poème et interprétation : Marie-Andrée Gill
réalisation et montage : Geneviève Allard
images : Geneviève Allard et Marco Dubé
musique originale : Frédéric Dufour
figuration : Samuel Martel et Yaëlle Parenteau
Si vous vous demandez où je suis maintenant, c'est moi, juste là, avec le sourire forcé d'une patineuse artistique qui se relève après avoir fini son triple axel sur le cul.
C'est une histoire d'amour comme toutes mes autres
un autobus écrit Spécial avec personne dedans
Je couche mes restes sur le calorifère et mes oiseaux se cachent pour mourir.
Mon seul chez-nous est un coup de poing dans la viande du coeur
Toujours en train d’écrire de quoi pour survivre,
j’invente des listes de choses à faire, déconstruis
les structures fanées des rêves dociles : oignons
revenus et soupes chaudes, chanterelles et tartes
aux pommes ; nos accidents de bonheur simple.
Même si la fuite aplatit les contours, l’attente est
une lueur lourde sur la matérialité des mots.
Pourtant, je sais quoi faire et pas faire, j’ai le manuel
de ces affaires-là, les rituels.
Quelque chose en moi garde sa lampe allumée –
une déchirure, pas tout à fait une blessure, plutôt
comme quand les nuages s’ouvrent là au milieu,
entre les poumons – une envie qui peut pas
s’empêcher de chercher le trouble, provoquer
la rencontre, essayer n’importe quoi tout à coup que.
je sais je suis encore
une petite adolescence
emballée sous vide
à toucher mes cheveux
pour être belle je sais aussi
les formules qu’on égare
tout doucement
sur les présentoirs et les allées
à tourner en rond
attachés au pieu du réel
Où habiter sinon dans le rappel de moments fous et la possibilité qu'ils se reproduisent?
Des fois, je ferme les yeux et je fais comme si j’étais là :
Tu mets du choke, tu tires sur la crinque, ça décolle
dans un nuage noir. Il a tombé pas mal de neige,
faudrait pas rester en rack, j’ai même pas de soute.
Tout ce qui m’entoure ressemble à la phrase être à
la bonne place. Tu contournes les arbres dans la nuit,
tu vires sur un dix cennes ; les branches dans le front,
les flocons dans les yeux : c’est sûr que c’est pas avec
toi que je vais rester pris.
Je me dis que ça ferait un beau titre de quelque
chose : Il danse avec les ski-doos.
Je touche du bois, je ferme ma bouche mais je
continuerai quand même à le dire dans les silences
de la portée :
si vous me cherchez, je suis chez nous,
ou quelque part sur Nitassinan,
toutes mes portes et mes fenêtres sont ouvertes
je chauffe le dehors.
Caresser la cassure, la parole
ce moment où personne ne me dit
à quoi je devrais ressembler.