La question centrale demeure : le roman a-t-il quelque chose à apporter à la cause environnementale dans une époque où l’image est omniprésente et apparaît comme le moyen de sensibilisation le plus efficace ? Un film touche un public infiniment plus large qu’un livre et certaines œuvres cinématographiques, documentaires ou fictions, n’ont rien à envier sur le plan artistique à la meilleure littérature. À cela s’ajoute que quiconque cherche à se familiariser avec la problématique environnementale trouve sur le Net des renseignements précis, souvent bien structurés et qui relayent les constats – et les inquiétudes ! – des scientifiques spécialisés. L’action concrète, quant à elle, est facilitée par l’existence de nombreuses associations, nationales ou internationales, qui fédèrent les bonnes volontés dans les domaines les plus divers de la protection de l’environnement.
Si ce n’est à l’évidence pas le roman qui sauvera le monde tel que nous le connaissons aujourd’hui, l’on veut croire que la littérature peut peser en raison de sa capacité à faire levier sur un imaginaire qui se développe dans le temps long. Son rôle pourrait d’ailleurs être d’autant plus central dans les années à venir que les sciences humaines, qui ont un temps accompagné les grands mouvements réformateurs, traversent aujourd’hui une crise. Triomphantes dans les années 70 à l’époque du structuralisme où elles touchaient un public bien au-delà du monde académique, elles peinent dorénavant à se faire entendre. Si l’on excepte l’histoire – domaine qui depuis les années 90 est devenu un enjeu commercial majeur et dans lequel les publications ne cessent de se multiplier – les sciences humaines ne font plus recette. Comme dans le même temps notre société de la connaissance en est venue à valoriser surtout les disciplines STEM (science, technology, engineering, mathematics), les passerelles entre la recherche scientifique, le monde de la pensée et celui de l’art sont moins nombreuses que naguère.