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Citation de Gwen21


Cromwell disait : Je veux qu’on respecte la république anglaise comme on a respecté la république romaine ; il n’y avait plus rien de sacré ; la parole était libre, la presse était libre ; on disait en pleine rue ce qu’on voulait ; on imprimait sans contrôle ni censure ce qu’on voulait ; l’équilibre des trônes avait été rompu ; tout l’ordre monarchique européen, dont les Stuarts faisaient partie, avait été bouleversé… Enfin, on était sorti de cet odieux régime, et l’Angleterre avait son pardon.
Charles II, indulgent, avait donné la Déclaration de Bréda. Il avait octroyé à l’Angleterre l’oubli de cette époque où le fils d’un brasseur de Huntingdon mettait le pied sur la tête de Louis XIV. L’Angleterre faisait son mea culpa, et respirait. L’épanouissement des cœurs, nous venons de le dire, était complet ; les gibets des régicides s’ajoutant à la joie universelle. Une restauration est un sourire ; mais un peu de potence ne messied pas, et il faut satisfaire la conscience publique. L’esprit d’indiscipline s’était dissipé, la loyauté se reconstituait. Être de bons sujets était désormais l’ambition unique. On était revenu des folies de là politique ; on bafouait la révolution, on raillait la république et ces temps singuliers où l’on avait toujours de grands mots à la bouche, Droit, Liberté, Progrès ; on riait de ces emphases. Le retour au bon sens était admirable ; l’Angleterre avait rêvé. Quel bonheur d’être hors de ces égarements ! Y a-t-il rien de plus insensé ? Où en serait-on si le premier venu avait des droits ? Se figure-t-on tout le monde gouvernant ? S’imagine-t-on la cit menée par les citoyens ? Les citoyens sont un attelage, et l’attelage n’est pas le cocher. Mettre aux voix, c’est jeter aux vents. Voulez-vous faire flotter les états comme les nuées ? Le désordre ne construit pas l’ordre. Si le chaos est l’architecte, l’édifice sera Babel. Et puis quelle tyrannie que cette prétendue liberté ! Je veux m’amuser, moi, et non gouverner. Voter m’ennuie ; je veux danser. Quelle providence qu’un prince qui se charge de tout ! Certes ce roi est généreux de se donner pour nous cette peine ! Et puis, il est élevé là dedans, il sait ce que c’est. C’est son affaire. La paix, la guerre, la législation, les finances, est-ce que cela regarde les peuples ? Sans doute il faut que le peuple paie, sans doute il faut que le peuple serve, mais cela doit lui suffire. Une part lui est faite dans la politique ; c’est de lui que sortent les deux forces de l’état, l’armée et le budget. Etre contribuable, et être soldat, est-ce que ce n’est pas assez ? Qu’a-t-il besoin d’autre chose ? il est le bras militaire, il est le bras financier. Rôle magnifique. On règne pour lui. Il faut bien qu’il rétribue ce service. Impôt et liste civile sont des salaires acquittés par les peuples et gagnés par les princes. Le peuple donne son sang et son argent, moyennant quoi on le mène. Vouloir se conduire lui-même, quelle idée bizarre ! un guide lui est nécessaire. Étant ignorant, le peuple est aveugle. Est-ce que l’aveugle n’a pas un chien ? Seulement, pour le peuple, c’est un lion, le roi, qui consent à être le chien. Que de bonté ! Mais pourquoi le peuple est-il ignorant ? Parce qu’il faut qu’il le soit. L’ignorance est gardienne de la vertu. Où il n’y a pas de perspectives, il n’y a pas d’ambitions ; l’ignorant est dans une nuit utile, qui, supprimant le regard, supprime les convoitises. De là l’innocence. Qui lit pense, qui pense raisonne. Ne pas raisonner, c’est le devoir ; c’est aussi le bonheur. Ces vérités sont incontestables. La société est assise dessus.
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