Pierre-Julien Quiers

Ce livre ne prétend pas à une quelconque exhaustivité quant à la société tibétaine et aux menaces qui pèsent sur son identité. Il n'est un travail ni de tibétologue, ni d'historien. Notre souci a été de raconter des histoires d'homme et de femmes, dont les vies illustrent quelques épisodes du Tibet d'hier et d'aujourd'hui. Citadins, collabos, anciens nomades, réfugiés, tous vivent le Tibet occupé, à leur manière, avec plus ou moins de courage ou de résignation. Pour certains, les horreurs du passé ont laissé des traces indélébiles. D'autres s'adaptent ou composent.

Mademoiselle
Je suis à me demander en commençant cette lettre si réellement je vous surprendrai beaucoup. Il est vrai je ne vous ai jamais dit quels étaient mes sentiments à votre égard, mais deux cœurs ne se comprennent ils pas sans parler ! Vous êtes trop intelligente pour n’avoir pas compris ce que signifiaient ces paroles à double sens, ces regards échangés avec avidité, ces visites sans but. Oui, ma chère Rosa, puisqu’il faut vous le dire, mon cœur est à vous. J’ai bien hésité et bien pensé avant de prononcer ce mot, mais je ne peux plus le cacher, mon cœur me le défend. Plaise à Dieu que mon amour soit partagé !
Il m’est si doux de croire que vous m’aimez aussi. Mon Dieu, que je serais malheureux si je me trompais ! Mais non, Rosa, je ne me trompe pas, je l’ai lu dans vos beaux yeux, dans votre doux sourire, nous sommes faits l’un pour l’autre. Répondez-moi cependant au plus tôt afin que je ne reste pas dans cette cruelle incertitude.

Tendre ami, j'ai trouvé dans mon almanach que le 28 juin était Saint Léon. Ainsi je ne pense pas revenir à vous écrire d'ici là, alors c'est pourquoi je ne veux pas passer sans vous souhaiter une heureuse fête ; oui je désire pour vous des jours aussi nombreux que les grains de sable de la mer et aussi brillants que le soleil sur son midi.