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Critique de ClaireG


1950, Duke City (Nouveau Mexique).
L'histoire est simple, c'est celle d'une chasse à l'homme.
Les raisons sont profondes, comme l'amitié, la fidélité et la liberté.

Jack Burns refuse la modernité et tous ses interdits. Il ne se déplace qu'à pied ou à cheval. Il n'a pas de papiers d'identité, pas de domicile fixe. Dès qu'il apprend que Paul, son ami de fac, est incarcéré parce qu'il est réfractaire au service militaire, il revient à bride abattue, se bat dans un saloon, se fait jeter en prison et retrouve Paul qu'il tente de convaincre de s'évader. Paul refuse, Jack se sauve.

S'ensuit une poursuite impitoyable dans les montagnes du Nouveau-Mexique, prétexte d'Edward Abbey pour emmener son lecteur dans la nature sauvage qu'il affectionne et qui est un pur symbole de liberté… tant que l'homme n'y imprime pas sa marque destructrice.

Une traque est faite d'observation, d'écoute attentive, de méfiance, de ruse, de silence. Les dialogues sont limités à ceux des talkies-walkies de la police en ébullition. L'action, lente, laisse la place aux différents reliefs des Manzano Mountains, arides, sauvages, vigoureux, pleins d'aspérités, comparables à la nature de Jack Burns. L'âpreté des lieux fait graduellement monter la tension. On peine et on glisse avec la jument Whisky, on est décoiffé par le souffle du vent et griffé par les yuccas acérés, émerveillé face à la biche aux aguets et le soir, on aimerait un bon feu crépitant pour assouplir nos articulations malmenées.

Les personnages campés par Edward Abbey sont volontairement typés, voire caricaturaux :
Jack Burns, le cow-boy, long, maigre, stetson vissé sur la tête, guitare dans le dos (eh ! oui, il écrit des chansons). Indompté et solitaire.
Paul Bondi, écrivain, anarchiste repenti. Rédige un livre sur la théorie des valeurs. A femme et enfant et veut purger sa peine de deux ans sans remous.
Morlin Johnson, shérif, massif, revenu de tout mais compétent, mastiqueur de chewing gum impénitent. Entouré d'une belle brochette de tire-au-flanc. Fait son devoir.
Art Hinton, chauffeur routier, buveur de café invétéré, intestins délicats. Fait régulièrement son dernier voyage avant de se soigner.

En quelques mots bien calibrés, Edward Abbey a l'art de rendre une ambiance, de planter un décor, de nicher son lecteur dans la peau de son personnage : « Burns se sentait impatient, affamé, intensément conscient de chaque ombre, de chaque son, de chaque parfum et mouvement dans son environnement. Une convergence délicate de ses capacités et de ses intentions donnait à chacun de ses pas un caractère vital, chaque mouvement de ses membres en accord avec les objectifs de son esprit. Pour la première fois depuis deux jours et deux nuits, il avait le sentiment d'être une créature entière et vivante, un homme à nouveau, et non plus un débris titubant dans un monde mécanique qu'il ne comprenait pas » (p. 253).

Une ode à la nature sauvage et à la liberté inconditionnelle, qui demande néanmoins détermination et rigueur. Une lecture addictive pour tous ceux qui sont épris de grands espaces et de ciels infinis.


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