« Je n’ai pas de frères de race,
ni de religion, ni de communauté,
pas de frères de couleur,
pas de frères de guerre ou de combat,
je n’ai que des frères de Terre »
Michel Baglin
Je ne sais rien du métissage…
Je ne sais rien du métissage
rien de plus que ce qu’il donne
pour le partage
Je suis un silence habité
je suis pierre décousue en son centre
pour la naissance du rhizome
de nos bras à nos ventres
recevant l’appel du large sur la terre ferme
hanches d’azur et proue de femme-île
où retrouver repos refuge et feu
terre ronde
je tisse la mémoire de ma peau
aux visages qu’ensemence l’histoire
s’arrête ça
sang-mêlé
pierre sacrée
pierre d’aveux
pierre tubercule
pierre cœur donnant
pour que poussent les champs du monde
et naissent d’autres enfants
que tombe la pluie...
pierre d’espérance
quelques mots un signe et notre venue
posant des cils sur les dos trop voûtés
Soins lucides et gestes posés
pieds et mains du quotidien
araucarias algues et manguiers
peaux passerelle de ventres en fleurs
pour que balaie l’orage les couleurs
peaux sombres peaux claires
jusqu’au détour
chargeant le lieu de rives étrangères
clair-obscur de mon âme aimant la tienne
Je ne sais rien du métissage
rien de plus que ce qu’il donne
à mon sang......
(Quand chante le corail)
// Isamango Nouvelle-Calédonie (15/02/1964 -)
PERSONA
(en lisant Barbara Cassin)
Je ne suis personne
Je suis personne
J’avance avec mon visage
J’avance avec mon masque
J’ai le masque de ma voix
Sur la vérité du silence
J’invoque j’évoque
J’amplifie
Je n’ai d’autre spectacle
Que la parole
Pour apparaître
Je n’ai d’autre existence
Que le silence
Pour m’oublier
Une petite parcelle de ciel…
Un jour, un morceau de ciel tomba sur Terre. Les étoiles
ricochèrent sur le sol avec bruit.
Mais personne n'y prêta attention. tous les yeux étaient
rivés sur les écrans, et toutes les oreilles écoutaient les
bruits que ceux-ci diffusaient.
Seul un petit garçon découvrit cette catastrophe naturelle
si peu connue. Un petit garçon dont personne n'avait
voulu, un petit garçon sans nom dont les deux grands yeux
bleus murmuraient des vers à qui voulait bien les regarder.
Ce petit garçon observa le morceau de tissu bleu tombé du
ciel. Lentement, il releva la tête.
Ce qu'il découvrit était pire que les nuages de pollution et
les centrales nucléaires. Pire que tout.
Car en haut, tout en haut, entre les deux extrémités du ciel,
il y avait : Rien. Un Rien effrayant, un Néant qui semblait
vouloir engloutir le monde.
Le petit garçon sans nom rassembla tout son amour pour
l'Univers. Puis il ramassa avec courage le grand tissu bleu
et se mit à grimper.
Ces grands yeux fixés sur son objectif, le petit garçon
monta, escalada, rampa, avança.
Deux fois, le petit garçon sans nom tomba. Deux fois, il
se releva. Une fois arrivé sur le plus haut toit de la ville, il
fouilla dans ses poches et en sortit un beau fil bleu et une
aiguille.
Avec calme et précision, il recousit le ciel. Deux fois, il se
perça le doigt. Deux fois, il se soigna.
Au dernier point, le petit garçon finit son fil. Au dernier
point, le petit garçon observa le Néant qui le narguait,
le tentait.
Alors par amour pour le monde, pour le ciel, le petit
garçon plongea sur le couture.
À l'aube, rien n'avait changé.
À l'aube, tout avait changé.
p.116-117
//NIAMH FONTAINE, Lille, France
Les différences sont la crainte de l'homme .La peur de l'autre ĺe refus d'accepter ce qui ne nous ressemblent pas.Ouvrer les yeux et regarder l'âme cacher derrière la couleur de peau.
Moi, petit enfant
Moi, petit enfant,
Au visage innocent,
J'ai le droit.
Je peux jouer,
Profiter et rayonner.
Je veux apprendre,
Voir et comprendre.
Moi, petit enfant,
Au visage innocent,
J'ai le droit.
Je peux être soigné,
Aimé et choyé.
Je peux dire ce que je veux
Sourire et être heureux.
Moi, petit enfant,
Au visage innocent,
J'ai le droit.
Je peux être protégé,
Toujours en sécurité.
Je peux être musulman, juif ou chrétien
Parce que je suis libre et mien.
Toi, adulte malveillant,
Tu est fort et grand.
Mais tu n'as pas le droit
De me frapper, me tuer comme ça.
Je peux vivre et grandir sous un toit,
J'ai des envies et des droits,
Je suis libre de toi
Car ceci est la loi.
p.126-127
//MAYSSA MAALI, Meyreuil, France
TRANSPARENCE
Suis-je l’homme
Ou suis-je l’arbre ?
Dans la lumière noire
Du feuillage bruissent
Les murmures du cosmos
Le ciel m’invite
A sa transparence
J’ai les mains
Dans les poches de mon enfance
The Poet
Un jour j’ai rencontré
Un jeune poète américain
Dont le bagou moitié gobé
Changeait du style Quartier latin.
Matelots du navire
Qui ne sombre jamais
Aiment voguer contre-courant
Pour éviter l’alexandrin,
Et placotent et échos aux clapots de la Seine,
Tandis qu’il revient.
Ohé canonniers d’avant-garde,
Venez donc bombarder et la rime
Et le vers. Votre plume susurre.
En réponse aux mitrailles
Qui abattent votre clan.
Outre-mer, ni violence,
Ni démence truculente,
Juste une voix bien ferme
Aux accents nasillards
Qui sentent la fraîcheur d’une jeunesse qui ose.
Sa jactance volubile et subtile
Oppose et indispose,
Décompose, subtilise
Et vous met nez à nez
Avec la nouveauté.
Le griot d’Amérique a l’âme à s’amuser.
Un jour j’ai rencontré
Un jeune poète américain
Dont les vers tourmentés
M’ont fait revoir les miens.
//Chloé Berr/Université d’Aarhus, Aarhus (Danemark)
Un cœur qui bat
Dans la maison, on entendrait presque le silence, sans le crépitement du feu et le clapotis de la pluie qui tombe sans relâche sur le sol sec, craquelé, privé d’eau depuis longtemps. Le vent souffle sous les tuiles du toit.
Quand je sors, la porte claque derrière moi. Le goudron s’étale, coulée de lave noire prise entre les rebords gris des trottoirs. Je sens dans le jardin d’en face, l’odeur de l’amandier qui a fleuri trop tôt, cette année. Toute proche, la mer. De légers bruits d’eau, la dentelle d’écume qui se retire. La mer se laisse doucement finir. Elle renonce, s’abandonne et vient, peu à peu, mourir contre les rochers.
Et puis, il y a aussi, plus loin, un cœur, ton cœur qui bat, là-bas.
//Louise Assenbaum/Saint-André-de-Sangonis, France
Pluie
Il y a sur mon mur comme un carré de ciel.
Jamais un oiseau n'y a battu de l'aile,
Et nulle nuée ne l'a jamais atteint.
Il est là, sur mon mur, ruisselant opportun.
Ne soyez pas conquis par ses charmes cachés,
Car de ma tristesse il n'est que le reflet.
p.114
//MAËLYS DELOUIS, Clamart, France