Citations de Martha Hall Kelly (123)
- Qu'est-ce que tu apporterais, toi, chuchota Zuzanna, en riant encore, à Matka.
Matka réfléchit un long moment, les yeux baissés sur ses mains, si longtemps que je pensai qu'elle ne voulait finalement pas jouer à notre jeu. Quand elle prit enfin la parole, elle avait une expression étrange.
- J'apporterais un bouquet de fleurs, des roses et des lilas.
- Oh, j'adore le lilas, dit Luiza.
- Je marcherais la tête haute et, en chemin, je donnerais ce bouquet aux gardiennes et je leur dirais de ne pas s'en vouloir de ce qu'elles ont fait.
Vous auriez du voir les étoiles cette nuit-là, jetées dans le ciel en grosses grappes. On aurait dit qu'elles regardaient tout ce qui se passait là, tristes de leur impuissance.
Mais nous avons beau voyager dans le monde entier à la recherche du beau, nous devons le porter en nous ou nous ne le trouverons pas.
Les Français étaient mon talon d'Achille, je ne devais surtout pas perdre la tête. En fait, si Achille avait été français, je l'aurais probablement porté dans mes bras jusqu'à ce que son tendon guérisse.
C'est à partir de ce moment qu'on nous surnomma les Lapins. Kroliki en polonais. Des cobayes de laboratoire. Même le Dr Oberheuser nous appelait ses Versuchskaninchen. Des lapins expérimentaux.
- Il faut que tu dormes maintenant.
- Oui, mais pas avant que tu me répondes : est-ce que rompre une promesse est un péché ?
- Cela dépend de la promesse.
Luiza tourna la tête vers moi. Le moindre mouvement semblait la faire souffrir atrocement.
- Mais j'ai juré sur la Bible. Est-ce que Dieu désapprouvera ?
- Dieu aura beaucoup à faire pour que nous le pardonnions de nous avoir mises ici.
- Tu blasphèmes !
Aucune d’entre nous ne savait à quel point nous nous trompions ce matin-là, à notre descente du train, et que nous allions plonger droit en enfer.
- Je ne gaspille rien, disait souvent Heinz. J'utilise tout l'animal, sauf son cri.
- Je ne suis pas mariée.
- Pas encore ! s'exclama Mme Huff en contemplant les cadres en argent sur le manteau de la cheminée. Tu as eu deux offres auxquelles tu n'as pas encore répondu.
Deux offres ? De quoi parlait-on ? D'un hectare à Palm Beach à l'abri du regard des voisins ?
- Vous m'avez opérée. Vous avez tué des jeunes filles. Des bébés. Comment avez-vous pu ?
- C'était mon travail. On m'a fait passer des années en prison pour me punir d'avoir mené des recherches scientifiques.
- Cinq ans. Au lieu des vingt auxquels vous étiez condamnée. Donc c'est ça, votre excuse ? Des recherches scientifiques ?
Après tout, nous ne pouvions pas faire grand chose pour changer ce que Dieu nous réservait.
- Nous devons tous faire des sacrifices, mais c'est ma génération qui permettra à l'Allemagne de changer. Vous nous avez laissés dans une telle misère...
- Hitler sera notre ruine, il ne fait que prendre ce qu'il veut...
- Tais-toi, Vater.
Il ne se rendait pas compte du risque qu'il courait à s'exprimer ainsi en public.
Sa tenue posait néanmoins problème : pantalon vert, veste de sport en velours aubergine, mocassins en daim marron, et pour couronner le tout, une chemise noire. Seuls les prêtres et les fascistes portaient des chemises noires. Et les gangsters, bien sûr.
C’est un miracle, toute cette beauté qui émerge après tant d’épreuves
« Tu ne peux pas gagner sur tous les tableaux ,Herta.
Tuer et rester celle qui guérit . Cela a son effet. »
Quand on évite les sujets qui fâchent, on manque de sincérité.
Tout le monde savait que la propre soeur d'Himmler avait été emprisonnée à Ravensbrück, pour violations des lois raciales parce qu'elle avait eu des relations amoureuses avec un Polonais. Les filles à l'entrée disaient qu'on ne lui avait pas épargné les vingt-cinq coups de fouet que lui avait valus sa condamnation.
- Gâtée ? Vraiment ? C’est être gâté qu’abandonner son bonheur pour un enfant que je ne connais même pas ? Est-ce que vous avez la moindre idée de ce que j’éprouve chaque matin quand je me réveille en sachant que vous et votre famille êtes ensemble et que je suis seule ?
Je pris le "Journal "médical" et remarquai une petite annonce pour un médecin dans un camp de rééducation pour femmes, à quatre-vingt-dix kilomètres au nord de Berlin, près du centre de villégiature de Fürstenberg, au bord du lac Schwedt. Ce type de camps se multipliait, destinés essentiellement aux tire-au-flanc et aux petits délinquants. L'idée d'un changement de décor m'attira. Un centre de villégiature ? Mutti me manquerait, mais pas Heinz.
La seule chose que je savais sur ce camp était que mon ancien camarade de faculté, Fritz Fisher, y travaillait. Le nom me plaisait.
Ravensbrück.
Nous étions dans un Etat frontalier et donc pas les seuls à voir les membres d’une même famille combattre dans des camps opposés.