AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de TerrainsVagues


On murmure derrière moi que je ne suis qu'une ombre grise
c'est vrai
mais je m'en accomode
j'ai renoncé au monde des vivants
je n'appartiens pas encore à celui des morts
je suis du monde des ombres
mes visiteurs du soir
mon peuple depuis si longtemps
c'était après la longue guerre
je suis passé à l'ombre
déjà vous les Hommes-poissons et toi
mon premier mort
à la renverse
et vous autres tous ceux qui avez suivi
dans cette guerre abominable
déjà vous étiez mon peuple caché
même si à l'époque il m'arrivait parfois encore
de dormir
de vous échapper
quelques heures
c'est déjà ça de pris
quelques heures de liberté
d'oubli
loin de vous de vos yeux vides de vos visages de cendre
loin de mes souvenirs
il y a bien longtemps que j'ai renoncé à l'oubli
vous êtes devenus mon peuple et chaque jour
dans la pièce du sous-sol

ou

dans d'autres lieux

au fond peu importe le lieu
je grossis vos rangs
je vous croîs et vous multiplie
vous le peuple des caves
vous mon armée d'ombres qui me dévore chaque nuit

c'est un peu comme
une forme de torture très lente
et très raffinée
le tortionnaire torturé
de sa propre main
le persécuteur persécuté
chaque jour dans la pièce du sous-sol
je regarde l'homme dans le cercle de lumière
dans cette lumière trop crue qui me brûle les yeux
à moi qui n'ai plus droit à
la lumière
je regarde cet homme
cette nouvelle recrue
cet homme qui va devenir mon ombre
qui va alourdir mon ombre sur mes pas
c'est fou ce que c'est lourd une ombre
on ne le croirait pas
avez vous déjà remarqué
quand le soleil tombe à l'horizon
cette ombre longue et lourde le long des murs
accrochée à vos pas
ce qu'elle est lourde à traîner
et quand vous vous retournez
vous ne la reconnaissez pas
c'est qu'elle vous montre la part que vous ne voulez pas voir

la part d'ombre

mais moi je la regarde je la cherche
je la connais
et chaque jour inlassablement je l'accrois
je la nourris
si bien que
désormais
quand je longe les murs
on dirait que l'ombre a englouti la ville
Commenter  J’apprécie          240





Ont apprécié cette citation (23)voir plus




{* *}