Elle n’avait jamais rencontré un homme comme lui, ni en Angleterre ni en Australie. Il était curieux. Prévenant. Intelligent, mais il ne se prenait pas au sérieux. Si les yeux étaient le reflet de l’âme, elle aurait pu affirmer qu’il était gentil, malin, amusé, admiratif. Cette nuit-là, il l’avait raccompagnée à la pension où elle logeait. Elle avait ajouté ses bonnes manières à la liste de ses qualités. Ils ne s’étaient pas embrassés. Ils s’étaient retrouvés à son hôtel pour déjeuner le lendemain. Ils s’étaient fait la bise pour prendre congé et, vingt minutes plus tard, ils s’embrassaient encore. La semaine suivante, elle s’envolait pour l’Australie-Méridionale afin de le revoir. C’était alors qu’elle avait appris qu’il n’était pas un simple fermier, mais l’héritier d’une immense propriété en bordure de l’outback. « Oh, c’est tellement romantique ! avaient déclaré ses amies. Il a tout d’un Darcy australien ! »
À quarante-quatre ans, elle attendait de nouveau un enfant. Elle avait cru être ménopausée. Au lieu de quoi, elle avait découvert qu’elle était enceinte de presque cinq mois quand, à l’occasion d’une visite de routine chez le médecin, elle avait été amenée à faire un test de grossesse déconcertant dont le résultat se révéla plus déconcertant encore. Deux jours après la naissance, rompant avec la tradition, elle avait envoyé un mail exceptionnel en cours d’année à tous les destinataires figurant dans son carnet d’adresses.
Ses premiers courriers avaient été des lettres à l’ancienne. Elle les avait tapées sur une vieille machine à écrire posée sur la table de leur vaste cuisine, puis apportées à Hawker, la ville la plus proche (près d’une heure de route), pour les photocopier et les poster. C’était plus simple de nos jours, les lettres partaient instantanément grâce à la magie du courrier électronique. Malgré tout, elle continuait de les imprimer et de les conserver dans le classeur à tiroirs à côté du bureau.