Mon Dieu ! Un admirateur ? Autrefois elle lisait sa beauté dans le regard des hommes et s'en moquait un peu. Aujourd'hui, elle est sensible comme une lycéenne au regard admiratif de cet homme d'une cinquantaine d'années, svelte, élégant.
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- J’ai lu dans un livre de Christian Bobin - je sais que tu aimes cet auteur - qu’un secret, si on est seul à l’avoir, ce n’est rien. Il faut le dire à l’autre pour que ça devienne un secret. Qu’est-ce que tu en penses ?
Dans les immeubles modestes, les stores étaient le plus souvent de nylon blanc ou genre « bonne femme », imprimés de fleurettes aux couleurs trop vives. Dans les quartiers privilégiés, résidentiels, les vitres étaient habillées de doubles rideaux aux tissus lourds, doublés et passementés, savamment drapés, derrière lesquels elle se plaisait à inventer un décor semblable à ceux de son enfance.
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Merde ! Je n'ai aucune envie de vivre comme ma mère. D'être culpabilisée pour la moindre chose, de jouer les confidentes, les infirmières, et surtout de croire que sans homme dans sa vie on n'existe pas. Toujours tout comprendre, tout admettre, tout pardonner, c'est fou, non !. Et nous dans tout ça qu'est-ce qu'on devient?
Il était revenu fatigué, meurtri par le froid, la tempête, mais vainqueur. Plus humain et plus grand. Elle savait maintenant que, dans cet engagement, elle aurait à ses côtés une vie difficile, certes, mais privilégiée, exaltante, exceptionnelle. Auprès de lui elle ne connaîtrait jamais la monotonie. Puisque, un jour, il pouvait ne pas revenir, il fallait vivre intensément, liés l'un à l'autre, profiter pleinement de chaque seconde, de chaque minute, de chaque heure, jusqu'au prochain départ.
Tout autour de la terrasse, les montagnes se dressent et forment un vaste amphithéâtre. Un amphithéâtre sans arène, sans spectateurs, où l’homme, au pied de ces colosses de granit, livre seul son combat dans les craquements sourds des glaces et des pierres. Là, aucune place pour le bluff, la tricherie. L’homme se mesure à lui-même. Juste ça.