Nick Hornby

" Je peux le lire ?
- Pour quoi faire ?
- Pour rien. Parce que j'ai envie de lire tout ce que tu écris, abruti.
- Rien ne t'y oblige.
- Je le sais.
- Et si tu le détestes ?
- Je ne te le dirai pas.
- A quoi sert que tu le lises, alors ?
- A quoi sert de lire quoique ce soit ? Je n'irai pas non plus dire à Graham Greene que je n'ai pas aimé son dernier roman.
- Mais tu n'écris pas de scénarios avec Graham Greene, que je sache.
- Raison de plus pour tenir ma langue si je n'aime pas.
- Donc tu vas juste me dire que je suis un génie.
- Quelque chose dans ce goût-là au moins.
- Pouvons-nous reprendre depuis le début ?
- Que veux-tu dire ?
- Tony, accepterais-tu de lire mon livre ? Et de me dire ce que tu en penses ?
- Qu'est-ce que ça change ?
- Dans la première version, c'est toi qui as demandé à le lire. Maintenant, c'est moi qui te le demande. A titre de service.
- [...] Je serais infichu de te dire ce qui cloche. Non pas que je sous-entende qu'il y aura quoi que ce soit qui cloche.
- [...] Dis-moi juste si ça ressemble à un livre. S'il y a des pages où l'on s'ennuie. Si je dois le mettre à la poubelle ou le montrer à quelqu'un d'autre. Si je vais aller en prison.
[...]
- C'est bon. Je vais le lire.
- Tu crois que ça te prendra combien de temps ?
- Faut voir, tout dépend...
- De quoi ? Du nombre de pages ?
- Par exemple.
- Il fait quatre cents pages. Avec double interligne.
- Et combien où l'on s'ennuie ?
- Va te faire voir."