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Citations de Paol Keineg (80)


Kerouzac’h


Extrait 1

  Le bois vert a cuit,
  Le feu s’est éteint,
  Les enfants ont peur.


  La terre est donnée, sévère, sève et vertige, aux hommes vifs et
lucides,
  la terre en grande cérémonie dans nos angles et nos remugles.
  Ceci est mon pays, non pas un autre, profond, ardent, cinglant,
comme les autres,
  et je décortique chaque voyelle limpide de son nom interdit,
  j’agite les brises épiant l’atlas mouvant des céréales et des
ruisseaux,
  j’exulte d’élytres, de galops et de grands flamboiements de jupes,
  je marche nuit et jour à la lueur des visages jaunes et ridés,
  je marche, violent, éperdu de fatigue, très pesant de notre peur de
mourir,
  tressé d’une tristesse énergique.
  Ceci est mon pays, non pas un autre, pays ligoté et d’ancienne
agonie, embrasé du mouvement de la mer,
  imprévu, impalpable,
  s’affûtant bientôt à la grosse meule du soleil.
...
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Kerzanie


Extrait 2

  Saisons de mon pays,
  abjuration des roses sous les tenailles du gel et du soleil,
  plancton minutieux de fourmis noires,
  copulation du vent avec des racailles d’animaux fous.
  Comment dissimuler la présence un peu folle de l’invisible,
  la poignante intempérance de l’homme à l’écoute du ciel vide ?
  Je ne prétends pas à l’intransigeante eau verte de l’œil qui voit,
  je ne prétends pas à la brûlure d’immensités clandestines,
  je prétends à la présence de diamant
  du possible.
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Kerzanie


Extrait 1

  Je serre contre moi les petites fermes tristes pressées de chardons et
d’herbes coupantes,
  les petites fermes éteintes à l’heure où grandit l’haleine des hiboux
et les étoiles,
  à l’heure où brûle l’eau des étoiles, quand les marécages s’embroussaillent
de blaireaux et de sangliers,
  les hommes assis sous le noyer ploient sous le poids du silence,
  les veaux échappés s’ouvrent les veines en se frottant à l’angle des étables,
  on distingue sous les feuillages denses de la conversation
  – le prix du blé, la mort d’un voisin – la spirale de mauvais sommeils.
...
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L’auge a poussé dans la muraille…


L’auge a poussé dans la muraille
rectangulaire, indifférente et humble.
Pierre sereine ignorant le ciel bleu
si confiante en l’obscurité de son grain.
Elle méprise les problèmes de l’âme.
Nous avons appris d’elle la présence
Impassible de la matière, la petite
peur de l’homme en face de la réalité.
Pierre vulnérable
fermée aux sollicitations de nos doigts.
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11.

Le rocher blanchi par les fientes
des cormorans
qui se chauffent au ras de l'eau,
et dans ma tête

écrite depuis cent ans
l'histoire de la disparition des langues.
Rentrer à la maison
je lis des pages de Creeley au lit,

je m'éteins à minuit.
Creeley est mort, Hawkes est mort,
en rêve je me dépêche
d'expédier

les affaires courantes
parce qu'en rêve
les larmes
coulent toujours à point.
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Boudica



18

     Le flamboiement des codex organiques. La souffrance
circulaire sur dix hectares de bonne terre. Le soleil enjambant
le crime.

     An 61 après Jésus-Christ. Les Mau-Mau contre Tacite.
L’outrecuidance et le sac. Le combat des arbrisseaux.

     Le blanc, le noir, le gris. A cheval sur le méridien de
Greenwich. Le pays boueux, foulé.

     Le bruit des bottes dans le bled. Arcs de triomphe et
ossuaires. Les aigles rouges et les ancêtres combattants.
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Boudica



16

     Voleuse d’hommes, pétroleuse, papesse de bric et de broc,
qu’on l’étrangle et qu’elle claque !

     Les petits gars que son odeur excite montent à l’abattoir en
chantant. Francs-tireurs et coureurs à pied, doigts gourds, yeux
blancs pour cette morue.

     Guérilleros de mes deux, godelureaux et blancs-becs, ô
condottieres des pissenlits par la racine.

     En ces bois de chênes, le sanglier et l’éleveur de porcs.
On bourre les poubelles de ces va-nu-pieds, maillots jaunes
et porte-bidons.
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Boudica



15

     Hyène blanche, traînée d’insectes. Comme une rumeur, comme un
eczéma, pour que le scandale éclate.

     Boudica, tête penchée sur la cafetière, au milieu des cartons et des
papiers gras : étiquetée, grillante et pire.

     La reine aux cent coups frappe juste. Les femmes fortes et les guerriers
pare-balles font bloc. Nul n’accepte l’inacceptable.

     Ici la ferraille, les ficelles du destin. Le terrain vague. Là, le combat
pied à pied, le cocktail Molotov, la douleur qui mange le sein gauche.
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Boudica



13

     Hordes de chiens noirs, concerts de klaxons, vagues de sang ;
les sous-préfets rapportent que des mégères prêchent la folie
froide ; ils signalent l’apparition d’une nouvelle langue.

     Tout en surface, sourire, soumission. Villages de jonquilles
et d’ajoncs. Leméli-mélo des raisons, l’âge du bronze dans les
chromosomes.

     Veillées dans le jus des fougères, la Vie des Saints, la littérature
à l’estomac. On se casque de haine, on fait bouillir la marmite.

     Où naît le fer et la mouette. Les Aztèque et les Iroquois sous
le zéro des vieilles lunes. Encore un coup, la canonnière et la
colonne ardente, le massacre des druides, le club Méditerranée.
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Boudica



12

     Loin de la mer, par l’oued et l’aber. Les guerriers mondains
et les incendiaires aux pieds sales. Truites rouges, hérons bleus.
Minorités dévorées.

     La poussière, les coups durs, les pétards mouillés. Derrière
un écran de chansons, la suffoquée, la mouvante, la duchesse en
sabots.

     L’amante qui se tait. Muzak dans les moulins à prière.

     Pays dévasté, la démence dans les pages. Une femme dicte.
Pot-pourri des slogans. Kentoc’h mervel. La liberté ou la mort.


Kentoc’h mervel. : « Plutôt mourir ».
Devise de la Bretagne ;
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Boudica



11

     Cuisses et croupes, miroirs, tapisseries de luxe. Le ciel par la fenêtre,
la terre qui voulait qu’on fût regard sans pitié.

     Les doigts travaillent, le bas-ventre imagine. Les paysans
poussent à la roue du char de Boudica. Les princes ont trahi.

     Dans le désert des objets made in France, la pomme de terre et le
pois chiche. On se bat à la fourche et au couteau. Le poète vaseux
et le tireur d’élite.

     Levez les yeux ; le bombé de l’horizon, les collines uniformes. Baissez
les yeux : le désir sous la peau et les os.
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Boudica



10

     Les cantiques de la chiourme à pleine gueule. Charrient le jour et la nuit, la
baie des Trépassés. Paysans de basse époque, compliquants, compliqués.

     Anatomie d’une vengeance. Les attaques nocturnes, les têtes de mauvais
rêve. Cache-cache, catimini.

  Avant-garde des tribus en instance. La lune rousse, les lessives de sang. O
laveuses péremptoires aux mains comme des oiseaux blancs.

     Entre le fric et le frac, le colon hygiénique maudit la saison. Il rêve de
Tibre, d’Ile-de-France. En ce lieu nul, aux hommes peints en bleu, aux
femmes tatouées qui ne jouissent pas.
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Boudica



9

     Ligne droite des avions à réaction, métal d’une couleuvre ; haines
d’eau morte. L’appareil des fleurs sur la saison qui voudrait.

     Feux d’ordures dans les décharges municipales. Sur les scènes de
patronage, les comédiens anguleux, les poètes sur feuilles volantes.
Le nom des dieux aviateurs clamé dans le fracas des chaises qui
grincent.

     Conciliabules autour des lits-cages. Les chants millénaires battent
de l’aile. Les druides noyés s’éloignent au fil de l’eau.

     La terre sans oiseaux, les hameaux sans lumière. De la parole de tous,
la grammaire, les gros mots. Du nom de Boudica, le jardin des roses /
jardin des supplices.
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Boudica



8

     De Nantes à Carhaix, les banques de crédit, le casse-cœur. Payés en
monnaie de singe, les clans sédentaire n’aiment pas qu’on les bouscule.

     Les rhapsodies du marasme, les vendeurs de cartes postales. Les bénis oui-
oui, les prophètes parachutés. Le grand tapage des chiens qui lèchent.

     Beaucoup de bruit pour rien. L’œil : brèche ouverte, chose claire. Lèvres
ouvertes sur maintenant ou l’exil.

     Les hameaux crachent les ancêtres et ne répondent de rien. Barils de
poudre. Cités d’urgence.
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Boudica



7

     À Carhaix, le miroir fêlé, le couteau taché de sang. Dans le miroir, Boudica.
Balaie de sa robe l’argile des chemins creux.

     Le livre ouvert dans le noir. Le bidon d’essence sur la vieille paille d’une
chaise. Le laser du soleil dans la chambre de bonne.

     Vers la fin de l’après-midi, le bât blesse, on relit les architectures, les
images volées, On fait voler en éclats.

     On sourit aux vieilleries des littératures lacrymogènes. On aime. de la
rengaine au nœud gordien.
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Boudica



6

     Femmes fidèles, bambins bruts, adolescents à vau-l’eau : ora pro nobis.

     Trop de tristesse jusqu’à l’os. Au tour des mots menteurs de tomber
en poussière. En attendant les autres.

     Les pète-secs romains en leurs bustes de plâtre aux yeux vides. Avalent
ses somnifères et se font dégueuler. Travaillent pour les choix de textes
et les musées.

     À la vitesse de l’herbe, à la vitesse du feuillage. Boudica qui fut verte,
dans la cloche de la nuit. Boudica au peigne fin, qu’elle parle avant
l’hiver.
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Boudica



5

     Grammairiens et philologues, dans les périodes obscures. Et
s’il fallait recommencer. Partageurs de ce qui tremble. Voyeurs.

     Dans le chaudron les porcs tournent en rond. La voix plus
blanche que d’ordinaire. A toute pompe.

     Le pain sec et l’eau. Tant de mots vieux, tant de gestes
hasardés. Le buvard, le sable.

     An 61, saison des humiliés. Le peuple est debout qui était
couché. Cœur battant, le courage par à-coups.
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Paol Keineg
Sans esprit de retour



2

Je me souviens de souvenirs écrans
peut-être traversés
par la ruée du chien et du goret au verger
et à la manière dont on emmanche

les fourches
je m’attends à quelques catastrophes.
C’est l’affaire du particulier
d’imprimer au corps

un monde d’objets
et d’abstractions qui mettent sur la piste
de conclusions difficilement
explicables.

Où placer les mots qu’on a répétés
à satiété ?
Et les mots restés neufs
jusqu’à la corde ?


/ Revue numérique Secousse, N° 3, Mars 2011
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Paol Keineg
Sans esprit de retour



1.
À Guy Etienne

Le journal parle du « rythme des saisons ».
Le dictionnaire fonctionnaire raconte
que rythme et rime ont la même origine,
et je me demande comment vient

le bonheur de créer au plus juste
des mots nouveaux.
Reste qu’il est difficile de prendre congé
des bonheurs réels du passé

quand dépaysé on a pris dans la gueule
crise sur crise
En ce jardin d’avril
je peux encore découvrir l’Amérique,

ses anciens noms, ses mensonges,
et pour détendre mes problèmes de langue
c’est presque trop beau
la brèche dans les nuages.


/ Revue numérique Secousse, N° 3, Mars 2011
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Paol Keineg
CROQUIS D’OLINDA


Entre mer et montagne
la ville établie dans les palmiers et le plaisir de durer.
Tout un commerce amoureux de choses vraies, malgré
  l’inconvenance de la misère.
Pluie ou soleil, les comités de manguiers délibèrent
  entourés du respect de tous.
Près du marché aux esclaves
j’ai froissé de l’index la lingerie fine de ton sourire.
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