AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Charybde2


Le cambrioleur trépigne de rire, content de lui. "Franchement, Lauren Bacall dans Le port de l’angoisse reprend mot pour mot certaines des répliques de Jean Arthur dans Seuls les anges ont des ailes. Mais, en attendant, La poursuite infernale, c’est presque un western-polar avec l’ambiance glauque et tout le merdier, le premier film de Ford après la guerre et les camps de concentration, et peut-être qu’il n’était plus dans son trip habituel sentimentalo-joyeux d’Irlandais bourré. Regarde-moi un peu Henry Fonda en Wyatt Earp, ou Victor Mature en Doc Holliday, ou encore Walter Brennan en Pa Clanton ! Je ne te parle pas du Grandpa McCoy de la télé, je te parle de La poursuite infernale, où Walter Brennan est un enfoiré de tueur absolument dément, tu m’entends ? "Quand tu dégaines, c’est pour tuer un homme !" Putain ! Dans La poursuite infernale, tu retrouves toute la puissance mythique inhérente au western, mais en des termes que les Blancs de l’après-guerre pouvaient comprendre, en partant du principe qu’ils étaient tous plus malins et sophistiqués qu’avant-guerre. L’Ouest archétypal créé par Ford, avec ses codes de conduite que les gens respectaient ou bafouaient – et j’essaie juste de rendre justice à cet enfoiré en mettant de côté, autant que possible en tout cas, le fait qu’il ait joué un membre du Klan dans cette connerie fumeuse qu’est Naissance d’une nation -, enfin, quoi qu’il en soit, la vision de l’Ouest par Ford était tellement aboutie que Hawks, Budd Boetticher ou Anthony Mann n’ont pu que faire des ajouts, tu vois ce que je veux dire ? Mais évidemment le western a évolué avec la manière dont l’Amérique se voyait elle-même, d’une sorte de nation héroïque où tout le monde est libre jusqu’à ce lieu moralement dégénéré et corrompu qu’elle est véritablement, et maintenant imagine-toi que ce sont des Italiens à la noix qui font les seuls westerns encore dignes d’être regardés, parce que l’Amérique blanche est tout simplement trop paumée, elle ne sait plus s’il faut adhérer au mythe ou au non-mythe, et du coup dans un pays où les gens ont toujours cru qu’ils pouvaient échapper à leur passé, aujourd’hui on apprend que l’Amérique est le pays où c’est justement impossible, le seul endroit où, de même que le blabla finit par devenir impossible à distinguer du non-blabla, l’honneur finit par devenir impossible à distinguer de la trahison ou tout simplement, disons, du meurtre de sang-froid… Qu’est-ce que tu fais ?"
Vikar le détache de la chaise. "Ne reviens plus me cambrioler", dit-il.
Le cambrioleur paraît presque vexé, mais il se lève lentement de sa chaise, un peu péniblement, puis cambre le dos et se masse les poignets. "Ok, mec, répond-il calmement. Ca roule.
– Désolé pour ta tête", dit Vikar.
Le regard du cambrioleur est de nouveau attiré par le film. "Pas de problème. Les risques du métier. Au fait, il y a dans sa voix une vague supplique, je peux regarder jusqu’à la fin ?
Commenter  J’apprécie          00









{* *}