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Citation de lanard


La mante religieuse (conclusion)
Il y a donc une sorte de conditionnement biologique de l'imagination, venu de déterminations fondamentales susceptibles d'intervenir chaque fois que l'intelligence ne dirige pas son libre jeu vers un but précis. Aussi agissent-elles également dans les mythes et les délires, pour prendre les pôles extrêmes de l'affabulation. Tant s'en faut d'ailleurs qu'elles rendent comptent intégralement du contenu des uns et des autres. Elles ne sont que des tendances, virtualités directrices. Aucun lien nécessaire et suffisant ne peut les orienter dans le choix des détails concrets dont elles sont besoin pour constituer une "imagination" proprement dite. Elles préforment seulement les lignes de force qui cristalliseront ceux-ci en thèmes et en motifs, puisant à satiété dans le particulier et l'anecdotique, utilisant les structures imposées par les données historiques et l'organisation sociale. Là est notamment l'erreur de la psychanalyse qui ne s'est tant ridiculisée dans la plupart de ses tentatives d'exégèse mythographique que pour avoir voulu trouver coûte que coûte dans les circonstances des récits ce qu'il fallait chercher dans leur schème dynamique: le ressort affectif qui donne au mythe son pouvoir d'emprise sur la conscience individuelle.
Le caractère collectif de l'imagination mythique garantit assez qu'elle soit de substance sociale, existant à la faveur de la société et en sa faveur. C'est là, certes, sont être propre, sa fonction spécifique. Mais son innervation, pour ainsi dire, est d'essence affective et renvoie aux conflits primordiaux suscités çà et là par les lois de la vie élémentaire. Le mythe représente à la conscience l'image d'une conduite dont elles ressent la sollicitation. Quand cette conduite existe ailleurs dans la nature, il trouve donc sa réalisation effective dans le monde objectif. De ce point de vue, on définirait les mœurs des mantidés comme un mythe en acte: le thème de la femelle démoniaque dévorant l'homme qu'elle a séduit par ses caresses. Phantasme pour l'homme, idée fixe de délire ou motif légendaire, cette situation est pour l'insecte la forme même de son destin.
De la réalité extérieure au monde de l'imagination, de l'orthoptère à l'homme, de l'activité réflexe à l'image, la route est peut-être longue, mais elle est sans coupure. Partout les même fils tissent les mêmes dessins. Il n'est rien d'autonome, rien d'isolable, rien de gratuit, sans cause et sans fin; le mythe même est l'équivalent d'un acte.
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