Un enfant et son père marchent à travers bois, tournant le dos au Nord et à leur passé. Chaque pas refoule leur mémoire, distrait la colère du père, étonne l’enfant. Chaque enjambée agglomère leur pensée à la mousse, gangrène leurs phrases, desquame leur identité.
Peu importe, au final, ce qui les pousse à fuir, à s’enfoncer au coeur de la sauvagerie, à rebours de leur histoire : seule compte la voix de cet enfant qui, déclinant la rumeur des lichens, l’odeur des saisons, la présence des fougères, s’inquiète de son identité (“nous étions peut-être deux espèces totalement différentes“). Est-il être des bois, persona de monosyllabes écorchées, petit mythe ambulant à classer près des images confuses des “grandes forêts de l’enfance, les bois enchantés, les trolls, les dragons, les magiciennes et leurs marmites au cul brûlé, les cabanes dans les bois où se terrent des créatures hideuses, l’ogre, les arbres qui bougent et étranglent les voyageurs” ? Est-il d’une espèce autre, à “la lisière de l’homme“, atteignant “des strates bien antérieures, des époques de reptation, de faiblesses et de grandes terreurs, des époques de proies dissimulées dans les sables” ?
Ou bien n’est-il qu’une émanation de cette forêt matricielle qui peine à le recracher de ses entrailles, syntagme prisonnier d’un texte à la luxuriance formidable ?
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