Playing God (1997) ORIGINAL TRAILER
- L'argent ne rend pas heureux, marmonna-t-elle.
- Les gens qui n'en ont pas ne sont pas au courant, répondit Piet en lui tapotant la main.
Comme l'avait si bien dit Pablo Picasso : « L'art lave notre âme de la poussière du quotidien. »
" Les gens sont des abrutis."
Harriet en était convaincue depuis des années. Pendant longtemps, elle avait pensé que c'était dû à l'endroit où elle avait grandi, que les habitants de Sacramento étaient tous cons, mais en vieillissant et en voyageant, elle réalisa que cela s'appliquait à tout le monde, à l'exception des Français. Les Français lisaient encore des livres.
Au nom de la lutte contre les inondations, la ville avait domestiqué une force sauvage ; elle l'avait stérilisée, maîtrisée, ensevelie sous des tonnes de béton lisse pour en faire une autoroute de plus dans la cité des autoroutes. Les hommes pensaient avoir résolu le problème, mais le fleuve ne s'était pas laissé faire. Il s'était rebellé. Des petits arbustes avaient germé dans les fissures du ciment avant de se frayer un chemin vers le soleil, ouvrant la voie aux buissons et aux roseaux. Bientôt, toutes les plantes originelles avaient fait leur retour, et avec elles, les grenouilles, les tortues, les canards, les grues, les hérons, les faucons et les aigles. Ils s'étaient réapproprié le fleuve. À sa manière, la nature avait envoyé chier cette ville.
Elle connaissait les règles du jeu. Putain, elle contrôlait le jeu depuis le début. Elle n'avait aucun talent, mais elle avait réussi à devenir une célébrité. Roxy avait beau répété sa routine de strip-teaseuse devant son miroir, elle savait à peine danser, elle chantait comme un pied et, à en croire ses pubs pour cette marque de boissons énergisantes, elle n'avait absolument aucun talent d'actrice. Sauf que par un tour de magie inexplicable, elle était devenue une célébrité. Elle était célèbre pour la seule et bonne raison qu'elle était célèbre, ce qui ne la rendait que plus célèbre encore. Sa seule et unique responsabilité était de se comporter comme une célébrité.
Elle s'efforça de jauger sa situation. Qu'aurait fait Elizabeth si elle avait accidentellement provoqué la chute de cheval de monsieur Darcy et qu'il s'était brisé le cou ? Qu'aurait fait George Sand si, par mégarde, elle avait fait tomber un piano sur Chopin ? Harriet regrettait de ne pas mieux connaître l' oeuvre de Raymond Chandler ou de Dashiell Hammett. Eux auraient su quoi faire. Elle se promit d'ajouter quelques romans de genre à sa liste de lecture.
Se ficher de ce que les autres pensent de votre physique rend plus fort. Ca vous aide à vous accepter comme vous êtes. Vous prenez possession de votre identité.
Harriet trouva un petit boulot dans une librairie. L'opportunité lui parut merveilleuse jusqu'à ce qu'elle comprenne qu'elle allait passer le plus clair de son temps à aider les clients à dénicher le dernier livre de John Grisham, Stephen King ou Danielle Steel. C'est là qu'elle comprit que les gens étaient des cons.
C’est étrange cette façon dont le corps est à la fois affiché à outrance, et caché à outrance. Très étrange en fait.
On ne joue pas au con avec les flics. Ça ne se fait pas. Autant cogner dans une ruche d'abeilles tueuses avec un bâton. C'était un coup à se faire piquer.