J'allume le désert des quatre soifs du monde
brasier des quatre fleuves où les cerfs royaux
boivent dans leurs bois l'eau des clairs de lune
brasier des quatre mains tendues entre elles
belles comme des yeux qui n'ont rien vu qu'amour
Je suis la fille en feu, l'éclatante bougie
qu'un geste maladroit renverse sur le monde,
j'allume l'incendie qui dévore mon ombre...
Derrière moi l'éclipse blanche de soleil
brûle avec la douceur d'une étoffe.
Nous enverrons la mort brûnir dans les solives
et les bois secs que les mois d'août ne mouillent plus
dans les clartés de lune opaque et continue
quand les vents fuient les cimetières et les grives.
Nous enverrons la mort pourror dans nos blessures
puisqu'aucun lieu n'a plus de paix pour qu'on y veille,
puisqu'aucun sein n'a plus de lait, ni la groseille
de suc léger qu'on boît au fruit, à la chair sûre.
Mains de douleur, gorges du temps, membres malades,
liez la mort en fagots noirs près des murailles,
que nos regards montés du fond de nos entrailles
lèvent enfin sur l'arbre vif, des yeux de jade.