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Citations de Ulrich Cabrel (51)


Un jeune explique qu'il est missionné par ses proches pour arriver en Europe et envoyer de l'argent au village. Quinze familles se sont cotisées pour lui, il ne peut pas échouer.
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Comment te décrire ma sœur ? Déjà, c’est une femme et, tu le sais bien, c’est dur d’être une femme au Cameroun. Pas besoin d’avoir un vagin pour s’en rendre compte : quand la violence règne, la différence physique compte. Toute la société est pensée pour les hommes. Ce sont eux qui sont espérés à la naissance ; eux qui héritent ; eux qui vont en priorité à l’école ; eux qui ont le plus de vrais métiers ; eux qui se promènent librement dans l’espace public ; eux qui dominent et qui se bagarrent ; eux qui sifflent quand une fille passe dans la rue ; eux qui dépensent l’argent de la famille au jambo ; eux qui sont assis à la terrasse des bars. Et pourtant, ce sont les femmes comme Banie qui font tenir la société, sans poste ni reconnaissance ; elles qui se démènent pour nourrir la maison ; elles qui bataillent pour joindre les deux bouts ; elles qui payent les dépenses ; elles qui travaillent sept jours sur sept au marché ; elles qui éduquent les enfants ; elles qui assurent toutes les tâches ménagères ; elles qui sont premières en classe quand elles vont à l’école. Je te jure, l’Afrique changera le jour où les femmes nous feront bouillir le derrière dans la marmite et prendront le pouvoir.
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J’aime quand les filles s’affirment. On cause, puis on danse toute la soirée. On ne s’embrasse pas le premier soir, mais ça vient vite. Rapidement, elle prend une place dans ma vie. Elle vient à la maison et on se balade dans le quartier, sans s’occuper des sifflements jaloux sur notre passage. Sa grande ambition : me changer.
– Tu dois grandir et arrêter tes bêtises, laisser tes mauvaises fréquentations et ne plus parier. Tu es à moi, je te veux en entier.
Ma mère trouve en elle une alliée et l’envoie me chercher au jambo. Je suis accroupi au bord du stade, sucette glacée au bec, en train de jouer à pile ou face. Elle arrive par-derrière, me prend par l’oreille, et tire, tire !
– Laisse tout et viens. J’ai dit : laisse tout. Si tu touches un jeton, je pars. Si tu frôles un jeton, je pars. Redresse-toi, allons. À trois je pars pour toujours. Un. Deux…
Elle me parle comme à son disciple. Je déteste ça autant que j’adore.
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Tanger est une ville de fous. Tu es face à l’Europe, mais en Afrique. Pour certains, c’est un trait d’union ; pour toi, c’est un cul-de-sac. Tu es tellement proche du Graal que tu brûles. Pour bien des Africains, Tanger, qui ne devait être qu’une étape sur le chemin de l’Europe, est devenu leur prison, leur purgatoire, tout le monde entre au paradis mais pas eux. Pas étonnant que la violence entre Noirs, ici, soit décomplexée.
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Le patriotisme vibre. C’est un sentiment irrésistible, tu te sens appartenir à une meute, un troupeau de lions qui part chasser l’antilope. Moi-même j’engueule mon pote Polusson : il ne peut pas rester chez sa mère.
– Tu es avec le quartier ou contre lui, fais ton choix.
L’attaque est préméditée. Elle se déroule à la kermesse du collège, qui mord à cheval sur les deux bidonvilles. En face, ils ne voient rien venir. Les gosses du quartier ont répondu présents. Armel est au premier rang, avec les chefs de gang, pour se venger. Bâtiment est avec moi, prêt à cogner. Les Russes nous rassemblent derrière la décharge juste avant l’attaque. Chacun pioche parmi les ordures et fabrique son arme. Certains trouvent des couvercles de boîtes de conserve. Je prends un bâton.
Le top départ est donné. Nous nous élançons comme des bœufs.
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J’ai de la compassion pour eux tant je leur ressemble. Je dépense le reste de mon argent en achetant un produit à chacun. Je ne comprends pas. Ces enfants sont les mêmes qu’au Cameroun, aucune différence. Pourtant, j’ai appris au collège que le Nigeria est la première réserve de pétrole d’Afrique. Pourquoi alors sa population est-elle si pauvre ? Qu’est-ce qui cloche en Afrique ? Pourquoi ça ne fonctionne pas ?
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Nous ingurgitons les leçons dans notre cerveau comme on goinfre des animaux. Ma chance, c’est que j’ai une mémoire prodigieuse. Je retiens tout ce que j’entends. Je n’ai pas trop à travailler pour avoir de bonnes notes. Par contre, je suis souvent puni. Un jour où je discute avec ma voisine, en cours d’anglais, le professeur nous surprend. Il me fait venir au tableau et me fouette dix fois le derrière avec sa ceinture. Puis il me demande de faire le planteur de chou. Je suis dans un coin, je dois toucher le sol avec mon doigt, tout en levant une jambe.
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Tous les jours, ma mère est en colère contre mon père. La raison principale : l’argent. Elle se plaint, gémit, hurle : tant de misère, ce n’est pas possible. Comment peut-il se laisser si mal payer par son patron au point de ne pas pouvoir assurer la ration nécessaire à sa famille ? Les accusations de ma mère glissent sur lui sans jamais l’atteindre. Il garde un air impassible, comme si elle n’avait rien dit. Cette indifférence excite encore la colère de ma mère : est-il possible d’avoir à ce point renoncé à se battre ? Mon père ne répond jamais. Il m’a appris cette vérité : c’est le silence qui fait l’âme d’un être humain.
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N’oublie jamais que ce ne sont pas mes mots qui sont durs, c’est la réalité qui est brutale. Promis, je vais aussi te faire rire, je suis beau gosse et j’ai la tchatche. Je te demande une seule chose : ne me juge pas, ça n’a pas de sens d’appliquer ta morale à ma vie. Déjà, arrête de me parler de choix, je n’ai rien décidé, il n’y avait pas d’alternative. Toi-même, peux-tu affirmer avec certitude que tu aurais agi différemment si tu avais été à ma place ? Une fois que je t’aurai tout dit, tu me répondras.
D’abord, tu dois comprendre d’où je viens. Je te présente Bonaloka, un des bidonvilles les plus paumés, crades et dangereux d’Afrique, à quelques kilomètres du centre de Douala au Cameroun. Près de dix mille familles sans le sou y vivent, entassées dans des vieilles baraques dont les toits s’arrachent à la première pluie. Les maisons mal emboîtées tombent les unes sur les autres. Tout le monde s’épie et se contrôle.
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- Comment tu rentres en Europe? On a ni passeport ni visa. (...)
- Est-ce qu'il faut de l'argent?
- OUI, beaucoup, au moins 300.000 francs.
-Comment en trouver autant?
Il me dit qu'on doit en parler à nos familles.
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D'abord tu dois comprendre d'où je viens. Je te présente Bonaloka, un des bidonvilles les plus paumés, crades et dangereux d'Afrique, à quelques kilomètres du centre de Douala au Cameroun. Plus de dix mille familles sans le sou y vivent, entassées dans des vieilles baraques dont les toits s'arrachent à la première pluie.
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C'est là que je découvre les gens que les Français appellent les SDF. Dans le français de France, on ne nomme jamais la réalité en face. Tu ne dois surtout pas dire un "clochard"! Tu n'améliores pas la dure vie de ces hommes, tu adoucis ta façon dont tu les désignes. Tu te donnes bonne conscience, mais eux, ça ne leur sert à rien.
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Quand tu es jeune, tu parviens plus facilement à émouvoir les gens. Ils nous appellent les miskines, les enfants abandonnés.
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Sur le chantier, les tâches sont réparties : les Noirs creusent le minerai dans des galeries et concassent les pierres ; les Touaregs font le manœuvrage et traitent les pierres avec de l’acide sulfurique et de l’eau tirée des nappes phréatiques ; les Chinois organisent les activités ; les Français prennent les décisions et récoltent les fruits du travail.
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Ma sœur est une belle fille et, quand elle se fait draguer par un garçon, ça me plaît. Elle, elle reste toujours tendue : elle ne vit pas cette période d’adolescence si facilement. Quand je suis avec elle dans la rue et qu’un garçon la siffle, je suis heureux pour elle : c’est une jolie femme, c’est normal qu’elle attire les regards.
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L’école a quand même un pouvoir magique. Elle te permet de progresser et de prendre confiance en toi. Je dois beaucoup à mon professeur de mathématiques, un vieux monsieur avec des cheveux blancs et des cernes sous les yeux. Il maîtrise bien son cours et parle sans notes. J’aime cette matière : je calcule vite et adore résoudre des problèmes.
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Est-ce qu’on récompense la loyauté quelque part ? Je ne sais pas. En tout cas, pas en Afrique. Ce n’est pas compliqué : si tu tends la deuxième joue, tu reçois la deuxième claque.
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Tout le monde veut s’affirmer. Le nerf de la guerre, c’est l’argent. Quand le gâteau à partager est rabougri, tu batailles pour chaque miette. Ça commence au marché. Portant mes provisions sur la tête, je visite tous les recoins grouillants où fruits et légumes sont étalés à même le sol. À neuf ans, j’aide ma mère à vendre ses tomates le soir après l’école.
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Des livres sur le sujet des exilés j'en ai lu un certain nombre. Et j'ai également vu des films et reportages sur le sujet. Normal je suis bénévole à SOS Méditerranée. Mais ce texte apporte un éclairage différent et intéressant.
"Boza" ce cri que pousse ceux qui ont réussi à atteindre l'Europe résonne comme un Alléluia et sert donc de titre au récit d'Ulrich, alias Petit Wat, Grand Wat, Toomi ou encore freeboy... Il est cru, sans concessions. Et devrait être lu des deux côtés de la Méditerranée. Afin qu'ici on comprenne pourquoi tant de jeunes mineurs fuient, mais aussi des femmes, et parfois enceintes ou avec jeunes enfants. Et que là-bas les candidats au départ y réfléchissent à deux fois avant de se lancer dans une aventure terrifiante. Ulrich nous le rappelle constamment quand il agit d'une manière qui pourrait nous choquer : "Qui êtes-vous pour me juger?" Contrairement à beaucoup de récits celui-ci ne nous mène pas en Libye, mais au Maroc, après le Niger et le désert (premier cimetière avant la mer), puis l'Algérie Rien n'est édulcoré, ni les rivalités entre origines ou religions, ni les compatriotes qui profitent des plus faibles, ni la violence, ni l'horreur vécue par les filles improvisées prostituées . Parti jeune adolescent insouciant de Douala, Ulrich arrive à 16 ans en France avec une mentalité d'adule. Les épreuves cela vous mûrit top vite.
Un dernier mot sur l'accueil des français, racistes et condescendants ou généreux et accueillants. Comme celui qui a permis que ce récit devienne un livre. Merci donc à Etienne Longueville
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Oui, c'est lui, la vraie pute, comme toutes ces personnes qui dissimulent la réalité de leurs intentions et trompent la sincérité des autres pour leur nuire
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