Alistair retint son souffle. [...] Sa main ne pouvait s'empêcher de trembler, faisant vibrer la poignée de la porte. Il raffermit son emprise sur cette dernière, comme pour se donner du courage. Il inspira et expira, tendu. Des larmes coulèrent sur ses joues pâles de terreur tandis que ses prunelles grises, aux veines éclatées par les pleurs, fixaient le plus horrible spectacle qu'il lui eut été donné de voir.
Le jeune homme serra les dents et renifla un bon coup ; ce fut comme un signal... celui de s'avancer petit à petit vers l'horreur qui s'étalait face à lui. Il expira à nouveau, glacé et tétanisé, tandis qu'il progressait pas à pas. Son cœur rata un battement. Il déposa une main sur sa poitrine.
La pointe des chaussures d'Alistair effleurait désormais la mare de sang dont le bois du parquet était gorgé. Il ravala sa salive, passa un doigt sous son nez et se pencha sur les deux corps qui gisaient l'un contre l'autre. Celui de son frère, John, et de sa belle-sœur, Isabel. Tous deux criblés de balles, laissés pour morts dans leur propre sang et dans le propre maison
On se découvre le visage en présence des siens, jeune homme.
Ce dernier grimaça. Fichtre ! Bon sang ! Il penserait qu’il le laisserait tranquille… Lucy nota un certain malaise au moment où son oncle porta sa main au bandeau qui couvrait son œil gauche. Il le retira puis le fourra à la hâte dans l’une des poches de son pantalon. Quelques convives poussèrent alors un cri de stupeur. Lucy se sentit vaciller un temps, mais se reprit bien vite alors qu’elle fixait l’objet qui était fiché dans le crâne de son oncle.
Le fantôme revit ce qu’il faisait avant de mourir. Il est coincé dans cette brèche du temps et est ainsi incapable de s’en sortir, sans compter qu’il est persuadé d’être vivant. Ce n’est qu’après avoir vécu cette scène une bonne centaine de fois qu’il prend conscience qu’il y a un souci quelque part…
- Ah, parce qu’en plus vous les prenez pour des cons ? Attendez… ils se rendent pas compte, d’entrée de jeu, qu’ils ne sont plus de ce monde ?
- Parfaitement.
Quand on verse dans le vol à la tire, il faut être comme l’ombre de quelqu’un – art dans lequel Lucy n’était pas encore très douée. Cependant, elle était encore en apprentissage !
L'apparence, quoi que l'on fasse, n'est rien d'autre que la manifestation physique de ce que l'on est en dedans, vous n’êtes pas d'accord ?