[...] de la troisième à la quatrième, [...] j'ai porté avec assurance un appareil dentaire. Inutile de préciser qu'avoir les dents couvertes de métal - moins cher mais aussi efficace que la céramique - n'est pas des plus discrets. Même si tu ris la main devant la bouche, il y a toujours une greluche pour te surnommer 'Râpe-carotte'. Même si tu réussis à articuler sans bouger les lèvres, un abruti pour te traiter d' 'Arrache-couilles'.
(p. 92)
Le matin du troisième jour, ma mère en a eu assez de surprendre sa mère fouiller dans son sac, lire ses talons de chèques, se servir dans le frigo. Après avoir déposé sa valise sur le palier, elle lui a annoncé, sans préambule, combien elle la trouvait aigrie, jalouse et frustrée.
- Je crois qu'il est temps que tu arrêtes de nous faire chier. Et pas la peine de tirer sur la corde de la culpabilité, j'accepte les conséquences que mes enfants ne voient plus leur grand-mère.
(p. 98)
J'avoue que, depuis trois mois, je ne crois plus un mot de ce que tu dis.
Depuis que je sais que tu es fourbe et manipulatrice.
J'aurai mis quinze ans à m'en rendre compte.
UN CONSEIL ! N'ACCEPTE JAMAIS ta mère comme amie sur facebook. Même si elle te fixe avec insistance pendant le dîner après t'avoir demandé si tu as bien reçu son invitation. Prétends que tu n'es pas scotchée à ton profil vingt-quatre heures sur vingt-quatre, que tu es sollicitée sans arrêt par des inconnus, ou que tu l'as zappée par inadvertance (....) Dis n'importe quoi, mais ne clique pas ! (p85)
Quand ma mère devine que mon cœur ne lui est plus exclusivement réservé, elle panique. Et elle devient méchante.
Tu crois vraiment que ce sera mieux ailleurs ? Dans une autre famille ?
-Qui est cette charmante jeune fille?
-C'est Amélie, maman.
Et là malgré moi, comme pour la provoquer, j'ai ajouté:
-Mon amoureuse.
Le sourire de ma mère s'est crispé.
Et puis, ôtant délicatement l'écharpe du cou d'Amélie, ma mère s'est adressée à moi. D'une voix douce.
- Elle m'a l'air gentille mais elle n'est pas très jolie.
Elle se tourne vers son fils qui séloigne au bord du lit.
Tu crois vraiment que ce sera mieux ailleurs ? Dans une autre famille ?
Mais tu seras obligé de te laver les dents. De ranger tes jouets. Tu pense que ça m'amuse de venir jusqu'ici chercher du travail ?
D'abord elle est moche. Vraiment Moche.
C'est la première raison [...]
[...]Ensuite, elle est bête.
C'est la deuxième raison.
Pas idiote. Juste bête. [...]
[...]Non seulement ma mère est moche et bete. Mais en plus, elle est pauvre.
C'est la troisième raison.
Merci, maman, de m’avoir appris à tenir en équilibre sur le fil de la vie.