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Citation de hcdahlem


INCIPIT
Berlin, premier hiver
Chaque soir, pendant des heures, je marche sur les trottoirs couverts de neige sans prendre de direction précise. Les rues sont à peine éclairées et dans les coins, entre les réverbères ou les néons, l’obscurité se creuse et devient brusquement sensible. J’ai fini par m’apercevoir qu’elle ne recouvrait pas les choses, mais leur donnait plutôt un degré de consistance dont je n’avais jusque-là aucune idée : les grilles, les branches tombées par terre, les angles du caniveau me semblent plus vrais, mieux dessinés qu’ailleurs. Chez moi, le blanc des lampadaires les écrasait tandis qu’ici, le peu de lumière les gonfle et les soulève.
Je marche, la neige collée aux semelles de mes chaussures, mon appareil photo en bandoulière, et je regarde : voilà des mois que je longe les rues la nuit à la recherche d’un signe qui m’aurait échappé depuis mon arrivée. Avec un entêtement stupide, je plisse les yeux devant les arbres au tronc humide et froid, les vitres embuées des camionnettes, les noms listés aux interphones, les grues, les stands de Currywurst ou les traces dans la neige, je les scrute, mais n’y découvre rien, et à défaut de savoir quoi en faire, je les photographie. J’ai l’illusion qu’en les fixant longtemps à travers le viseur, sous plusieurs angles, en me retenant de respirer et en pressant doucement le déclencheur de l’appareil jusqu’à ce que le miroir pivote et claque, je parviendrai à entrevoir cette forme qui se dérobe sans cesse. Après chaque prise de vue, le flash émet un sifflement si faible que je le confonds parfois avec un acouphène.
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