Véra avait l’impression d’être bercée comme sur un bateau naviguant par une mer calme. Elle était avec l’une des personnes chères à son cœur et, sans prévenir, quelques larmes se mirent à glisser le long de ses joues teintées de blush rosé. Elle tenta de les retenir, ne voulant pas les montrer, elle détestait cela.
Pleurer devant les gens, surtout devant Cédric, se sentir faible, très peu pour elle. La formation qu’elle avait reçue par le passé au C.I.S., et dont Cédric ignorait toujours l’existence, avait porté ses fruits, même trop, hélas !
Le corps de la jeune fille était en constante augmentation de chaleur, le rythme cardiaque affolé, elle tenta de parler mais trop de jeunes adolescents les séparaient, tous curieux de voir arriver la retardataire. Elle ne voulait pas crier, ses parents s’en étaient chargés en sortant du véhicule. Une fois de plus, ils se disputaient. C’était surtout pour cela que l’enfant avait accepté de venir ici. Elle ne voulait pas entendre encore ses parents se quereller et, après tout, peut-être que son absence pourrait les aider à se rapprocher.
Cette sensation de connexion avec la vie, avec son propre corps, son environnement, affola tous les sens de la gamine. Les roses que son père avait plantées étaient ouvertes à leur maximum, laissant leurs différents parfums se mélanger agréablement même par ce temps complètement fou. Pourtant, les massifs se trouvaient bien loin d’elle. Les couleurs que Véra apercevait étaient plus vives que d’ordinaire, comme si quelqu’un lui avait enfin retiré le voile qu’elle avait devant les yeux.
En bonne guerrière qu’elle était, et qu’elle restera plus tard, elle avait répliqué par des coups de pied et de poings. Les coups étaient rapides destinés à faire le plus de dégâts possibles. Elle ne pouvait plus supporter le harcèlement que Cédric lui infligeait derrière le dos des adultes. Elle n’avait pas compris pourquoi le jeune garçon lui en voulait à ce point, très peu de temps après son arrivée, mais elle était bien décidée à ne plus se laisser faire.
Il lui raconta les folles nuits agitées pendant son séjour ; comme d’habitude, il prit soin de bien choisir le vocabulaire afin de ne pas heurter la sensibilité de sa meilleure amie, ce qui la faisait rire à chaque fois. Des deux, c’était elle la moins pudique sur le sujet du sexe, il n’entrait pas trop dans les détails contrairement à elle. Sacré Cédric, rien qu’avec toutes ses conquêtes il faisait le tour du monde, ne cessait-elle de penser.
Elle voulut se risquer à aller vers lui mais son corps ne put réagir. Et comme si le jeune homme lisait en elle, il s’avança d’une démarche assurée et terriblement sexy, lui prit la main pour la caresser. Ni une ni deux, elle lui sauta au cou pour le serrer très fort dans ses bras, il lui rendit affectueusement son accolade. Durant quelques secondes, le temps se figea, plus rien n’exista à ses yeux à part lui.
Prendre la vie de quelqu’un gratuitement au nom de la religion, de la différence… cela ne lui semblait pas acceptable. Elle ne comprendrait jamais la motivation de ces assassins. Peu importe leurs repentis, il n’y avait pas de pardon à donner à ces gens qui éliminaient d’un geste un homme, une femme, un enfant, une vie. C’était impensable pour elle.
Plus rien n’existait à part l’autre, le temps s’était suspendu. Ils s’étaient séparés en même temps, ce qui les avait fait sourire tous les deux. Faire quelque chose au même moment, impensable à l’époque pour deux teenagers qui se détestaient. Après une seconde, il lui avait demandé doucement comment elle se sentait.
Malgré une certaine réticence, Véra parlait toujours français surtout quand cela l’arrangeait. Cédric avait dû être un enseignant patient et imaginatif pour lui apprendre la langue. Une fois que Véra eut apprécié les différentes façons d’assimiler, son apprentissage fut assez rapide, tout comme son accent.
Les yeux dans les yeux, Véra ne s’était jamais sentie aussi vibrante. Elle avait eu l’impression d’être engloutie par le sol se dérobant sous ses pieds et, en même temps, de se sentir légère, comme si des milliers de papillons s’envolaient dans son corps, la faisant ainsi se surélever.