Aimer
Aimer est si simple
Cœur ouvert. Laisser rentrer la lumière qui nourrit les sentiments et les fils qui poussent à l’intérieur de soi. Sans crainte de souffrir du jugement. Sans masque. Tel qu’on est. Comme la fleur sauvage qui émerge, fière de son unicité. Bienveillante. Libre d’être.
Pourtant, il y a des conventions.
Mère nature ne nous uniformise pas, ni en couleur ni en forme.
Pourquoi apprendre un langage si on ne s’en sert pas bien ? Ou si on s’en sert peu. Pas même pour se plaindre. Pas même pour se défendre.
Une personne formidable que j’ai rencontrée m’a dit un jour : « Si tu ne t’aimes pas, personne ne va t’aimer ». Elle avait raison. Pour être aimée, j’ai dû m’aimer d’abord et accepter ce que je suis.
Maintenant, je ne suis plus seule. Et je suis bien, en paix.
La vie d’un autiste est loin d’être rose. Il y a dans cette vie du bonheur, mais aussi des malentendus, de la tristesse, de l’incompréhension. Pour moi et pour les autres, je dois me battre contre un système conçu selon des paramètres assez rigides. Je veux ouvrir un chemin pour que la vie de mon fils et celles des autres autistes soit plus facile que la mienne. C’est ce qui donne un sens à ma vie.
Sans prétendre être écrivaine, ni poète, sans prétendre à aucun titre en particulier, je laisse sortir par mes doigts sur le clavier une partie de ce que j’ai à dire et de ce qu’il me sera possible de saisir de mes pensées en une éternelle course de vitesse.
L’autre partie demeurera confinée en moi.
Même ce processus est un défi que j’accepte comme un mandat de la vie.
Ils laissaient devant la porte les tabous, les inquiétudes et les masques. Ils s'offraient nus, sans paraître, sans mensonge. L'espèce humaine à l'état pur, sans limite.
Ce que je ressens guide mon écriture.
Ainsi, je conçois mes œuvres artistiques pour rendre compte de ma lecture du monde, qui m’apparaît souvent paradoxal, absurde ou illogique. Ma création devient mon armure. Alors que je me vois comme une étrangère qui tente de conserver son intégrité et son identité, envers et contre tous, ma création protège ma nature propre en me permettant de m’exprimer avec authenticité.
Créer une œuvre photographique m’incite à la réflexion et suscite en moi un désir d’écrire à la manière dont je photographie : de manière intuitive, personnelle, directe et naturelle. Derrière l’image se trouve une rencontre inspirante, un échange, une histoire, une émotion, des sentiments et des perceptions. Cette rencontre évoque des souvenirs denses, complexes, qui sont chargés de questionset de non-sens que je détecte jour après jour, évoquant un passé, heureux ou douloureux. Issue de ces souvenirs, l’inspiration grandit intérieurement. Ainsi, écrire me permet d’exprimer mes idées à mon rythme et de les transposer en des symboles qui reflètent vraiment ma pensée.
Depuis toujours, j’explore la nature humaine, ce mystère complexe et unique qui se terre en chacun de nous. Je cherche à comprendre l’individu, seul ou en groupe, ses expressions et ses comportements, par l’observation minutieuse de ce qui se passe autour de moi et par la composition d’allégories écrites ou visuelles que je fais de l’humain. En parallèle, mon besoin de créer émerge devant la beauté nue des formes et des mouvements, visibles ou invisibles, des signes vivants que j’associe symboliquement à mes questionnements profonds et à ma quête de sens. Créer par la photographie, créer avec des mots, ou les deux ensembles, devient un moyen d’expression et de revendication de mon unicité.