De mille écus, ôtant douze cents francs, restaient six cents écus pour le père, la mère, les deux demoiselles, les six domestiques et les trois chevaux. On se serrait un peu à la ceinture.
Mais que d’espérances ! Joulou avocat ! Il n’y a plus de sot métier. Que parlez-vous de déroger ? Et les élections ! Chrétien Joulou était un peu député par droit de naissance. Les maîtres de forges n’auraient pas beau jeu à dire de lui « un hobereau sans éducation ! » Sacrebleu ! sans éducation ! douze cents francs par an, dans la « capitale ». Pendant trois ans ! Mille six cents francs. Gare aux maîtres de forges ! Joulou avait un grand avenir. La plume a remplacé la lance. Ouvrez pour Joulou les deux portes de l’arène moderne !
Que disions-nous ! Trois mille six cents francs ! et les huit ans de collège à Vannes ! à sept cents francs par an, comptez. Et les mille francs prodigués d’un coup au gaillard qui s’était déguisé en Joulou pour passer l’examen du baccalauréat ! Et les inscriptions de l’école de droit, religieusement lues par Joulou ! Et les examens dévorés ! Et tout l’argent envoyé en cachette par Mme la comtesse ! Taisez-vous ! Joulou était un animal hors de prix, un baudet de quinze mille francs, au bas mot ! Pour quinze mille francs, on aurait pu marier les deux demoiselles, acheter une ferme ou mettre à la tontine. Mais, réflexions faites, on aimait mieux avoir Joulou, coûte que coûte, à cause de son avenir, et l’on avait bien raison, vous verrez.