Pour ma part, je trouve le moment inutile particulièrement beau, car il nous appartient avec une force presque impossible à décrire, il n’y a pas de mot suffisamment précis pour qualifier l’inutilité du moment. Généralement cela se résume à “rien”, ce qui est une injustice crasse pour ce moment puisque cela ne rend pas compte de la quintessence de l’instant.
La résilience, c’est celà : ne pas mourir, physiquement ou psychiquement. S’effondrer et se relever, être meurtri et revenir. Toucher le fond, dans le noir et soudain voir un côté moins sombre, à défaut d’être plus lumineux, puis de la lumière, et accepter une main tendue.
Le harcèlement moral qui cause le plus de dégâts, c’est celui qui est de l’ordre de la prédation, celui qui est de l’ordre de la chasse, celui qui n’est pas de la maladresse verbale, qui n’est pas de l'impolitesse, celui où tout est calculé. Celui-ci, par ailleurs, ne récoltera aucun témoignage en cas de litige. Celui-ci ne laisse pas de trace, pas d’email, pas de SMS, pas de message vocal, pas de courrier écrit, pas de dossier, rien du tout.
Ce qui est mis en lumière généralement dans les consultations, c’est cette capacité qu’ont les individus à ne pas se respecter eux-mêmes et donc à laisser les autres ne pas les respecter non plus
Je souhaite rendre ici un hommage à toutes ces personnes qui se relèvent, sous les feux des projecteurs ou dans l’ombre de leur intimité. Toutes celles qui ont trouvé le moyen de survivre, puis de vivre. De s’extirper de leur chaos, d’aller chercher de la lumière à la force de leur vie ou de la laisser entrer en ouvrant les yeux.
Pour le dire simplement, travailler de façon industrielle ne signifie pas forcément travailler dans une usine de montage, mais plutôt de travailler de sorte que le travail soit parfaitement découpé en petites tâches n’ayant aucun sens et aucune visibilité sur l’objectif global.
La violence dans le monde du travail, ce sont avant tout des choses qui sont à la limite de l’acceptable et que l’on se voit difficilement refuser. C’est une remarque, un soupçon, c’est une blague de mauvais goût que l’on n’aurait pas acceptée dans son milieu privé, mais que l’on accepte par la politesse que l’on suppose être celle du monde du travail dans lequel on est en train d’évoluer. Ce sont de petites choses qui s’accumulent, qui, au fur et à mesure, prennent de plus en plus de place.
C’est le travail qui décide à quelle heure nous quittons notre domicile et quand nous y revenons - mais qui occupe également la majorité de nos pensées, pendant la journée, parfois la nuit, et pour certaines et certains d’entre nous, même pendant les vacances. (Préface de Boris Cyrulnik)
Il y avait des équipes dans lesquelles on sentait rapidement un malaise, quelque chose d’impalpable, quelque chose de difficilement nommable, mais qui rendait l’atmosphère très lourde, malgré une politesse apparente, visible et audible. Dans ces équipes-là, il y avait comme une tension, comme une menace, comme une notion de danger permanent, et ce en dépit des apparences. Car, contre toute attente, la violence s’exprime d’une façon bien particulière dans le monde du travail.
Nous sommes sans doute passés du déni qui prévalait avant France Télécom aux faux semblants. Postface de Patrick Légeron