L'idée que l'État est la seule option possible en matière d'organisation de la vie des sociétés est si influente qu'elle a détruit la capacité d'imaginer ne serait-ce qu'une vie différente.
Il y a environ trois cents ans, par le biais d'un processus complexe, le monde a commencé à privilégier une monoculture sociopolitique qui a morcelé la planète en entités légales et juridiques dénommées État-nations, ou plus communément, pays. Selon cette tradition, seule la tutelle de l'État et de son cadre juridique est capable d'organiser la vie en commun. L'État s'obstine à contrôler la totalité des interactions sociales. Malgré cela, des structures émergent et résistent dans le monde entier, nous rappelant l'existence d'autres façons, plurielles, de nous organiser en tant que sociétés, en opposition à cette monoculture sociopolitique, et ce notamment parmi les peuples indigènes du monde. L'État est la structure sociopolitique qui s'est avérée la plus opérante pour le colonialisme et le capitalisme, mais il existe partout des démarches qui tendent vers d'autres possibilités.
J'avais besoin d'imaginer des mondes radicalement différents car même les récits qui me traversaient parvenaient à brider cette exploration. Je résistais en imaginant ne pas résister. Je résistais en voulant échapper aux récits de résistance qui s'ajustaient toujours aux systèmes d'oppression.
S'il est fondamental de combattre l'idéologie nationaliste, il l'est également de proposer quelques axes pour la gestion de la vie autonome. Compte tenu des réalités très diverses que présentent les peuples indigènes, il s'avère difficile de tracer un seul scénario envisageable pour la construction de structures d'autogestion aussi éloignées que possible des mécanismes étatiques. Malgré cela, on peut esquisser quelques idées d'orientation.
L'organisation sociale sans l’État et la manière naturelle de gérer la vie en commun.
Le tapage causé par l'inclusion individuelle dans les systèmes de validation occidentaux masque l'exclusion collective sur laquelle ils se fondent et c'est en cela qu'elle est dangereuse. S'insérer dans le système oppresseur, pour mieux résister, comporte toujours le risque que le sujet soit instrumentalisé pour légitimer ce système.