Enfin, il va pouvoir servir à quelque chose ! et ce quelque chose n’est pas rien : il ne s’agit pas moins que de sauver le genre humain !
Il s’agite, prépare sa vidéo-présentation tout en rêvant à son retour sur Terre. Retourner sur Terre, et de quelle manière ! Il imagine l’avenir glorieux qui l’attend, quand, tels ses illustres prédécesseurs, il paradera dans les avenues new-yorkaises.
Quel destin : passer du statut de raté oublié, à celui de héros mondial, rapatrié de Mars, sauveur de l’humanité ! Adam Aldrin ! On clamera son nom… Il s’emballe. L’espoir et la joie l’envahissent… Adam pleure.
Incapable d’agir sur le cours des choses, impuissant, il suivit sur son écran les derniers instants de vie sur la Terre. Après deux ou trois jours, les chaînes de télévision avaient cessé d’émettre. Même la station spatiale internationale avait été engloutie : ultime spectacle qu’Aldrin avait enduré dans la frustration la plus totale. Désormais, la Terre, la planète bleue, formait une énorme boule de merde marron, qui faisait penser à Jupiter... Pour Aldrin, tout était clair !
Dans l’univers, justement, sur Mars précisément, le live n’est pas encore terminé. Parce que cette daube fait le buzz, le géologue Adam Aldrin suit l’émission comme un con. Il se dit d’ailleurs qu’il est con. Mais il regarde, et il se trouve de plus en plus con. Ça l’affecte, c’est un scientifique dépressif, sniff, sniff, parfois agressif. Dans quelques minutes, Aldrin, le boring hors service, grognera : « Cette fois-ci, c’est la fin du monde ». Il ne croira pas si bien dire.
La pauvre fille n’en était pas pour autant morte, on pouvait encore vaguement l’entendre, parfois pleurer, parfois hurler… alors, des grumeaux remontaient à la surface de la masse, des bulles se formaient, explosaient, relâchant dans l’air des miasmes pénétrants. Mais, ce qui valait ce coup de téléphone à la plus haute autorité du pays, c’est que la masse informe gagnait en volume, d’heure en heure
Ce jour-là, l’improbable se produisit : une météorite tomba et l’écrasa comme une blatte ! Il ne restait donc plus que le géologue fanatique, en quête de fossiles, de preuves de vie. Ne trouvant rien, le brave homme avait muté en un vieux con soporifique et cynique.