AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de MegGomar


Un jour
je ne sais plus quand ni comment ni pourquoi j’ai téléphoné à une Française
qui voulait des cours de français pour son fils français. En principe, j’évitais
les Français. Les fréquenter à l’étranger, ça me faisait l’effet de coucher
avec mon frère, c’était dégoûtant.
La Française en question était sans surprise la femme d’un type qui bossait
à l’ambassade une Ferrero-Rocher. Je me souviendrai toujours de la
descente vers leur garage toute tapissée d’azulejos (comme si votre chasse
d’eau était plaquée or). Elle, elle déambulait dans les étages très bien
habillée. Le fils, douze ou treize ans, était opaque. Je n’ai jamais su s’il
écoutait ce que je racontais ou s’il s’ennuyait et s’il attendait que ça se
passe. Comme si ça transférait pas. Par contre avec la mère, ça transférait à
fond, surtout de son côté.
Au bout de trois semaines, elle m’a demandé si ça m’intéressait, une
chambre chez eux, comme ça je pourrais mieux suivre son fils, etc. – la
chambre, gratis. Dans ces cas-là
et ça m’est arrivé plusieurs fois
je pense toujours à Chabrol.
Je sens de suite la bourgeoise prédatrice ; ça m’ennuie d’utiliser ce mot
pour un être humain mais je ne sais pas comment dire autrement la vision
de moi lentement sucée, et j’ajoute que ça peut aussi bien être une maison
que j’ai déjà senti ça dans une maison, une sorte de sixième sens qui te fait
comprendre que cette grande baraque n’a qu’une idée en tête : te faire
disparaître à jamais dans la cave ou dans les combles.
Les familles de prolos ou d’anciens prolos sentent tout de suite ça, quand ils
sont en contact avec la vraie bourgeoisie. Bref, à peine elle m’avait proposé
le fils et la chambre que j’ai dit non : je voulais pas faire domestique et
j’avais peur. Du coup elle a tout arrêté.
On pouvait pas lui dire non, je suppose. J’ai terminé l’année scolaire et puis
j’ai demandé ma réintégration et rempli des vœux pour l’un des coins les
plus terribles de France, après la Guyane : le Maine-et-Loire.
Commenter  J’apprécie          00









{* *}