Citations de Michel Tournier (1085)
Celui qui lit possède des ailes qui lui permettent de s'enfuir dans des pays merveilleux...Ne pas lire, c'est ramper sur le sol comme un ver.
- Écoute-moi. Est-ce que la lune est le galet du ciel, ou est-ce ce petit galet qui est la lune du sable?
Un livre n’est pas fini s’il n’est pas lu.
Quand on entreprend un voyage comme celui que vous faites, lui dit-il après avoir tiré une bouffée de sa pipe, on part quand on le veut, mais on arrive quand Dieu le veut.
Le pouvoir absolu du tyran finit toujours par le rendre absolument fou.
Plus vous voulez vous élever, plus il faut avoir les pieds sur terre. Chaque arbre vous le dit.
Il paraissait de peau plus sombre et ressemblait plus à un nègre qu'à un Indien. C'était peut-être cela qui l'avait fait désigner comme coupable, parce que dans un groupe d'hommes, celui qui ne ressemble pas aux autres est toujours détesté.
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Le temps historique est une succession irréversible d'événements imprévisibles et presque toujours catastrophiques dont le plus ordinaire est la guerre, mal absolu.
Ce n'est pas mal de commencer sa vie par un échec. Parce qu'on se remet sur pied et qu'on repart plus fort.» Propos recueillis par Gilles Anquetil et François Armanet (Bibliobs 2007)
Certes on n'a jamais rien vu de plus grand, majestueux, chaud, murmurant, soupirant, soufflant, fort, gracieux, élégant, érotique, puissant et féminin qu'une locomotive à vapeur.
Un livre a toujours deux auteurs : celui qui l'a écrit et celui qui le lit.
Au commencement il n'y avait sur la terre ni herbe ni arbre. Partout s'étendait un vaste désert de poussière et de cailloux.
Jéhovah sculpta dans la poussière la statue du premier homme. Puis il lui souffla la vie dans les narines. Et la statue de poussière s'anima et se leva. A quoi ressemblait le premier homme ? Il ressemblait à Jéhovah qui l'avait créé à son image. Or Jéhovah n'est ni homme ni femme. Il est les deux à la fois. Le premier homme était donc aussi une femme.
Il avait des seins de femme. Et au bout de son ventre, un sexe de garçon. Et entre les jambes, un petit trou de fille. C'était même assez commode : quand il marchait, il mettait sa queue de garçon dans son petit trou de fille, comme on met un couteau dans un fourreau.
Donc Adam n'avait besoin de personne pour faire des enfants. Il pouvait se faire des enfants à lui-même.
Au commencement de cette nouvelle....richement illustré par Alain Letort.
Je sais maintenant que chaque homme porte en lui -- et comme au-dessus de lui -- un fragile et complexe échafaudage d'habitudes, réponses, réflexes, mécanismes, préoccupations, rêves et implications qui s'est formé et continue à se transformer par les attouchements perpétuels de ses semblables. Privée de sève, cette délicate efflorescence s'étiole et se désagrège. Autrui, pièce maîtresse de mon univers... Je mesure chaque jour ce que je lui devais en enregistrant de nouvelles fissures dans mon édifice personnel.
[…] l’autodidacte n’a appris que ce qu’il aimait. Sa culture est limitée par sa propre personnalité. Au contraire celui qui a fait des études régulières est obligé de tout apprendre. Son avantage est énorme parce qu’il n’y a rien de plus enrichissant que de devoir acquérir des connaissances qui vous sont a priori indifférentes, voire antipathiques.
Si le spectacle d'une bonne et heureuse manipulation d'un livre a de quoi réjouir le cœur d'un écrivain, c'est bien autre chose encore de voir certains lire avec leurs doigts ! Toucher les mots, effleurer les métaphores, palper la ponctuation, tâter les verbes, prendre une épithète entre le pouce et l'index, caresser toute une phrase.
Si on définit l'intelligence comme la faculté d'apprendre des choses nouvelles, de trouver des solutions à des problèmes se présentant pour la première fois, qui donc est plus intelligent que l'enfant ?
Un grand auteur est celui dont on entend et reconnaît la voix dès qu'on ouvre l'un de ses livres. Il a réussi à fondre la parole et l'écriture.
(Le miroir des idées)
Le magazine, le film, la télévision gavent l'oeil et réduisent le reste de l'homme à néant. L'homme d'aujourd'hui se promène muselé et manchot dans un palais de mirages.
Nous parlons trop. Il est pas toujours bon de parler. Dans ma tribu, chez les Araucans, plus on est sage, moins on parle. Plus on parle, moins on est respecté. Les animaux les plus bavards sont les singes, et parmi les hommes, ce sont les petits enfants et les vieilles femmes qui parlent le plus.
Soleil, rends-moi semblable à Vendredi. Donne-moi le visage de Vendredi, épanoui par le rire, taillé tout entier pour le rire. Ce front très haut, mais fuyant en arrière et couronné d'une guirlande de boucles noires. Cet œil toujours allumé par la dérision, fendu par l'ironie, chaviré par la drôlerie de tout ce qu'il voit. Cette bouche sinueuse aux coins relevés, gourmande et animale. Ce balancement de la tête sur l'épaule pour mieux rire, pour mieux frapper de risibilité toutes choses qui sont au monde, pour mieux dénoncer et dénouer ces deux crampes, la bêtise et la méchanceté...