Enivrée de puissance et de fierté à la tête de son prospère empire industriel, la haute société anglaise, qui a gardé toutes ses références aristocratiques, contraste par son aisance avec la grande pauvreté des classes ouvrières dépeintes dans les romans de Charles Dickens,. Les acteurs des arts décoratifs en Angleterre prennent alors toutes la mesure es dangers que cet ère industrielle génère en ne produisant que des faux-semblants. Les créateurs s'émeuvent de cette situation, en acteurs esthètes mais aussi en tant que défenseurs d'une pensée sociale visant à trouver réponse aux problèmes de la qualité et de la place des arts décoratifs dans toutes les couches sociales. Ils répondent au marasme créatif ambiant par la construction de leurs maisons édifiées selon des valeurs qui mettent en avant le travail manuel, l'outil et la création originale. Ces mêmes critères seront à l'origine des guildes et compagnies qui vont assurer la diffusion d'objets, de tissus et de papiers peints auprès d'une clientèle croissante. Désireux d'oublier la laideur de leur siècle, les artistes puisent l'inspiration dans une multiplicité de références qui associent cuivres anciens, céramiques, tapis et meubles d'Extrême-Orient, vitraux peints : autant de signes visant à préciser les codes d'une grâce cultivée. D'une manière générale, la communauté des artistes rejette les conventions de la bienséance aristocratique.
William Morris (1834-1896) nous semble être l'artiste clé du milieu du siècle tant par ses aspirations de peintre que par son engagement auprès des préraphaélites, qu'il rejoint avec Edward Burne-Jones rencontré au collège en 1853. Toutefois, sa place primordiale de peintre occulte parfois l’œuvre du décorateur. Issu d'un milieu aisé, homme aux idéaux élevés fondés sur le socialisme, il est l'un des pères de l'Aesthetic Movement dans le domaine des arts décoratifs, et assure un lien continu avec les théoriciens du Gothic Revival de la première heure. Il fonde la Ligue socialiste en 1877, et trouve dans le socialisme le seul moyen efficace pour résoudre les problèmes issus de la révolution industrielle et des laideurs qu'elle engendre convaincu que le changement de la nature de l'homme passe par celui de son environnement.