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Citation de Cielvariable


II s'agenouilla, posa les pieds de l'enfant sur la berge de sable doux, près de l'eau.
— Tu auras une mort douce, petit . . .
Il poussait sur le corps de l'enfant, poussait les pieds vers l'eau. Maintenant, les talons allaient rejoindre la surface, allaient se baigner dans le fluide froid.
L'enfant se raidit.
— Je te dis que ce sera une mort douée, petit. Mourir comme ça serait un bonheur. Pour toi ce sera un bonheur. Avant, après. Tellement mieux que la mort sur les pentes. Le tronc d'arbre qui vient vous fracasser, l'avalanche de pierres . . . j'ai songé à cette mort . . .
Il caressa doucement la tête du petit dont les pieds étaient dans l'eau.
Un hibou fit son chant, et Fabien entendit, tout en bas, et loin, comme des bruits de voix.
C'étaient les gens du hameau qui venaient . . .
— Tu es blond, dit Fabien, tu as les cheveux blonds. Je n'avais jamais vu comment ils étaient blonds, Et ta bouche est large. Belle et large. Une bouche à boire de la vie. Une bouche vaillante . . . Tu aurais pu goûter aux bons mets des soirs de fête.
Il eut un sanglot et ramenant l'enfant, il le serra fort contre lui.
— Si seulement, gémit-il, tu n'avais pas été ce que tu es ...
Mais il se reprit et poussa l'enfant plus avant dans l'eau, jusqu'aux genoux.
— Le moment est venu, petit. Il l'ail presque nuit. Tu rejoindras la nuit bleue par notre nuit à nous, qui sera noire ce soir. A savoir si tu sauras reconnaître l'une de l'autre. Je te le souhaite. Ne frémis pas ainsi, l'enfant. Ne résiste pas. L'eau est froide, je le sais, mais il ne faut pas résister.
L'enfant avait peur de l'eau, et il essayait de son corps sans force de se débattre, de ne plus laisser cette eau monter, cette eau qui montait et grimpait, qui rejoignait les genoux et ensuite les cuisses, qui le mouillait jusqu'au ventre, à mesure que Fabien le descendait, le poussait vers le fond, vers la mort.
Et l'homme murmurait toujours ses paroles, en rythme doux, comme une berceuse, comme si l'enfant l'entendait, le comprenait.
Il avait des sanglots dans la voix, et deux grosses larmes lui coulaient sur les joues.
— Ton cou rosé et potelé, martelait-il entre ses dents tout à coup. Ton cou rosé et potelé, et toute ta peau fine el duveteuse. Il y a une fossette dans ton cou. Je ne l'avais jamais vue . . . Tout le corps, et puis voilà, maintenant, la tête. C'est mon adieu, petit, c'est mon adieu.
Alors, la voix lui brisa, el il se mil à chantonner, avec des sons qui n'étaient plus du chant, mais des pleurs . . .
— Fais dodo, l'enfant do! Fais dodo, l'enfant dormira bientôt . . .
La bouche du petit était sous l'eau, el il se déballait, il jetait ses bras vers le ciel, et il secouait ses jambes.
Il combattait la mort qui entrait en lui par celle bouche grande ouverte, buvant l'eau de la source.
Et tout à coup Fabien poussa un grand cri, el il se redressa, tenant toujours l'enfant, et il hurla, mot après cri, à faire reculer la montagne:
— Non!
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