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Tinbad, 2018 [corriger]


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Une mite sous la semelle du Titien

La patiente proserie de Lambert Schlechter, se déployant toujours dans les directions les plus inattendues, entre vie matérielle et érudition, entre rêve, nostalgie, mémoire et construction.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/01/04/note-de-lecture-une-mite-sous-la-semelle-du-titien-lambert-schlechter/



Depuis 2006, le Luxembourgeois Lambert Schlechter murmure le monde. En 2018, il le murmurait pour la septième fois, remplissant comme toujours apparemment imperturbable son cahier de proseries – dont Claro proposait notamment une saisissante analogie dans son Clavier Cannibale, ici – (il y en a 108 dans ce « Une mite sous la semelle du Titien », il y en aura 79 dans la huitième étape du parcours, « Les parasols de Jaurès », quelques mois plus tard, et 198 dans la neuvième, « Je n’irai plus jamais à Feodossia », en 2019). Œuvre nettement tissée dans le temps long (j’évoquais ailleurs sa parenté, dans la tâche entreprise si ce n’est dans le type de moyens consacrés, avec le formidable « Tout l’univers » de P.N.A. Handschin), cette patiente succession de pages, relevant de l’artisanat d’art, celui des jours qui s’enfuient, façonnés et bien remplis d’heureuses rapines glanées partout où nous porte une curiosité, organisée ou non (Lambert Schlechter est certainement l’un des plus extraordinaires brigands de grand chemin littéraire que je connaisse), constitue pour la lectrice ou le lecteur un foisonnant journal de marche, celui d’une quête jamais rassasiée d’émerveillement, de découverte, de ressassement innocemment productif et de juste mémoire orientée – malgré les obligatoires impondérables avec lesquels il s’agit de trouver comment ne pas composer.



Affectant volontiers, fort malicieusement, un mépris certain pour l’érudition pédante, Lambert Schlechter mobilise, pour notre plus grand bonheur, la sienne, à l’opposé du pédantisme justement, immense et toujours savamment orientée à la manière de quelque couteau en ivoire des âges farouches : avec Jim Harrison, John Coltrane, Annie Saumont, Blaise Cendrars, Walt Whitman, Claude Louis-Combet, Anton Tchekhov, William Gaddis (qui devient bientôt l’une des douces obsessions de ce volume – avec l’angoisse latente de ne plus parvenir à écrire), Elias Canetti, Sei Shōnagon, Donald Hall, Henri Michaux, Eugène Savitzkaya, ou encore Petr Král, entre autres, quelque chose de très spécifique se tisse sous nos yeux, par lequel les remarques s’échangent dans un continuum créant au fur et à mesure sa propre cohérence.



Sous le regard bienveillant de Leonid Torganov (1841-1916), écrivain russe au statut incertain de réalité (comme dirait Léo Henry à propos d’Adorée Floupette), qui sera le véritable héros, sans doute, de « Je n’irai plus jamais à Feodossia », une langue étonnante se déploie entre compte-rendus de rêves, réactions à un texte, une peinture ou une musique, songes et récapitulatifs érotiques, bribes mémorielles remises en situation, échappées spéculatives et tentatives de deuil, paisible ou rageur, d’une bibliothèque personnelle largement partie en fumée dans un incendie, une langue qui questionne inlassablement ce qui se joue en permanence dans les interstices entre littérature et vie matérielle, entre pensée et rêve, entre exploration et achèvement. Et c’est ainsi que Lambert Schlechter s’affirme grand pour nous, à chaque étape de ce parcours apparemment si insensé.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Une mite sous la semelle du Titien

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Mordre l'essentiel

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