Art poétique, Armand Monjo
1)
Je suis un poète primaire
Penser tout sec n'est pas mon fort
Philosophe je vous préfère
pain bis gros rouge et Roquefort
Je suis un poète primaire
Je vous ai trop connus beaux masques
jongleurs de l’Être et du Néant
subtils pourfendeurs de tarasques
et fiers plus que rois fainéants
Je vous ai trop connus beaux masques
Et devant les nouveaux Zomères
du vers cosmico-primitif
vagi du ventre de leur mère
en cris intensément pensifs
je reste un poète primaire
2)
La poésie des tours d'ivoire
de douillets intérieurs bourgeois
serait morte à ce qu'on dit Voire
Salons mondains ou villageois
raffolent de ces rabats-joie
que l'on montre les jours de foire
La poésie métaphysique
et son odeur de bénitier
a de bien subtile musiques
et d'innombrables héritiers
C'est devenu presque un métier
pour aspirants académiques
On arrive à lui préférer
la poésie tous couteaux tirés
que Maïakovski recommande
Les trafiquants de dividendes
n'ont jamais pu la digérer
2006 - [p. 346]
« Lorsque après un long et austère travail, le XVIIIe siècle eut aboli — ou cru abolir, ce qui revient au même — la figure du Dieu à barbe blanche qui couvre chaque humain de son regard et le protège de sa dextre, il n'a pas aboli du même coup le problème religieux. Car l'aspiration mystique est une chose et l'emblème qu'on offre à cette aspiration pour se satisfaire en est une autre. L'emblème disparu, l'aspiration demeure. L'homme a soif de trouver au-dessus de lui un réceptacle où pousser les vœux informulés qui persistent à sourdre du profond de lui-même... ».
Pensez-y bien. Si ce que nous faisons, vous, moi et beaucoup d'autres, ici en France, là-bas en Italie, en Grande Bretagne, en Allemagne de l'Ouest, en Yougoslavie, en Grèce, en Turquie, dans les Pays scandinaves, partout, et je ne parle pas de l'Asie, si ce que nous faisons vient à rater, c'est fini de la primauté américaine. Fini…..Une escadre par ci. Un groupe de bombardement par là; Quelques bons chars ailleurs. Et ils se tiendront tranquilles.