires débats autour de la représentativité syndicale du point de vue des salarié-e-s.



Les auteurs aborderont successivement le droit de s’organiser, la négociation et la représentativité syndicale, les grands enjeux de la représentativité et un éventail de propositions. En annexe, la FSU, l’Union syndicale Solidaires et de la CGT développent leurs propres positions.



Prendre pour point de départ les droits des salarié-e-s permet de poser l’ensemble des problèmes d’organisation (y compris celui des salarié-e-s des sous-traitants ou des très petites entreprises), de représentation interprofessionnelle et de négociation déléguée.



La liberté de choisir son syndicat doit être totalement libre et les privilèges des cinq « grandes centrales » doivent être abolis. Cela ne règle cependant ni le problème de l’unité nécessaire (voire de l’unification syndicale) ni les niveaux de représentativité les plus en adéquation avec les besoins des collectifs de salarié-e-s, ni comment remettre les négociations sous contrôle ou mandatement ; sans parler de l’indépendance des organisations syndicales vis à vis des financements publics ou des politiques patronales ou étatiques.



De ce point de vue comment ne pas trouver étrange, comme les auteurs de ce petit livre, que la représentativité syndicale ait pu être négociée avec le patronat.



Une note permettant de réfléchir et de trouver, au delà des divergences, des terrains communs pour élaborer pour un syndicalisme revendicatif et représentatif nécessaire à la démocratie sociale.
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