Je me trouve, pour la première fois, sublime à l'intérieur de mon désir. Troublée, bouleversée d'avoir passé la porte de l'érotisme, je reste inerte sur le sol. Les larmes coulent le long de mes joues. Ma respiration se calme doucement. Paradis trouvé, nue, étendue sur la moquette, je flotte. Il n'y a plus de temps, ni de haut, ni de bas. le vide s'est empli du tout, le tout déborde de vide.
Elle se donnait corps et âme à l'imperceptible. On aurait dit que la nature tout entière s'était incarnée en elle. Juste là, devant mes yeux, cette beauté violente me narguait. Je subissais cela comme une profonde injustice. Je devais me rendre à l'évidence et établir rapidement ce constat: je ne l'avais pas créée, pire, je ne l'avais même pas imaginée! Plus je la regardais et plus j'étais partagé entre l'envie de la posséder et celle de la détruire.
Je n'en peux plus. Au milieu de ce tiraillement, j'entends ces hommes et ces femmes parler de moi comme d'une tache sur une table qu'il faudrait juste essuyer pour la faire disparaître. Je reprends mon souffle. Je dois m'en aller, me sauver, me cacher. Dans ma hâte, je renverse la jolie femme. Je m'en veux pendant quelques secondes, mais je sais que le temps n'est pas aux regrets. Je sais aussi que je suis folle.
Plus je l'observe et plus je trouve qu'elle a dans son attitude délurée un vice à faire pâlir toutes les Vénus.