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Citation de hcdahlem


Pendant plusieurs dizaines de millions d’années après leur surgissement au milieu de l’océan par l’action sismique et volcanique, ces lieux furent libres de toute présence humaine. L’île haute, l’île escarpée, qu’entoure une étroite bande côtière bordée du récif corallien, hérissée de pics, de crêtes, d’arêtes et de cascades, est une formation récente à l’échelle de la géologie. Les vents et les oiseaux avaient apporté les graines et les insectes. L’ensemble des données linguistiques et botaniques, archéologiques et biologiques attestaient de la venue tardive de populations du Sud-Est asiatique, d’archipels en archipels, par bonds successifs, au long des générations, les premières sans doute après le début de l’ère chrétienne ou dans les premiers siècles de celle-ci.
Je voyais les longues pirogues à balancier naviguer toujours plus loin vers l’est, sur des milliers de kilomètres. Une vision satellitaire, avant de redescendre au ras du sol parmi les hommes et les plantes, offrait en accéléré une chronologie courte. Jusqu’au neuvième siècle, le niveau de la mer est supérieur de plus d’un mètre, la végétation endémique trop pauvre, la diversité de la faune et de la flore insuffisante pour y vivre de chasse et de cueillette. L’installation se fait par sauts de puce, des allers-retours, une série de bonds, les îles Sous-le-Vent puis les îles du Vent, les Tuamotu, les Marquises encore plus à l’est, enfin l’île de Pâques, la plus proche de la côte américaine.
La navigation hauturière des pirogues à double coque apporte le taro et l’igname, l’arbre à pain et le bananier, le mûrier et l’hibiscus, la canne à sucre et le cocotier, le pandanus pour couvrir les toits, le poulet et le chien et le cochon pour les manger. Une avant-garde surveille les plantations et les élevages avant l’arrivée d’une colonie plus nombreuse. Si, à l’époque des premiers contacts, les populations vivent en harmonie avec leur environnement et sans disette, c’est après des siècles de travail et d’habileté, l’invention des techniques de pêche dans les lagons et les récifs et d’irrigation des cultures.
Non seulement ces hommes ne vivent pas depuis des temps immémoriaux dans une nature édénique mais dans un paysage qu’ils ont façonné depuis peu, ils ne vivent pas non plus en paix. Dans la Nouvelle-Cythère comme ailleurs et partout dans le monde, la guerre fait rage entre les chefferies et les hommes n’y sont pas moins sanguinaires. Si leur ingéniosité taille et polit l’hameçon en nacre elle invente aussi le casse-tête et la lance à pointe de pierre. Sur chaque île des conflits meurtriers opposent les clans. Dès qu’un chef est parvenu à asservir l’ennemi, après qu’il a offert à ses guerriers le festin cannibale de quelques vaincus, il les envoie soumettre l’île voisine, arme les pirogues de combat pavoisées des fétiches.
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