Maurice Grimaud est perçu comme le plus humaniste des préfets, celui qui a voulu changer la police. Pourtant sous son mandat, la répression a malgré tout existé durant les événements de
mai 68. Aujourd'hui plus que jamais, la question des violences policières est encore au coeur de l'actualité.
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L’ordre, certes, allait revenir, et c’était bien, mais il ne fallait pas que soit étouffées les voix qui avaient pendant trente jours appelé la naissance d’un monde plus juste, moins oppressif. La France de l’ordre ne devait pas fermer ses oreilles aux cris de sa jeunesse, sinon tout recommencerait un jour...
Une autre croisade m’avait mobilisé, et j’entendais lui consacrer également tous mes efforts. Elle visait à rendre plus courtois les agents de police. Je voyais bien, maintenant que je les connaissais mieux, qu’ils étaient, comme dans la chanson, de fort braves gens, mais pourquoi se complaisaient-ils si souvent dans ce rôle ingrat de grondeurs ou trop rogues ou, au contraire, trop familiers, que l’on voyait aux prises avec les automobilistes, les écoliers ou les passants indisciplinés ? Combien ils gagneraient, me semble-t-il, à écraser les coupables de leur inaltérable sang-froid ou à calmer les excités par leur souriante placidité.
Je voyais trop souvent, autour de moi, la déférence dont les pouvoirs publics entouraient les détenteurs de la fortune et cette course éperdue et médiocre à l’enrichissement.
[...]
Les jeunes ont un regard aigu, sans complaisance, qui refuse les faux-semblants. Ils voyaient bien qu’à simplement laisser aller le poids des choses, l’argent était gagnant à tous les coups, alors qu’il eût fallu, avec courage et détermination, comme l’avaient promis dans la longue nuit de l’Occupation ceux qui demain allaient mourir, forcer les voies de la justice et d’une vraie fraternité.
C’est à chaud, sur le coup de l’émotion, au sortir de ces longues nuits d’angoisse, que l’on parle sans apprêt. [...] Les micros cueillent les confidences que vous vous faites à vous-même, et, par centaines de milliers, des gens vous écoutent, vous croient, voudraient vous aider... C’est pour cela que j’ai insisté plus d’une fois pour que les hommes de gouvernement parlent. Ce que je n’osais pas dire, c’est qu’ils devraient, pour une fois, quitter leurs masques et redevenir de simples hommes aux prises avec l’incertitude.
[Avant les événements de Mai 68, Maurice Grimaud travaillait à améliorer le plan de circulation des automobiles dans Paris.]
Le hasard des circonstances m’obligea à faire face à des événements plus spectaculaires, mais c’est bien de sa mauvaise circulation que j’ai tenté de guérir Paris, plus que de ses gauchistes qui, après tout, n’étaient pas si loin de mes idées quand ils commencèrent à brûler les voitures.
Ici, les insultes et les coups pleuvent, et il faut accumuler et maîtriser sa colère. On comprend mieux que lorsque l’occasion de frapper arrive, ces hommes pénètrent dans l’univers mystérieux de la violence. Les coups qu’ils vont porter seront le substitut de la mort qu’ils n’ont pas le droit de donner.
[À la fin des événements de Mai 68 à Paris]
D’ailleurs, les Parisiens ont repris le goût à la vie. Leurs voitures, après un mois d’immobilisation, piaffent à leur porte. Dans l’air de Paris, les vapeurs d’essence recouvrent la saveur picotante des lacrymogènes.
Sentait-on dans ma voix, dans mon attitude, que je partageais secrètement plus d’une de ces critiques, mais que je ne trahirais pas la mission que le hasard avait voulu me confier ?
Les déclarations officielles ne passaient plus la rampe. Les slogans surréalistes de Mai les faisaient soudain plus démodées que le latin.