Le vent fouettait son visage. Sa jupe s'accrocha à une branche, le tissu craqua. Ses pieds glissèrent, elle tomba pour se relever aussitôt. Derrière elle, la respiration gagnait du terrain. Elle accéléra. Sa tête était lourde, elle se sentait nauséeuse. Les ténèbres qui l'entouraient prenaient des formes étranges. Dans le lointain, un faible halo s'anima, une lueur chétive.
Indifférente à ce qui se passait derrière elle, Éloïse continuait de marcher. Chaque pas en direction des vieux murs ajoutait un poids sur ses épaules. Elle se sentait oppressée mais ne pouvait faire autrement que d’avancer. Il n’était pourtant pas trop tard pour faire demi-tour, même Gabriel n’aurait pu lui en tenir rigueur. Elle avait demandé à voir le domaine, après tout, rien ne l’obligeait à rentrer à l’intérieur. Mais c’était plus fort qu’elle, cela dépassait l’entendement. Elle percevait un danger mais ne pouvait rien faire pour l’éviter. Lorsque les ronces lui barrèrent la route, elle remonta ses jupes et se fraya un passage au travers de la flore sauvage, écrasant les épines du talon de ses sabots. Plusieurs lui lacérèrent les mollets, pénétrant sa chair, la griffant jusqu’au sang. Elle ne sentait pas leur brûlure. Elle n’éprouvait plus que le désir violent de se glisser entre les murs. Enfin, une vieille porte en bois apparut, à moitié ensevelie sous la végétation. Éloïse tendit la main, frôla le bois érodé. De longues échardes affleuraient à la surface. Elle la poussa. La porte fit gémir ses gonds dans un grincement sourd.