Anne avait toujours aimé ce ruisseau. Au fil des ans, elle avait tissé tant de rêves penchée sur ses eaux étincelantes. Elle oublia ses prétendants languissants, les remarques corsées des voisins médisants et tous les problèmes de son existence de jeune fille. En imagination, elle parcourut les mers chargées d’histoires qui baignaient les rives lointaines et lumineuses de féeriques terres délaissées, où reposaient l’Atlantide engloutie et l’Élysée. Avec l’étoile du soir comme guide, elle naviguait vers la Terre du désir du cœur. Et elle était plus épanouie dans ces rêves que dans la réalité, car si les choses visibles sont passagères, les invisibles sont éternelles.