Citations de Sarah Kirsch (31)
L'arrivée
La contrée lumineuse
Souhaite la bienvenue avec des iris d'eau
Des graminées en fête fleurissant noir
Tremblant baisant le creux du genou
Des ombres étendues dans le vent : courlis
A la mine souriante
Emplumée d'arbres la digue serpente
Et des nuées de moutons dispersés escaliers et
Passerelles de ce pays de mon coeur un ciel
Sur terre vert les haies vives infatigables
Débordantes sont un soutien
Pour mes yeux qui voient loin.
En été
... Ah les nuages
Comme des montagnes ils s'envolent par-dessus les bois.
Le silure un poisson vivant au fond de l'eau
...Au-dessous de moi les forêts conifères et bois blanc
Se distinguent facilement d'ici
L'automne est visible marron terne pour
Les hêtres chênes et mélèzes, les arbres d'hiver
Etalent leur verdure, encore plus fort...
Bouleversements
On s'aperçoit tard que
L'hiver est venu.
Une quelconque
Nuit de pleine lune nous laisse
Avec des plantes recouvertes de givre.
Et au cas où maintenant tu
Aspirerais au chagrin voici à ta
Disposition le monde entier mon fils.
Billet de remerciement
C'est une belle journée. Je m'assois dedans, les feuilles d'eucalyptus s'abaissent et se soulèvent, se soulèvent pendant très longtemps, et quand je vois le corps de l'arbre nu et blanc alors je sais ce que c'est une belle journée...
Grains noirs
L'après-midi je prends un livre
L'après-midi je pose un livre
L'après-midi je pense qu'il y aura la guerre
L'après-midi j'oublie toute guerre
L'après-midi je mouds du café
L'après-midi je reconstitue
Le café moulu en de beaux
Grains noirs
L'après-midi je me déshabille m'habille
D'abord je me farde puis me lave
Je chante je reste silencieuse*
* Ce poème, très critiqué pour manque d'attitude positive, valut à Sarah Kirsch une interdiction de publier temporaire en RDA.
Le village
Le soir c'était le silence
Les grillons se taisaient dans leurs trous
Noir sur la colline le chêne
Devant un ciel rouge vernis.
Alors des marais je revins au village
Traversai le chaume luisant
L'étoile et les pierres avaient un bel éclat
Dans les maisons s'allumaient les lampes.
La poussière moulue sur la route
Sous les pieds la renouée
Allait de porte en porte, un tapis d'été.
Lune brume fumée
Je roule en avant je pense
En arrière au loin
Est mon coeur d'antan
Il ne reste qu'un
Rire donc je roule
Toujours ne rappelle plus rien.
Ailes
La belle voix
Monte déjà
Survolant les marches
Me touche entre les
Omoplates
Endurance
J'habite dans cette
Maison merveilleuse
Aux fenêtres bien démembrées
Par lesquelles j'écarquille les yeux
Quand maintenant les nuits
Raccourcissent le cerfeuil prend
Le relais des étoiles par sa
Lumière terrestre sur la rive du
Léthé.
Froid
D'une mer noire de goudron s'élève
La lune. Tu devrais maintenant
Parvenir sous un toit coeur
Vénéré. Sinon la nostalgie geint
Sur son rêve perdu de la
Beauté du monde qui
Git ainsi affaissée.
Feuille s'en va car gel
Fait un temps autre.
Eveillée
Le saule têtard pleure dans le vent,
La pleine lune s'est
Posée sur sa meule.
Sous la voie lactée file
L'ombre du cygne.
J'imagine des retrouvailles.
Ainsi la nuit est blanche.
Pendant que je me raconte
Des histoires le rire
De la pie découvre le jour.
En fuite
Je partais loin
De moi m'es-
Hortais : oublie!
Et endurcis-toi.
Ainsi tu
Pourras parler de
Terre. Des arbres
Difficiles à décrire au
Début de l'été.
Croassement de corneilles
Mon étoile repère une planète
Grosse comme un poing et mon compas
Gisant au fond de la mer
Mais l'espoir veut danser
L'épervier au-dessus de la plaine
Seul lit les pensées.
La terre et les hommes re-
Devenus sauvages la réflexion
N'y peut rien le gros galet
est sur sa trajectoire en chute libre
Et moi-même
Descendante d'une famille de loups.
Début mars
Journée des courlis qui
En notes célestes
Distraient du travail. Mais très beau
Est ce clou pour fixer
Le sabot sur la poutre saillante
Sous le toit avancé.
Et beau est aussi
Le bruit de la pluie tombant
Chaude au printemps.
Et combien d'eau il y a dans le fossé par
Dessus saute le paysan
Et dans le vent claque
Vivante la porte de la cour...
Effacement
Les nuages qui naviguent hâtivement
En un rien de temps sont
Passés leur ombre
Court sur les fleurs de coucou
Les prés d'angéliques à la fin
Noircit les corneilles les effaçant
D'arbres morts.
Vie
Le vent ouvre et ferme
Sans cesse la porte de l'étable
Plaintes et gémissements
Tout autour dans les airs
Des ondes parcourent le corps
D'un chat roux qui passe
A travers les prairies non coupées.
Le crépuscule
Il fait vert sombre sous la pluie
Sous les vieilles voûtes des chênes
Jusqu'à hauteur du cou l'herbe non fauchée
Les nuages traînant bas rencontrent
Des humains qui sur le fond de la mer
Dans des villages engloutis déambulent
Rêveurs et des chiens en planant
Traversent une absurde existence
Les algues noires le varech flottant
Oiseaux qui nagent poissons qui volent
Amènent beaucoup d'agitation
Au-dessus des toits nous voyons passer les quilles
De bateaux de guerre anglais.
La Pagerie
... Les cigales parlent à trois voix, accélèrent, se dédoublent...
Chaque feuille
Je te dis ce que je vois parfois
Chaque feuille séparément sur l'arbre ou
Sur le gravier de petites faucilles ou comment
Cela va continuer avec moi : de courts séjours
Remballer tout et repartir.