En conséquence, cette opposition et cette tension entre la réalité et les idéaux, entre l’immanence et la transcendance, entre l’individuel et l’universel, entre le temporel et l’éternel, court incessamment à travers l’existence des hommes, la rendant problématique. Je l’appellerai ici opposition et tension entre ji et ri.
L’existence humaine est pénétrée de part en part par l’opposition et la tension entre ji et ri, c’est pourquoi l’homme ne peut être conscient de lui-même que comme un problème – telles sont la condition et l’essence de l’homme.
Cet emploi de ji et de ri est d’origine bouddhiste, ji désignant le réel, le phénoménal, le particulier, le temporel, le différencié; ri renvoyant à l’idéal, au nouménal, à l’universel, à l’éternel, à l’indifférencié. Dans cet essai ces deux mots japonais sont employés comme termes clefs pour discuter à la fois la pensée bouddhiste et la pensée occidentale. Comme on le verra, la pensée bouddhiste et la pensée occidentale diffèrent grandement dans leur compréhension concrète de ce que sont l’idéal et l’universel. Similairement, à l’intérieur même du contexte de la pensée occidentale il y a une multiplicité de points de vue philosophiques. Cette étude explorera les différences de nuance qui peuvent connoter les notions de ji et de ri telles qu’elles apparaissent dans les philosophies de Platon, Aristote, Kant, ou encore dans le christianisme.