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Critique de fanfanouche24


En flânant en librairie, j'ai lu par hasard le quatrième de couverture du deuxième roman traduit de cet écrivain-peintre libanais... Comme vous pouvez le deviner aisément ce sont les thématiques qui ont capté mon intérêt, et fait me précipiter pour acquérir cet ouvrage , à la couverture
affriolante (un désordre coloré de livres empilés ! )
Un roman attachant, étonnant, prodigue en digressions, références littéraires. Cette fiction met en scène dans un Beyrouth en guerre, une septuagénaire célibataire, répudiée et divorcée depuis des lustres, qui vit seule ; jusqu'à sa retraite , son existence se déroulait entre son travail
de libraire, sa passion de la lecture, qui lui permet de voir écouler le temps avec plus de douceur...

Nous accompagnons Aalya Saleh, 72 ans, ancienne libraire, qui se retrouve à la retraite, vivant seule dans son appartement, où elle continue à suivre un rite immuable le 1er jour de chaque nouvelle année ; elle choisit un texte d'un écrivain qu'elle affectionne particulièrement (dont Sebald, Pessoa, Kafka qui ont une place de choix, dans son Panthéon personnel) pour en faire une traduction en arabe...Contradiction apparente: elle s'implique à chaque traduction mais se moque éperdument de se faire publier,ou connaître de quiconque !

Ce travail de traductrice , ses lectures nombreuses l'aident à trouver un sens à son quotidien, ou du moins adoucissent son existence, dans un Beyrouth en guerre... Aalya vit dans une sorte de bulle, où elle se sent de plus en plus loin des autres, en dehors de ses souvenirs heureux avec
son amie, Hannah, à part quelques visites en solitaire au musée national de Beyrouth, où le gardien lui manifeste une attention affectueuse...

Je parlais précédemment de digressions, car il est bien sûr question avant tout des livres, d'hommages multiples à la Littérature, à la lecture mais aussi au travail des plus complexes du traducteur...Mais moult autres sujets s'entrecroisent dans des mini-histoires imbriquées: Une histoire familiale difficile dans un pays , où même les mères préfèrent les fils aux filles,
la guerre, le temps qui passe, les effets paniquants du vieillissement, qui engrangent plus de solitude et d'isolement, lorsqu'en plus, en tant que femme on a vécu la majeure partie de son existence en dehors du parcours traditionnel d'une femme libanaise, qui se doit de se
marier et de faire des enfants !!

J'ai adoré ce roman, tout en éprouvant des émotions extrêmes: une sorte de jubilation de s'immerger dans l'univers "papivore" d'Aalya, accaparée par ses lectures, ses acquisitions, et ses choix de traduction, qu'elle range méticuleusement , une fois terminés , dans des cartons, avec le livre en langue originale. Dans un même temps, une sorte de forte mélancolie
d'une vie solitaire, en marge des autres vivants, en dehors de "ces vies de papier", qui l'habitent heureusement!!

"Je me suis depuis bien longtemps abandonnée au plaisir aveugle de l'écrit. La littérature est mon bac à sable. J'y joue, j'y construis mes forts et mes châteaux, j'y passe un temps merveilleux. C'est le monde à l'extérieur de mon bac à sable qui me pose problème.Je me suis adaptée avec docilité, quoique de manière non conventionnelle, au monde visible, afin de pouvoir me retirer sans grands désagréments dans mon monde intérieur de livres. Pour filer cette métamorphose sableuse, si la littérature est mon bac à sable, alors le monde réel est mon sablier- un sablier qui s'écoule grain par grain.
La littérature m'apporte la vie, et la vie me tue." (p. 15)

Un très fort moment de lecture dont je suis très heureuse , qui provoque ma curiosité à lire l'ouvrage précédent de cet écrivain libanais, "Hakawati", où l'écrit, le romanesque, l'art de raconter des histoires occupent de nouveau, de façon différente, une place primordiale...

Lien à voir : http://www.lemonde.fr/livres/article/2009/10/29/hakawati-de-rabih-alameddine_1260083_3260.html

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