Le baiser n'avai pas excédé deux secondes, mais son enchantement persisterai longtemps. Quelque part sur terre, un samedi d'octobre, il y avait eu ce baiser. Au jour de sa mort, parmi les choses dont il se souviendrait, Vincent était certain qu'il retrouverait intact l'émoi de ce baiser.
Hélène disait que, dans la relation amoureuse unilatérale, la pire des choses est la supériorité bienveillante de l'autre, sa manière de condescendre et son pouvoir absolu sur l'attente de l'autre. Le temps que Vincent passait à attendre Ayrton était insoutenable. C'était un temps privatif, obsessionnel, sans dérivatif possible.
Lorsqu'il vit ce garçon affalé, magnifique et parfaitement indifférent au désarroi amoureux d'une princesse de la cour d'Henri II, Vincent éprouva un désir d'une violence extrême. Les jambes qui dépassaient du bermuda lui donnèrent l'envie extravagante d'être le bermuda, et cette envie trotta au mépris de l'analyse qu'il devait à l'arrivée de M. de Nemours au bal de la cour.