Les grosses ripailles qui suivent les funérailles ne sont pas seulement une tradition rurale. Elles correspondent à un étrange état d'esprit provoqué par un deuil cruel. Il s'agit d'une sorte d'ébriété légère, parfois même gaie, absolument inavouable, comme si la nature nous saoûlait par quelque poison bienfaisant pour nous éviter de trop souffrir.
Cette sorte d'anesthésie naturelle joue pour moi en d'autres circonstances. Si je fais le compte des amis et amies perdus en X années, il y certes de quoi être accablé. Et là, je ne parle plus des morts. Ceux-là, ils ne sont pas vraiment perdus, car je continue-et poutr toujours- à leur parler en les berçant dans mon coeur. (p. 35)