Citations de Rob Doyle (13)
"Les voyages de retours sont toujours plus longs que l'aller, plus mornes. La promesse du voyage est passée : il n'y a plus d'horizon des possibles ouvert devant nous, la seule destination qui reste est familière. On s'expose à la mélancolie des retours dès qu'on entreprend un voyage."
"La seule chose qui me transporte, c'est quand je lis un passage sur telle ou telle rue chez Zola, chez Huysmans ou n'importe qui et que je me retrouve ensuite dans cette rue. A ce moment-là, le monde prend un côté magique. Mais l'effet vient du texte, pas de la vie de l'auteur. Il n'y a que la littérature qui soit magique. Les auteurs sont simplement des passeurs."
"Terence McKenna , après avoir fait remarquer que "la notion de plantes ou d'animaux illégaux est à la fois stupide et ridicule", a répété que l'interdiction des psychédéliques par le gouvernement n'était pas motivée par la peur que ces drogues aient des effets nuisibles sur ses citoyens, mais par la prise de conscience "qu'il y a quelque chose en elles qui remet en doute la validité du réel". Des drogues comme la DMT et la psilocybine sont inquiétantes pour les pouvoirs en place à cause de leur dimension gnostique, de l'accès direct qu'elles offrent à des expériences qui menacent les paradigmes établis. En résumé, "elles vous font entrevoir la possibilité que tout ce que vous savez est faux".
"Il y a une douceur à penser que rien n'a d'importance, l'habituelle chanson du nihilisme occidental. Qui, en fait, n'est que l'orthodoxie de merde qu'on retrouve partout, le point de vue de base, même s'ils le déguisent en progressisme humaniste. C'est clairement plus flippant de penser que tout a de l'importance, que la moindre chose a des conséquences infinies. Ca, c'est un choc. Alors, ouais, il nous reste la responsabilité, mais pas d'échappatoire."
"C'est un aveu d'échec quand un écrivain dit qu'une chose est indescriptible, mais il existe des limites à ce que peut accomplir le langage et il est certaines expériences qu'on peut seulement indiquer vaguement du doigt, sans pouvoir les traduire par des mots."
Puis le silence a repris la forêt et je suis resté là, avec mes amis, au milieu des tombes, à me demander comment je vivrais l’instant si je cessais de m’y accrocher de toutes mes forces.
Avant j'écrivais surtout pour blesser les autres, pour les mettre à mal. Leur bonheur m'était insupportable _ je ne pouvais pas les laisser en profiter. Et je leur ai fait du mal : ce désir là a été assouvi. Maintenant je dirais que je préfère contaminer les autres avec ma perplexité.
- Tu es plus catholique que tu ne le crois, a-t-elle dit.
- Comment ça ?
- Regarde-toi : tu fais tout ce trajet pour voir l'appartement de Cioran ou la maison de Kafka.
Le livre devient autre chose que ce que j'imaginais. J'ai changé en l'écrivant – le processus d'écriture m'a fait changer. Je ne crois plus en ce à quoi je croyais quand je l'ai commencé et je me suis mis à croire à ce en quoi je ne croyais pas. Je t'ai dit, n'est-ce pas, que mon intention de départ était d'écrire un livre qui, à travers un mélange de souvenirs, de rêves, d'apprentissage et d'invention, soit une célébration de l'ailleurs, de la vie menée n'importe où sauf à l'endroit qui nous a vu naître par hasard, le seul genre de vie que je n'ai jamais pu imaginer. Mais c'est aussi un journal des changements qui se sont produits, se produisent, vont se produire – les lignes temporelles sont emmêlées, comme si le temps se repliait sur lui-même – entre le moment où j'ai écrit le premier mot et celui où je poserai le point final et que tout redeviendra possible.
L’avidité traversait ma vie en la mettant en pièces, comme une tornade, mais elle était aussi la force qui m'animait, me poussait à engloutir les livres, les plaisirs, les expériences.
Avant que je parvienne à écrire avec la compétence requise pour avoir des lecteurs, la vie était une torture, en partie parce que je ne savais pas quoi faire de ce que je vivais : ce n'était pas suffisant de se contenter d'être. Je devenais fou quand je pensais que la vie aurait tout aussi bien pu ne pas avoir lieu, que l'existence ne laisse pas de trace. Maintenant, j'écris sur mon existence et, d'une certaine manière, j'existe pour pouvoir l'écrire, pour que l'écriture réfracte la façon dont je vis.
Les tabous avaient été réduits en pièce et les écrivains se trouvaient libres de gambader à travers tous les sujets, tant qu'ils comprenaient que leurs mots n'avaient plus aucune importance. Les tyrans ne se fatiguaient plus à brûler la littérature : ils la savaient sénile et passablement éclopée.
La seule chose qui me transporte, c'est quand je lis un passage sur telle ou telle rue chez Zola, chez Huysmans ou n'importe qui et que je me retrouve ensuite dans cette rue. A ce moment là, le monde prend un effet magique. Mais l'effet vient du texte pas de la vie de l'auteur. Il n'y a que la littérature qui soit magique. Les auteurs sont simplement des passeurs.