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Critiques de Éric Liberge (210)
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Camille Claudel

Si l’art, et particulièrement la sculpture, vous intéresse, cet album est pour vous. Un album de caractère, sur une artiste qui n’en avait pas moins.L’atout principal de cet album est de faire connaître cette artiste à l’œuvre singulière et variée, méconnue pour de mauvaises raisons.
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Camille Claudel

"Comment n'exister que pour son art dans un monde d'hommes, quand on était une femme au caractère difficile et au talent si effrayant?" C'est l'enjeu que se sont donné Eric Liberge et Vincent Gravé dans cette BD sur la vie de Camille Claudel, dont le génie a dû se débattre, aux prises avec un autre génie et non des moindres : Rodin. Son défaut aura-t-il été d'égaler le maître ?

Le scénario est intéressant, puisque qu'il propose de partir d'une interview du frère de Camille, Paul Claudel, qui retrace les débuts prometteurs d'une soeur au caractère tranché, puis sa liaison houleuse avec Rodin, pour finir par évoquer comment Camille a peu à peu sombré dans la paranoïa, internée et oubliée.

Les dessins sont plutôt sombres, inspirent une certaine violence par le jeu des traits. Certaines vignettes particulièrement réussies occupent une demie page, expriment les angoisses de Camille, telle cette vague qui s'apprête à ensevelir Camille, seule et toute petite, référence implicite à la vague d'Hokusaï.

Il y a de la recherche donc, mais l'ensemble n'emporte pas une adhésion enthousiaste, sans doute parce que la part obscure du personnage occupe un peu trop de place.
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Camille Claudel

Biographie-roman graphique, hommage au relief couché sur le papier, Camille Claudel est une bande dessinée concentrant ce qu'il faut savoir sur celle qu'Isabelle Adjani a incarné à l'écran.
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Camille Claudel

On connaît l’histoire de cette artiste, éprise de son art et de Rodin… On connaît sa fin, bien malheureuse, dans un asile, et toutes les polémiques à ce sujet. Cet album retrace, à travers le récit de son frère, l’écrivain Paul Claudel, cette vie passionnée et dissolue qui la fera se tenir à l’écart de tous.

Je tire mon chapeau à Eric Liberge et Vincent Gravé pour avoir rendu un si bel hommage à cette femme haute en couleur, au mérite incomparable. On plonge dans la fin du XIXe siècle, on suit les tourments des guerres et, avec elles, ceux de Camille. J’ai aimé les dessins. Quant au scénario, il est riche et bien documenté.
Lien : https://promenadesculturelle..
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Camille Claudel

Clairement, je ne connaissais Camille Claudel que de nom et encore (je l'aurais volontiers appelée Isabelle Adjani), avais eu vent de sa relation avec Auguste Rodin (en lisant Gala ou Entrevue certainement), en dehors de ça, rien, pas même l'idée d'une de ces oeuvres, peut-être le souvenir d'une rue portant son nom (parallèle à Aristide Maillot, près de la place Degas en passant par Bourdelle, mais c'est tout). Quelle réception donc, un néophyte peut faire de cette bande dessinée ?



Contre toute attente, un triple plaisir :

1. celui de retrouver la science précieuse d'Eric Liberge (cette fois au scénario) dont je suis les travaux avec boulimie,

2. la trouvaille des dessins chargés, colorés, résolument instables mais toujours lisibles de Vincent Gravé qui m'ont de suite enchantés,

3. et la découverte du sujet - Camille Claudel - de son tempérament bouillonnant face au machisme de l'époque, d'un pan de culture ignoré et rendu vigoureux par la paire d'auteurs aux manettes.



Adepte des biographies en BD mais souvent déçu par leur didactique maniérée ou lourdingue, celle-ci m'a littéralement emporté, captivé et révélé un personnage précurseur dans la lutte pour l'égalité des femmes. On ne se colle pas seulement à la mémoire de Camille, mais aussi au portrait sans concession de son frère Paul Claudel et de Rodin. Beaucoup de trouvailles dans la mise en page, au service de l'histoire, mêlant correspondance et articles de journaux sans jamais étouffer le lecteur, avec énergie, vitalité. La mise en abîme via le témoignage de Paul est finement trouvée et permet des respirations et un autre éclairage. C'est tout bonnement brillant et copieux, une belle collation pour un destin tragique, qui remue notre glaise.
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Camille Claudel

C'est à l'occasion du passage d'une exposition des œuvres de Camille Claudel dans ma région (Nord) que je me suis penchée sur cette biographie en image.

C'est avec délectation que j'ai suivi l'incroyable et décadente vie de Camille Claudel.

On ne peut qu'éprouver un infini respect pour cette artiste qui aura combattu toute sa vie pour, être reconnue et vivre de son art. Combat d'autant plus méritant quand il est mené par une femme qui doit chaque jour s'imposer et faire ses preuves dans une société où l'homme règne en maître.

Du génie à la folie : destin prodigieux et tragique qui façonne l'immortalité de grands artistes.



Je salue le travail remarquable de Vincent gravé et Eric Liberge qui livrent à travers cette biographie un bel hommage à l'artiste que fût Camille Claudel.
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Camille Claudel

Le halo glauque d’Eric Liberge (scénariste, mais aussi coloriste de l’album) et le trait foisonnant, parfois étouffant, de Vincent Gravé illustrent à merveille les démons de Camille et l’âpreté de son monde. Quelques trouées de lumière – la très belle vague d’Hokusai comme une métaphore de la vie de la sculptrice – permettent parfois de remonter à la surface.
Lien : http://www.bodoi.info/critiq..
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Camille Claudel

Résumer une vie si intense en un seul album de BD est une gageure que l’auteur relève ici en y ajoutant une histoire cadre, celle de Paul Claudel qui raconte la vie de sa sœur.

Des journalistes s’immiscent dans la maison de celui-ci pour lui demander de raconter la vie de celle qui sera oubliée pendant bien des années.

Paul Claudel traverse alors le temps pour se replonger dans ce qu’il a vécu autrefois.



Ce procédé est une bonne idée qui évite aux auteurs de prêter des pensées ou des actes à Camille Claudel sans que l’on sache si cela a été ou non.

Mais cela n’exclut pas que l’on prête des sentiments à Paul Claudel, et cette apparente volonté de le montrer repentant, malheureux, regrettant son geste, m’a vraiment dérangée.

Il me semble avoir lu et entendu, au contraire, qu’il interdisait à sa mère de faire quoi que ce soit pour sa sœur par peur du scandale, cette peur qui l’a conduit à mettre Camille à l’asile.

Les convenances ont guidées la vie des Claudel, sacrifiant la vie de cette jeune femme qui avait juste besoin d’aide.

Certes, ce n’est pas Paul qui a ordonné l’internement, c’est son père.

Une fois celui-ci décédé, il aurait pu la sortir de là et ne l’a jamais fait.

Un Paul Claudel ravagé par le regret m’a donc paru un peu outré.



Le parti-pris du dessin est aussi particulier (mais cela ne m’a pas dérangé cette fois).

Les dessins sont abrupts, parfois mêlés, sombres et colorés.

Il y a sans doute des symboles qui m’ont échappés, pourtant ils m’ont fait pensé aux sculptures de Camille.

Je ne sais pas s’il y a une volonté de s’en approcher, mais cela se marrie bien avec l’histoire.



C’est donc une bande dessinée un peu spécial, pas du tout classique, qui se découvre en oubliant ce que l’on peut savoir de l’histoire de Camille Claudel
Lien : http://lirerelire.blogspot.f..
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Camille Claudel

J'ai tout simplement détesté cette BD.

Les dessins sont moches, l'histoire est truffé de fautes.

Et oui, quand on s'attaque aux grands de ce monde, on se documente un tant soit peu.

J'ai été bien déçue car Camille est une de mes passions, et je comptais me régaler de cette BD.

Mais pour moi, c'est médiocre.

Je l'aurai feuilleté avant, je ne l'aurai pas acheté...
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Camille Claudel

"Que tremblent les familles chez qui se déclare cet affreux malheur qu'est la vocation artistique...et surtout dans la sculpture"



Affirmation choc attribué à Paul Claudel concernant sa soeur Camille, dans la Bande Dessinée d'Eric Liberge et Vincent Gravé.



En utilisant la voix et les souvenirs du dramaturge et poète, cette biographie retrace la vie créatrice et tourmentée de l'artiste, élève de Gustave Rodin avec qui elle vivra une passion tumultueuse. Les rapports difficiles avec la famille Claudel sont aussi au coeur du récit, la rivalité artistique avec un frère à la fois attentif et exaspéré par un tempérament immaîtrisable jusqu'à la folie et l'internement.



Eric Liberge en fait donc un récit vivant et énergique, à défaut d'être nouveau. Il replace aussi l'artiste dans son époque, dans le Paris de l'exposition universelle de 1889, des salons artistiques dominés par la gente masculine, de la mentalité du tournant du 20ème siècle encore si peu favorable à l'émancipation des femmes.

J'ai été moins conquise par les planches de dessin de Vincent Gravé, proches de la caricature. Elles sont en revanche très travaillées, fourmillent de détails, vibrent de couleurs. Elles s'adaptent en cela parfaitement au propos.
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Camille Claudel

Je ne suis plus une lectrice friande de BD comme j'ai pu l'être autrefois. Mais il ne me déplaît pas de parcourir parfois les cases colorées d'un album si le sujet me tente. Lors d'une visite en médiathèque, mon regard s'est arrêté sur la couverture rouge-mordorée, reconnaissant immédiatement le portrait de Camille Claudel. Admirative de cette artiste depuis aussi longtemps qu'il m'en souvienne, je ne pouvais laisser ce livre derrière moi! J'ai beaucoup lu sur cette sculptrice et connais assez bien sa vie mouvementée et son oeuvre extraordinaire de vie et de finesse. Pouvoir à nouveau replonger dans son univers à l'aide de dessins m'a totalement séduite.



Le scénario de l'album est basé sur l'entretien qu'aurait accordé Paul Claudel à un journaliste pour évoquer la vie de sa sœur. Belle idée mais qui ne m'a pas emballée plus que ça. J'ai un regard très critique vis à vis de cet écrivain pour son comportement envers Camille. Elle l'a aidé avec ses maigres moyens depuis le tout début de sa carrière. Il lui a rendu visite 3 ou 4 fois en ... 30 ans d'internement! Il est vrai que la maladie mentale fait peur; encore plus au début du siècle dernier où la neurologie en était à ses balbutiements. Les convenances et l'angoisse du "quand dira-t-on" dictaient la vie des Claudel; alors une fille et une sœur fantasque, quelle malédiction! Il est vrai que la carrière de diplomate de Paul l'a tenu à des lieues de sa terre natale pendant de nombreuses années et ses retours en France étaient relativement courts mais ceci n'explique pas tout. Humblement je reconnais qu'il est très facile de juger une situation que l'on ne vit pas soi-même mais dont on n'a qu'un regard extérieur. C'est donc sur la réserve que j'ai commencé cette bande dessinée.



Rapidement, j'ai retrouvé l'enthousiasme de la jeune Camille, sa frénésie créatrice et sa passion pour la vie et son art. La tragique histoire de sa vie est relatée avec beaucoup de soin; ses débuts insouciants, sa passion amoureuse avec Auguste Rodin qui a fini par la consumer jusqu'à la folie. Les dessins apportent du poids au récit avec couleurs ou noirceur selon le moment vécu par la jeune artiste. Tout comme le trait, net et clair ou embrouillé et confus, se calquant à merveille avec l'état d'esprit de la sculptrice et l'évolution de sa maladie. Quelle idée ingénieuse de glisser un ruban rouge dans ses cheveux facilement repérable qui la suit de sa jeunesse jusqu'à la fin de sa vie.



En résumé, j'ai adhéré totalement à la façon de traiter ce sujet difficile tant sur le fond que sur la forme. Les auteurs ont su éviter les pièges de la représentation des oeuvres de Camille. Ils ont choisi de mettre l'accent sur l'énergie de l'artiste; celle qu'elle utilisait pour façonner la glaise; celle qu'elle déployait pour obtenir la reconnaissance de ses pairs, à une époque où il était impensable qu'une femme puisse être considérée l'égale des hommes dans quelque domaine que ce soit.



Toutefois, j'ai quelques réserves quant au choix des auteurs de présenter un Paul Claudel repentant. Heureusement, le vrai sujet est ailleurs. de la collaboration d'Éric Liberge avec Vincent Gravé est né un travail remarquable, à la portée de tout lecteur ne connaissant pas le destin tragique de cette immense artiste qu'est Camille Claudel et qui voudrait découvrir sa vie tumultueuse sans plonger dans un pavé de plusieurs centaines de pages.
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Camille Claudel

Voilà une BD que je souhaitais lire depuis un petit moment...



Hélas quelle déception ! ...Quand on pense à la beauté de Camille Claudel, à l'esthétisme exceptionnel de ses oeuvres ! Cette superbe femme artiste, libre, un génie de la sculpture !.. je feuillette cet album constitué de personnages aux traits brouillons et grossiers, qui rendent les personnages grotesques..de textes "style manuscrits" illisibles ...quel hommage affligeant !



Le parti pris des auteurs est de camper un journaliste qui interroge Paul Claudel sur sa soeur...soit...quand on connait les rapports familiaux de cette famille, l'admiration de Paul Claudel qu'il lui portait pour son talent certes mais cette jalousie plus tard qu'il l'animait tellement! Camille avait une passion pour son frère "son petit Paul"...Cette relation fusionnelle " frère et soeur" et leurs influences sur leur travail réciproque a fait couler beaucoup d'encre...



On peut s'interroger toute fois sur le détachement qu'il affiche envers elle, sur la situation tragique de Camille lors de son internement le 10 mars 1913 signée par leur mère.

(Il ne viendra la voir que douze fois en trente ans d'enfermement...)... Au regard de sa situation d'écrivain et de diplomate, il ne viendra que rarement en France. ainsi sa soeur "fait tache".. les amours illicites de Camille, sa vie de bohème,.. et il était bien plus simple de la laisser dans l'ombre...et le sort des femmes d'autant plus artiste de surcroît, à cette époque importait peu.



Voilà comme vous le remarquerez ce destin incroyable de cette femme sublime artiste bâillonnée me passionne ..alors passez votre chemin pour cet album !



Au lendemain de la mort de Camille, dans une lettre à son beau-frère, Paul Claudel écrira : "Camille a terminé sa longue vie de déceptions et de souffrances. le poids du génie est lourd à porter pour une femme !... Ma consolation est que ces trente ans de souffrance lui ont certainement valu l'accès d'un séjour meilleur. L'aumônier m'a dit qu'elle communiait souvent dans des sentiments de grande piété."

Une "longue vie de déceptions et de souffrances".

La phrase est exacte.



Sur mon profil, Je vous invite à consulter la liste d'ouvrages que j'ai créer concernant cette chère Camille Claudel.





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L'art du crime, tome 4 : Electra

Electra est une sculptrice corinthienne qui va un jour connaitre l'horreur lorsque les légions romaines vont piller sa ville. Son jeune apprenti va se faire assassiner sous ces yeux par un soldat alors qu'il tentait de sauver une de ses premières oeuvres. Electra n'aura alors de repos que lorsque vengeance sera assouvie!



Les sorties s'enchainent assez rapidement pour cette nouvelle série de chez Glénat. Neuf arts, neuf crimes. Pour ce tome : le deuxième art, la sculpture.

Nous sommes donc pendant la Rome antique, en 146 avant JC. Corinthe s'est faite pillée et Rome doit désormais apaiser son peuple plutôt que de soumettre les provinces voisines.

Un scénario qui va tourner autour du désir de vengeance de la jeune sculptrice et de l'intrigue politique du sénat romain. Marcus Flavius est désigné pour être le commandant de la nouvelle garnison sensé ramener l'ordre dans la ville éternelle, alors que le consul Octavius aimerait placer son fils Néréus. Un homme violent et cruel qui n'est autre que le tueur de Zacharias, l'apprenti de la sculptrice corinthienne.

Le scénario est plutôt sympathique et bien ficelé. Les héros sont vite attachants. On pourrait surement reprocher des personnages un peu trop tout blanc ou tout noir mais bon...



Le dessin est expressifs mais j'avoue avec eu parfois du mal à accrocher à ce type de trait principalement à cause du rendu charbonneux des ombres et des décors. Les arrières plans ne sont pas toujours aussi soignés qu'ils le devraient.
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La guerre des paysans

La guerre des paysans se déroule en 1525 au premiers de la réforme. Le moine Martin Luther publie publie ses "95 thèses" contre les indulgences dont l’Église catholique fait commerce pour financer la construction de la basilique Saint-Pierre de Rome. C’est une véritable déclaration de guerre contre le pape Léon X.



Les paysans de l'Allemagne méridionale se reconnaissent dans ses thèses et se soulèvent. Martin Luther les désavoue et rejoint l'ordre établi par les princes. Un autre moine, Thomas Mûntzer les rejoint et prend leur tête.



C'est le récit d'une guerre contre les inégalités, contre les injustices dont le mot d'ordre est "Tout est à tous".



Ce récit historique m'a permis de découvrir des faits et des personnages que j'ignorais. Elle montre surtout Martin Luther sous un autre jour et met en lumière les convictions et le sacrifice de Thomas Müntzer.



Les textes de Gérard Mordillat sont admirablement servis par le graphisme de Eric Liberge.



Cette BD est un excellent vecteur pour mieux appréhender l'Histoire et les premiers temps de la Réforme.







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La guerre des paysans

Omnia sunt communia.

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Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre, relatant un épisode historique se déroulant en 1525. Il a été réalisé par Gérard Mordillat pour le scénario, et par Éric Liberge pour les dessins en noir & blanc, avec des nuances de gris, avec une tache de couleur en page 105 et une en page 110, la dernière page du récit. Le tome se termine avec une postface de trois pages, rédigée par Mordillat, à l’attention de Liberge, présentant la nature du récit, ainsi que par une page de chronologie de la guerre des paysans, de 1490 avec la naissance de Thomas Müntzer, à juillet 1525 avec la parution de Missive sur le dur opuscule contre les paysans, de Martin Luther.



Rome, chantier de la basilique Saint Pierre, 1514. Il s’appelle Luca Ponti, mais il est un Médicis comme le saint père Léon X. Sa mère – dont la beauté excite encore la jalousie de toutes les romaines – travaillait comme chambrière au service des Médicis. Il est le fils de Jules de Médicis. Le prince ne pouvait pas le reconnaître, mais il s’est chargé de lui faire donner une éducation chez les dominicains à Santa Sabina où il a appris le latin et le grec, le français et l’allemand. Il a été présenté à maître Raphaël par Margherita Luti, la fille d’un boulanger, sa maîtresse qui est une amie d’enfance de sa mère, et sa voisine dans le Trastevere. Dieu lui a donné un don et il peut presque recopier la nature à s’y tromper, y compris les visages. À quinze ans, il est entré en apprentissage dans son atelier pour y apprendre l’art de peindre. Il y travaille avec maître Raphaël depuis qu’il est le seul architecte à Saint Pierre. Aujourd’hui, avec Enrico Labate et Bernardo Tofoletti, maîtres charpentier et carrier du chantier, ils accompagnent le saint-père pour visiter les travaux de la basilique Saint Pierre que son maître doit reprendre après la mort de Bramante, l’architecte.



Luca Ponti observe les ouvriers au travail sur la fresque, et il écoute Raphaël rendre compte de l’avancement du chantier, au pape. Celui-ci lui demande de finir le chantier avant que le Seigneur ne le rappelle à lui. Raphaël l’informe qu’avant de reprendre la construction, il doit corriger ce qui a été mal fait, ce qui se fissure, ce que Bramante a laissé inachevé. Leur conversation est interrompue par une sœur venue informer le pape que Albert de Bandebourg et le banquier Fugger l’attendent pour l’audience qu’ils ont demandée. Le premier demande l’archevêché de de Mayence, le second se déclare prêt à consentir la somme nécessaire au premier pour acquérir ledit archevêché, car il sait que les indulgences garantiront un remboursement facile. L’accord est conclu. Plus tard, le pape confie une mission à Luca Ponti : suivre Tettzel qui va lever l’indulgence pour faire des rapports sur ce qu’il fait, sur l’argent qu’il ramasse, sur tout. Luca Ponti devient l’envoyé du pape. Il part pour l’Allemagne, malgré les cris et les pleurs de sa mère. Il lui faut près de deux mois pour arriver à Wittenberg, allant de monastère en monastère.



Dans la postface, le scénariste évoque la genèse de ce récit : des lectures, le rêve inaccompli d’un film avec Roberto Rossellini et enfin cette œuvre graphique. C’est la troisième collaboration entre les deux créateurs, après la trilogie de Le Suaire : Lirey, 1357 et Notre part des ténèbres (BD). Ils ont appris à travailler ensemble et il ne reste rien de la forme cinématographique : il s’agit bien d’une bande dessinée utilisant les spécificités de cette forme d’expression. Le titre annonce clairement l’enjeu : une reconstitution historique d’une révolution paysanne en 1525. Le récit commence à Rome et passe rapidement en Allemagne, où Martin Luther (1483-1546) joue un rôle de premier plan. En effet, le récit met en scène l’affichage de ses quatre-vingt-quinze thèses le 31 octobre 1517, le temps d’une page, puis la manière dont elles sont reprises par d’autres prêtres allemands, ainsi que les actions de l’Église, ou plutôt du pape et de ses envoyés, pour faire rentrer Luther dans le rang et protéger leurs intérêts financiers. S’il a déjà lu Le suaire, le lecteur connaît déjà clairement la position du scénariste sur l’Église catholique et sa hiérarchie : une véritable haine. Il n’est donc pas surpris par la condamnation des indulgences, ni par l’angle d’attaque sur l’hypocrisie d’une institution dont les responsables se gavent, alors que leurs fidèles se privent pour payer les divers impôts. Il peut même trouver que Mordillat fait presque preuve de retenue.



Les deux auteurs font preuve d’une implication totale pour réaliser une reconstitution historique tangible et plausible. Pour commencer, le scénariste situe les principales figures religieuses : Martin Luther, Thomas Müntzer (1489-1525), Jean Huss, (1372-1415), le pape Léon X (1475-1521), Andreas Rudolf Bodenstein (1486-1541), Philipp Melanchton (1497-1560). Les personnages développent l’avancement du chantier de la basilique Saint Pierre à Rome et son financement, les conditions de vie des paysans, la violence des révoltes, les enjeux d’une traduction de la Bible en langue commune, dire la messe en allemand, l’excommunication de Martin Luther, son mariage, les conditions de travail dans une mine, le nombre de soldats (40.000) face aux paysans (8.000), etc. Le lecteur constate l’habileté élégante avec laquelle le scénariste sait distiller un grand nombre d’informations historiques et religieuses dans les dialogues, et quelques cartouches d’exposition. Il apprécie qu’il sache expliquer les enjeux théologiques dans un langage accessible, sans en sacrifier l’importance, et évitant toute formulation moqueuse, sarcastique ou agressive. Le récit du déroulement des faits historiques parle de lui-même et le scénariste n’a pas besoin d’en rajouter.



Ensuite, l’artiste épate le lecteur du début à la fin par sa capacité à insuffler de la vie dans chaque séquence, même les passages de prêche ou de discussions statiques, avec un soin remarquable dans le détail. L’album s’ouvre avec un dessin en pleine page : une vue de Rome, avec le chantier de la basilique en arrière-plan, et il ne maque aucune maison, aucune façade, aucune toiture. Par la suite, plusieurs scènes se déroulent dans des églises, ou des abbayes, des monastères, dont l’architecture est à chaque fois représentée de manière à bien montrer le style correspondant, qu’il s’agisse des façades de ces monuments, ou des arches, des ogives, des piliers à l’intérieur, attestant du goût de Liberge pour ces monuments. Les cases avec des décors de village, de milieux plus modestes ou pauvres, ou des étendues naturelles offrent à chaque fois une tangibilité assurant une visite de grande qualité au lecteur, une remarquable immersion, passant par une étable, les Enfers, le pied de remparts, l’arrière d’un chariot, une grange avec du foin, le champ de bataille, une presse à imprimer, un bûcher. Le soin apporté aux personnages relève du même niveau : les tenues vestimentaires (robe de bure, habits religieux, vêtements simples de paysans, riches atours des nobles et des hommes d’église de rang élevé), les coiffures (naturelles, ou tonsures), les accessoires que ce soient des outils agricoles, des accessoires du culte, la vaisselle des banquets, etc. À chaque séquence, le dessinateur conçoit un plan de prises de vue spécifique, que ce soit une succession rapide de cases pour un échange énervé ou une joute verbale, ou des plans larges pour rendre compte du nombre de personnes et l’ampleur d’un mouvement.



La coordination entre scénariste et dessinateur apparaît très rapidement : page 9 une demi-page sous forme d’un dessin simple accompagnant un texte sur un parchemin, pages 12 & 13 des dessins de la largeur de la page pour évoquer les tourments en enfer, pages 16, 21 et 24 des dessins sans nuance de gris avec le personnage au centre et des évocations de sa vie autour, pour présenter respectivement la vie de Martin Luther, celle de Thomas Müntzer, Jean de Médicis. Puis les pages 36, 37 et 38 forment une séquence dépourvue de tout texte, de tout mot, attestant de la confiance totale que le scénariste accorde au dessinateur pour raconter l’histoire, et il y en aura d’autres par la suite. Les deux auteurs ont à cœur de présenter une reconstitution dépourvue d’exagérations romantiques, que ce soit côté clergé et noblesse, ou côté paysans et prêtres réformateurs. Le peuple souffre sous le joug des puissants, et lorsqu’ils se révoltent, ils tuent et massacrent. Gérard Mordillat ne fait d’aucun personnage, un héros au cœur pur. Il met en scène une guerre, dans tout ce qu’elle a de brutal, avec ses déchainements de violence meurtrière, ses tueries sur le champ de bataille, et ses mises à mort de boucs émissaires par la foule vengeresse, des boucheries inhumaines.



En fonction de sa familiarité avec cette époque en Allemagne, le lecteur découvre plus ou moins de choses. S’il est familier de l’œuvre récente du scénariste, il constate à nouveau qu’il fait preuve de retenue dans sa présentation des faits. Par exemple, il ne matraque pas l’antisémitisme dont fera montre Martin Luther à la fin de sa vie. Il s’attache à l’évolution des positions et des actes de Thomas Müntzer, par le biais de la vision que Luca Ponti en a. Il parvient avec une élégance remarquable à montrer comment la dénonciation des indulgences induit une remise en cause de l’ordre social établi, comment Martin Luther envisage cette rébellion contre la papauté et son clergé, et comment Thomas Müntzer développe une attitude plus cohérente avec la logique interne des quatre-vingt-quinze thèses. Le scénariste se montre honnête dans sa façon de présenter les faits, ne se limitant pas à une dénonciation pleine de fiel, montrant ce qui aurait pu être, sans rien occulter des réalités mortelles d’une révolution, sans angélisme quant aux conséquences pour les paysans qui ont suivi Thomas Müntzer dans cette guerre.



S’il a lu Le suaire des mêmes auteurs, le lecteur peut craindre que la présentation des faits ne tourne à la diatribe par moments. Dès les premières pages, il se retrouve subjugué par la qualité de la narration visuelle, sa générosité et sa consistance, appréciant son naturel grâce à une vraie collaboration entre scénariste et dessinateur. Au fil des pages, il constate que le scénariste a conçu une structure qui fait la part belle aux personnages et à leurs émotions, leur engagement, à la présentation organique des informations nécessaires à la compréhension et à l’établissement des enjeux, pour un tableau saisissant et nuancé des paramètres politiques et religieux de la société de l’époque en Allemagne. À plusieurs reprises, le lecteur est frappé par le parallèle qui s’établit de lui-même entre cette situation et l’époque contemporaine. Page 82, un paysan résume la situation : tout augmente, les dîmes, les redevances, les impôts pèsent de façon insupportable sur nous tous. Le lecteur se prend à rêver d’une bande dessinée de même qualité sur le mouvement de Niveleurs (Levellers) pendant la guerre civile anglaise (1642-1651) demandant des réformes constitutionnelles et une égalité des droits devant la loi.
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La guerre des paysans

En 1525, en Allemagne, le moine Martin Luther s'insurge contre la vente des indulgences par l'Église pour financer la construction de la Basilique Saint-Pierre de Rome. le prêtre Thomas Müntzer le suit et appelle au soulèvement contre les seigneurs qui exploitent les paysans. Alors que châteaux et monastères sont pillés et incendiés, le premier se range du côté des princes tandis que le second prend la tête de la révolte et lance le mot d'ordre : Omnia sunt communia.

Luca Ponti, fils illégitime de Jules Médicis et apprenti dans l'atelier de maître Raphaël, est envoyé par le Pape Léon X pour être ses yeux et ses oreilles, observer les transactions et les événements, lui adresser des rapports, et après deux mois de voyage il arrive à Wittenberg, sur les bords de l'Elbe. Son savoir, pour les Écritures notamment, et son talent de dessinateur attirent l'attention, lui permettent de gagner la confiance des différents protagonistes et de les accompagner.

Ce parti pris incarné permet de donner chair à ce récit historique. le scénario de Gérard Mordillat qui a longtemps porté cette histoire pour un projet de long métrage avec Roberto Rosselini, est superbement mis en images par Éric Liberge : son trait, fort classique, convient parfaitement à cette fresque historique. Il a su donner vie à ces foules populaires, des visages à ces multiples anonymes, s'inspirant en toute discrétion des scènes de liesses peintes par Brueghel comme des danses macabres.

Les ambiguïtés de cette Réforme qui pactise avec le pouvoir sans jamais menacer l'ordre établi, sont finalement intemporelles : dès que le peuple veut se mêler de ses affaires et de son avenir, exige plus d'équité, il sera toujours et aussitôt violemment réprimé.



Article à retrouver sur le blog :
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La guerre des paysans

Avec Gérard Mordillat, dont on connaît les nombreux engagements pour une société plus juste et délivrée du capitalisme, au scénario, et le talentueux Éric Libergé au dessin, une somptueuse BD en noir et blanc, retraçant les différents épisodes de la Guerre des Paysans au XVIe siècle, jusqu’à la mort de Thomas Münzer en 1525… Sous le regard de Luca Ponti, un jeune peintre envoyé par le Pape en Allemagne pour espionner à son profit, nous voyons Martin Luther se révolter contre la pratique des indulgences et tous les dysfonctionnements de l’Eglise. Pourtant, bien vite, le schisme religieux qu’il inaugure semble bien une réponse insuffisante aux maux de l’époque, une opposition trop respectueuse des privilèges des puissants, aux yeux de ceux qui voient la misère du peuple et voudraient renverser l’ordre des choses. « Il faut surtout que tu comprennes que le monde a faim et ne se soucie pas de théologie. La pierre s’est détachée de la montagne et est devenue grande… Il n’est que temps de se lever contre ceux qui, poussés par la cupidité, affament le peuple et méprisent le salut des mourants », répond Thomas Müntzer, bientôt le chef de la rébellion paysanne, à Luca Ponti lorsqu’ils se rencontrent. Et c’est le début d’une jacquerie tragique, dans laquelle les adversaires du débat religieux se ligueront pour mieux contrer la force des troupes populaires, jusqu’aux terribles massacres… Dans une excellente synthèse, proposée après le récit en BD, Gérard Mordillat analyse le déroulement des événements et montre leurs enjeux, leur puissance symbolique dans le débat des penseurs communistes, de Friedrich Engels aux leaders des manifestations d’aujourd’hui reprenant pour slogan les derniers mots de Thomas Müntzer, « omnia sunt communia », « toutes choses sont communes ». Un livre qui devrait plaire à tous ceux qui s’intéressent aux « choses communes », pour qui le combat pour l’avènement d’une société plus juste continue plus que jamais…
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La guerre des paysans

Le bien commun ❤️



Après Le Suaire, somptueuse trilogie qui se proposait de retracer réelle et mystique du Suaire de Turin, la plume de Gérard Mordillat s’associe une fois encore aux crayons et aux pinceaux d’Eric Liberge pour signer un récit historique fascinant et captivant qui va nous entraîner d’une Allemagne en proie aux révoltes paysannes.



Envoyé par le Pape Léon X espionner les réformateurs allemands, le jeune Luca, élève de Raphaël, va se confronter à deux grands penseurs de la Réforme Protestante : Martin Luther, frère augustin inspirateur de la Réforme et Thomas Müntzer, prêtre défenseur d’une Réforme radicale qui mettrait à bas les privilèges iniques du clergé et de la noblesse pour libérer les pauvres du joug qui les oppressent et leur permettre de comprendre le message des Evangiles.



Le scénario précis et solidement documenté de Gérard Mordillat est remarquablement mis en image par le formidable travail d’Eric Liberge dont le trait réaliste, l’encrage subtil et la lumière fascinante font de chacune de ses cases un petit tableau qui se contemple avec fascination.
Lien : http://sdimag.fr/index.php?r..
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La guerre des paysans

Club N°49 : BD sélectionnée

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Une excellente histoire, un dessin surprenant, une thématique complexe et pourtant limpide par le support...



Une réussite Futuropolis.



VT

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BD illustrant les inégalités sociales de l'Allemagne du 16e siècle.



Très bien illustré.

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La narration est très claire, intelligente et permet une approche 'pédagogique' de cette période sans pour autant être pesante.



Gwen

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Lien : https://mediatheque.lannion...
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La guerre des paysans

Il est plaisant de se plonger dans un livre tel que celui-ci. Tout d'abord, les dessins sont d'une grande beauté et, si je n'apprécie généralement pas les BD sans couleurs, j'ai revu cette opinion tant les traits sont plaisants. Ensuite, il est toujours agréable de s'immerger dans un livre qui vous ouvre les yeux sur un pan de l'histoire des hommes et des idées.

Merci au duo Mordillat-Liberge pour cette incursion réussie au cœur du XVIème siècle.
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