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sur 487 notes
Aaliya, ancienne libraire et passionnée de livres vit seule dans son appartement. À 72 ans, elle en a vécu des choses. Répudiée par un mari impuissant, issue d'une famille traditionaliste où l'homme possède plus de droits qu'une femme, Aaliya a vu la société libanaise se détruire via des guerres, évoluer, se reconstruire. La seule chose qui lui a permis de tenir toutes ses années... ce sont les livres. Elle prend chaque année la résolution de traduire un livre en arabe.. Et cette lubie dure depuis maintenant 50 ans !
Ses lectures lui permettent d'appréhender le monde et de le contempler via les citations de grands auteurs.


Acheté sur un coup de tête après avoir lu la quatrième de couverture, j'avoue avoir été conquise par le début du roman, très drôle : nous entrons dans le monde d'Aaliya et son erreur de coloration capillaire. Au fil du récit, l'auteur nous offre une découverte de la vie de Beyrouth via les souvenirs et les citations d'auteurs. Nombreuses sont les digressions où un élément active un souvenir du passé.
Ce roman est poétique, étrange, drôle, complexe, innocent, complexe. Il est tout et pourrait faire fuir le lecteur en raison de son côté "brouillon" voulu.


À lire sans modération.📘
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En flânant en librairie, j'ai lu par hasard le quatrième de couverture du deuxième roman traduit de cet écrivain-peintre libanais... Comme vous pouvez le deviner aisément ce sont les thématiques qui ont capté mon intérêt, et fait me précipiter pour acquérir cet ouvrage , à la couverture
affriolante (un désordre coloré de livres empilés ! )
Un roman attachant, étonnant, prodigue en digressions, références littéraires. Cette fiction met en scène dans un Beyrouth en guerre, une septuagénaire célibataire, répudiée et divorcée depuis des lustres, qui vit seule ; jusqu'à sa retraite , son existence se déroulait entre son travail
de libraire, sa passion de la lecture, qui lui permet de voir écouler le temps avec plus de douceur...

Nous accompagnons Aalya Saleh, 72 ans, ancienne libraire, qui se retrouve à la retraite, vivant seule dans son appartement, où elle continue à suivre un rite immuable le 1er jour de chaque nouvelle année ; elle choisit un texte d'un écrivain qu'elle affectionne particulièrement (dont Sebald, Pessoa, Kafka qui ont une place de choix, dans son Panthéon personnel) pour en faire une traduction en arabe...Contradiction apparente: elle s'implique à chaque traduction mais se moque éperdument de se faire publier,ou connaître de quiconque !

Ce travail de traductrice , ses lectures nombreuses l'aident à trouver un sens à son quotidien, ou du moins adoucissent son existence, dans un Beyrouth en guerre... Aalya vit dans une sorte de bulle, où elle se sent de plus en plus loin des autres, en dehors de ses souvenirs heureux avec
son amie, Hannah, à part quelques visites en solitaire au musée national de Beyrouth, où le gardien lui manifeste une attention affectueuse...

Je parlais précédemment de digressions, car il est bien sûr question avant tout des livres, d'hommages multiples à la Littérature, à la lecture mais aussi au travail des plus complexes du traducteur...Mais moult autres sujets s'entrecroisent dans des mini-histoires imbriquées: Une histoire familiale difficile dans un pays , où même les mères préfèrent les fils aux filles,
la guerre, le temps qui passe, les effets paniquants du vieillissement, qui engrangent plus de solitude et d'isolement, lorsqu'en plus, en tant que femme on a vécu la majeure partie de son existence en dehors du parcours traditionnel d'une femme libanaise, qui se doit de se
marier et de faire des enfants !!

J'ai adoré ce roman, tout en éprouvant des émotions extrêmes: une sorte de jubilation de s'immerger dans l'univers "papivore" d'Aalya, accaparée par ses lectures, ses acquisitions, et ses choix de traduction, qu'elle range méticuleusement , une fois terminés , dans des cartons, avec le livre en langue originale. Dans un même temps, une sorte de forte mélancolie
d'une vie solitaire, en marge des autres vivants, en dehors de "ces vies de papier", qui l'habitent heureusement!!

"Je me suis depuis bien longtemps abandonnée au plaisir aveugle de l'écrit. La littérature est mon bac à sable. J'y joue, j'y construis mes forts et mes châteaux, j'y passe un temps merveilleux. C'est le monde à l'extérieur de mon bac à sable qui me pose problème.Je me suis adaptée avec docilité, quoique de manière non conventionnelle, au monde visible, afin de pouvoir me retirer sans grands désagréments dans mon monde intérieur de livres. Pour filer cette métamorphose sableuse, si la littérature est mon bac à sable, alors le monde réel est mon sablier- un sablier qui s'écoule grain par grain.
La littérature m'apporte la vie, et la vie me tue." (p. 15)

Un très fort moment de lecture dont je suis très heureuse , qui provoque ma curiosité à lire l'ouvrage précédent de cet écrivain libanais, "Hakawati", où l'écrit, le romanesque, l'art de raconter des histoires occupent de nouveau, de façon différente, une place primordiale...

Lien à voir : http://www.lemonde.fr/livres/article/2009/10/29/hakawati-de-rabih-alameddine_1260083_3260.html

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Les vies de papier : un livre sur les livres. Mais pas que...

Un livre touffu, roboratif, que j'ai trouvé passionnant ; des digressions déroutantes, des réflexions avisées, des anecdotes cocasses ; au final, une histoire émouvante, mais qui ne plaira pas à tout le monde. Un roman pour les amateurs de littérature, une lecture qui exige de la patience.

La narratrice, Aaliya, soixante-douze ans, vit à Beyrouth depuis toujours, dans des conditions modestes. Elle vit seule dans un vieil appartement défraîchi.

Unique employée pendant cinquante ans d'une petite librairie, elle est entrée en littérature comme on entre dans les ordres. Elle a tenu entre ses mains des oeuvres d'écrivains du monde entier – certains dont je n'avais jamais entendu parler, d'autres dont je connaissais le nom mais dont je n'ai rien lu –. Aaliya n'a pas beaucoup vendu, mais elle a tout lu et elle en parle ; une érudite de la littérature...

Elle parle aussi de la vie quotidienne à Beyrouth, le Beyrouth des quartiers populaires, en état de guerre permanent depuis sa jeunesse : guerre civile, guerre de religion, guerre tout court, bombardements, attentats, décombres, cadavres, rues barrées, incendies, coupures d'eau et d'électricité, restrictions alimentaires... Continuer à vivre !

Elle parle de la vieillesse ; le corps qui se délite, les douleurs qui s'installent, les frustrations de l'enfance qui, en dépit du temps, laissent des cicatrices mal refermées ; les menaces de l'inattention – laquelle peut se traduire par une couleur de cheveux inhabituelle !... Elle parle de l'isolement, de la solitude, qui n'en est pas le remède, car elle conduit à s'exclure, à s'enfermer.

Mais quel est le sens de tout cela, me direz-vous ? On ne fait pas un roman passionnant avec des considérations cérébrales aussi démoralisantes !... Patience, vous ai-je dit !

Aaliya est un roman à elle seule. Elle est traductrice. Mais qui le sait ?... Aaliya travaille selon un rituel et des règles propres à elle, qu'elle s'impose sans atermoiement. Elle traduit en arabe classique des ouvrages littéraires ... qui ne doivent en aucun cas être des oeuvres originales écrites en français ou en anglais !... Mais elle ne connaît que l'arabe, le français et l'anglais ; elle ne comprend pas l'allemand, ni le russe, l'italien, le serbe ou que sais-je ! Elle travaille donc à partir des traductions françaises et anglaises des textes originaux !... Aaliya a ses raisons – ne comptez pas sur moi pour vous les dévoiler ! – Et c'est aussi « en toute logique » qu'une fois achevées, les traductions sont placées dans des cartons et entreposées chez elle, dans une ancienne salle d'eau...

Un jour, un incident technique conséquent la contraindra à se dévoiler à ses voisines – trois sorcières ! Catastrophe ou libération ?... Émotion.

Aaliya s'étend sur de multiples sujets. La musique classique, qu'elle connaît parfaitement. Les conditions de vie des femmes en Orient, leurs espoirs, leurs fantasmes, leurs amitiés. A ce propos, elle déclare avoir aimé deux femmes : Hannah, une amie, et Anna... – Karénine, bien sur. Étonnante homophonie.

En revanche, Aaliya entretient des rapports compliqués avec sa mère, très âgée. Elle raconte une histoire de pieds – un lavage et un massage de pieds – qui m'a dégoûté. (Non pas que je manque de compassion, mais personnellement je n'aime pas les pieds et j'ai horreur que l'on touche les miens, à la différence de ma femme qui ne jure que par la réflexologie plantaire.)

L'immanquable débat : la traduction doit-elle privilégier la fidélité littérale à l'original ou au contraire en adapter l'esprit. Cela me rappelle les polémiques soulevées, il y a une vingtaine d'années, par les publications d'une nouvelle génération de traducteurs de Dostoïevski et de Kafka.

La lecture de Les vies de papier est fluide et agréable, mais je me suis longtemps demandé où la narratrice cherchait à m'emmener. Tout s'assemble logiquement vers la fin. Il n'est pas inutile de relire certaines pages pour boucler la cohérence de l'ouvrage ; je veux dire : pour comprendre la cohérence d'Aaliya dans sa propre incohérence. Vous me suivez ?

Performance impressionnante de l'auteur, Rabih Alameddine. Cet homme parvient à se fondre totalement dans son personnage de femme, car quels que soient son mode de vie et ses bizarreries, Aaliya est bien une femme, avec des souvenirs de femme, des manies de femme et des problèmes de femme.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Cela m'a embêtée toute ma vie de ne pas être comme tout le monde.
J'aime les hommes et les femmes qui ne trouvent pas leur place dans la culture dominante, les étrangers ici comme partout, accidentés de la vie et de l'âme.
J'apprécie la nostalgie.
J'apprécie aussi l'ironie.
Je suis emplie d'une solitude byronique sans avoir aucun des deux exutoires du poète : le génie et l'adultère.

Voilà ce que – entre autres – proclame Aaliya, 72 ans, ancienne libraire et libre traductrice depuis cinquante ans.
Femme tout à fait à part, mal mariée (« le crétin que j'ai épousé, bénie son âme rance. Vous pouvez ajouter le manque implicite de sens de l'humour et de l'honneur, l'incapacité de gagner un revenu, l'art de se satisfaire de son analphabétisme manifeste et d'être un pleutre congénital ») puis répudiée.
Mal-aimée par sa mère et ses demi-frères.
Grande amie d'Hannah, l'attachante Hannah.
Amoureuse des livres qu'elle chouchoute, lit à haute voix à son amie, traduit pour elle-même et remise dans la salle d'eau.
Grande amatrice de musique classique.
Un peu (beaucoup) asociale.

Elle est vieille, maintenant, et elle nous raconte avec verve et vérité ses passions, ses emportements, sa tendresse pour sa ville, Beyrouth, maintes et maintes fois blessée par ces conflits qui l'ont traversée (« J'aime beaucoup la citation de Mark Twain : L'histoire ne se répète pas, mais elle rime »), ses colères envers son ex-mari et sa mère, le tout entrecoupé d'anecdotes de sa vie quotidienne, entre les maux de dos, les problèmes de coiffure et les relations avec ses voisines.
Humour, autodérision, enthousiasme et coups de cafard se mélangent pour former un cocktail détonant où la sagesse prédomine : « La fiabilité renforce-t-elle notre illusion de contrôle ? Si c'est le cas, je me demande si dans les pays développés (je n'utiliserai pas le terme détestable de « civilisés »), le processus de vieillissement perfide et briseur d'illusions, n'est pas plus difficile à supporter ».

J'ai savouré en prenant tout mon temps chaque ligne de cette relation sans détours d'une vie remplie de désillusions mais envisagée avec sagesse. Voici d'ailleurs ce qui le prouve, et je vous laisserai à votre tour déguster les propos de cette vieille dame inventée par Rabih Alameddine :
« J'ai lu un poème sur le bonheur d'Esward Hirsch qui se termine par ces vers : « Ma tête est comme une lucarne, mon coeur est comme l'aube ». Je pense que parfois, pas tout le temps, quand je traduis, ma tête est comme une lucarne. Sans effort de ma part, je suis visitée par le bonheur. Parfois je me dis que cela suffit, quelques moments d'extase, dans une vie d'un ennui à la Beckett.
Durant ces moments, je ne suis plus comme d'habitude, cependant je suis totalement moi-même, de corps et d'esprit. Durant ces moments, je suis guérie de toute blessure. Je suis où il faut que je sois. Mon coeur se distend avec délice. Je me sens sacrée ».
En lisant ce roman, c'est exactement ce que j'ai ressenti.
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Une vie entière parmi les papiers, voilà la vie d'Aaliya qui, avant d'être à la retraite, est la seule employée d'une librairie de Beyrouth où elle vend peu de livres, commande uniquement ceux qui l'intéresse, pour les lire et les garder. Ce n'est pas très honnête, mais elle s'en moque. D'ailleurs pour le propriétaire, ce lieu n'est qu'un faire valoir vis à vis de ses amis intellectuels, pas une source de revenus.

Chose étrange, chaque premier janvier, cette beyrouthine de soixante douze ans commence la traduction en arabe de livres déjà traduits en anglais et en français. Plus étrange encore, son travail achevé, elle le range dans des cartons qu'elle entrepose dans une chambre de bonne. Oui, vous avez bien lu, elle ne fait rien pour être publiée ! Elle accomplit un long travail inutile. Elle s'en explique, mais je ne vais pas spoiler (divulgâcher comme disent nos amis canadiens), je vous laisse le découvrir par vous-même dans ce livre intrigant.

J'ai d'abord cru que l'auteure était une femme. Les vies sont écrites à la première personne, d'où ma confusion. Mais ce n'est pas la seule raison. L'autre raison est que Rabih Alameddine se glisse magiquement dans la peau de cette vieille femme - cultivée, obsessionnelle, négligée, irrévérencieuse, ironique et tellement vraie dans sa franchise et parfois sa crudité qu'elle possède une existence tangible.

Aaliya, une femme qui est capable de tout, même de sortir dans la rue titubante et débraillée. Le plus souvent elle résiste à l'empiètement dans sa vie de celles qu'elle appelle les trois sorcières, de sa vieille mère et de ses demi-frères. Il est vrai qu'elle aime peu la compagnie de ses semblables. Mais une chose est sûre, elle parle si bien de littérature et de musique, de l'histoire de Beyrouth et de ses guerres que jamais l'envie de l'interrompre ne vous effleure.

Vous qui aimez les livres, comme moi laissez-vous porter par le charme oriental et l'érudition d'Aaliya, vous ne le regretterez pas.
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Ce livre m'a d'abord attirée par son cadre : Beyrouth .

Au cours de mes lectures, j'ai souvent été fascinée par l'aura de cette ville, mosaïque culturelle et religieuse de l'Orient.
Et, sans doute a-t-elle été magnifiée par bien des auteurs amoureux !
Me revient surtout en mémoire mon époque Muriel Cerf, c'était l'Amélie Nothon de ma jeunesse !
Mais je m'égare !
Donc, tout ça pour dire que je n'ai pas hésité à découvrir Rabih Alameddine.

Il écrit son roman à la première personne et va se couler dans la peau d'une vieille libanaise, Aaliya , ancienne libraire, ancienne traductrice ,polyglotte et autodidacte, vivant à Beyrouth ,sa ville, malgré les conditions de vie épouvantables imputables à la guerre.

Un personnage très intéressant à plus d'un titre.
Agée, c'est un témoin privilégié de la société libanaise du XXème siècle .Elle décrit , analyse ou condamne les moeurs qui régissent la vie des familles .
Rebelle, elle dénonce sans condescendance les difficultés liées à la condition féminine et aux règles sociales d'un autre temps.
Une mémoire de Beyrouth en quelque sorte .

Malmenée par la vie, Aaliya va peu à peu s'isoler du quotidien par l'érudition et ne vivra plus que par et pour ses livres et ses traductions.
Elle semble ainsi se suffire à elle-même.
Isolée ? pas tant que ça; elle garde malgré tout assez de curiosité pour observer son entourage et le récit va se trouver ponctué de petites remarques bien perfides sur tel ou tel , souvent drôles , parfois savoureuses et l'autodérision ne lui fait pas défaut non plus !!
Aaliya est aussi terriblement humaine ,sensible et émouvante quand elle dépeint sa condition de vieille femme subissant les affres du temps.

Mais, car il y a un mais !
Aalliya, dans un impressionnant monologue va entraîner le lecteur à suivre le fil de ses pensées .
Et là, elle va nous ensevelir sous une montagne de références littéraires et de connaissances culturelles en lien ou non avec la situation présente !
Tant et si bien que parfois, il est impératif de suivre les méandres de sa réflexion qui, je suis désolée , s'apparente à des coq à l'âne !
La forme du récit est particulière.
Un flot de culture ininterrompu et parfois insolite !
Les philosophes, ses interlocuteurs favoris, surgissent à chaque instant ,en force, inlassablement ...
Dommage.
Chacun son idée, mais l'érudition présentée sous cette forme me dérange un peu car cet étalage conséquent ,à mon sens, nuit au partage de la connaissance et à son élaboration .
La transmission de la pensée des érudits a vocation d'éclairer le plus grand nombre si possible.
Alors, pour ne pas ressortir trop abrutie par ce tsunami de références culturelles ,j'ai fait le tri et en ai extrait comme j'ai pu la "substantifique moelle " . Merci François ...

La forme d'écriture voulue dense et parfois désorganisée demande, il faut le dire, quelques petits efforts de concentration .
On n'échappe pas non plus a des longueurs !
Un effet crée pour mieux adhérer à la personnalité de la vieille femme, je suppose.
Avec elle, on va d'un souvenir à l'autre, comme ils lui apparaissent...puis, on revient au présent, au récit là où on l'avait laissé, il retrouve sa fluidité et on repart ..ainsi de suite .

Mais, la personnalité de Aaliya aussi riche que fascinante ,
fait de ce roman une oeuvre à ne pas manquer et, il faut bien le reconnaître un condensé de culture indéniable .
A chacun de fixer son propre seuil de satiété en la matière !
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Je me suis perdue, je me suis noyée dans ce texte, magnifique parfois, mais rébarbatif aussi... J'ai besoin de suivre une histoire, de suivre des personnages et là, je me suis engluée avec Aaliya.
Trop de références littéraires...
On passe d'un souvenir à un autre...
Je reconnais que l'écriture est belle, mais ...
Ce livre n'est pas pour moi aujourd'hui !! Un autre jour, peut-être... ou pas...
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Aaliya Saleh, 72 ans, les cheveux bleus… peut-être l'encre de sa plume a-t-elle déteint sur sa chevelure. En silence elle lit, en silence elle traduit en arabe ses romans préférés. Passion secrète qui la rend invisible aux autres, la laissant voir le monde à travers les Vies de papier.

Sous les pas de la vieille dame, le grignotage du temps et de la guerre, on visite Beyrouth. Ses rues et ses immeubles crevés, ses tentatives de renaître plus belle.
On s'installe dans le salon de lecture d'Aaliya en savourant chaque instant. Des instants éparpillés comme des pages volantes où planent quelques citations, où la vie se fait encre et papier.

C'est un roman à cueillir, des mots à savourer. Un roman fragile, avec de la tristesse, mais sans larmes. L'encre peut baver un peu lorsqu'il pleut sur Beyrouth, sur les vitres de la vieille maison et parfois sur cette vie de papier, mais elle sèche et resplendit à nouveau sous l'éclat des mots.

Un roman magnifique. Une dame qu'on aimerait rencontrer, mais il ne faut pas la déranger, il faut juste l'écouter sans qu'elle nous voie derrière son mur de livres. L'écouter traduire la vie.
Elle est unique. Hors des carcans de la communauté libanaise, elle affronte la vie comme elle peut, armée de vies de papier. Une vie qui ne fait pas de bruit, humble mais tellement riche, comme un livre qu'on feuillette du fond d'un vieux fauteuil, avec la pluie qui caresse les vitres et un thé qu'il ne faut pas laisser refroidir. Un livre précieux.

« "Je ne suis rien.
Je ne serai jamais rien.
Je ne peux vouloir être rien.
À part ça, j'ai en moi tous les rêves du monde."

Àlvaro de Campos, le poète dandy bisexuel de Pessoa, écrivit cela. Il est le bienvenu chez moi quand il veut.
Je ne suis rien. Je devrais aspirer à devenir un grain de poussière. J'attribue de l'importance à la littérature et à la poésie, je plaque les arts en un or d'un éclat éblouissant pour tromper ma vision, afin de ne pas voir ce qui est évident pour toute l'humanité : je ne suis rien, je ne serai jamais rien.
Pour pouvoir vivre, je dois m'aveugler à mes dimensions infinitésimales dans cet univers infini. »
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Aaliya Saleh n'a qu'une passion, la littérature. Qu'une envie, la traduction d'oeuvres d'écrivains qu'elle admire. Qu'un seul postulat : traduire en arabe des écrits déjà traduits eux-mêmes en français ou en anglais.

Ancienne libraire, Aaliya Saleh a soixante-douze ans et vit seule entourée de ses livres. Plus l'âge lui vient, et plus les souvenirs affluent et bousculent son quotidien. Sa seule amie, Hannah, disparue depuis bien longtemps, lui manque terriblement. Son pauvre (cet insecte impuissant, ainsi qu'elle le nomme) mari, lui, a pris la poudre d'escampette peu de temps après leur union et bien lui a pris. de toute façon, c'était un mariage arrangé comme le veut la tradition libanaise. Sa mère... mais que dire de cette mère si peu présente et encore vivante. Puis la vieillesse la hante et l'effraie. Et bien sûr, il y a toutes ces guerres qui ont traversé son pays et sa ville natale Beyrouth. « Beyrouth est l'Elisabeth Taylor des villes : démente, magnifique, vulgaire, croulante, vieillissante et toujours en plein drame. Elle épousera n'importe quel prétendant enamouré lui promettant une vie plus confortable, aussi mal choisi soit-il. »

Aaliya Saleh vit à travers ses héros de papier et soupèse les gens et le monde qui l'entoure via les aphorismes retenus de ses lectures. Même ses voisines, qu'elle surnomme les sorcières et qu'elle essaie de ne croiser que le moins possible, ne trouvent grâce à ses yeux. Mais combien de temps encore est-il possible de vivre ainsi, à l'orée du monde, claquemurée dans un vieil appartement, derrière un rempart de livres et de papiers traduits ?

Quel texte magnifique ! J'ai essayé de le lire lentement pour me gorger des mots magiques, splendides, souvent teintés d'une amère ironie. Quel hommage à la littérature, aux écrivains et aux traducteurs !
J'ai adoré ce personnage de femme qui s'est construite seule grâce à la littérature et à la musique : « Je me suis glissée dans l'art pour échapper à la vie. Je me suis enfuie en littérature. » Une autodidacte doutant de ses capacités et pourtant si fière de son parcours. Une femme hors des limites imposées par son pays : vivant seule, travaillant, athée, libre et prisonnière en même temps par les contraintes qu'elle s'impose elle-même. Un personnage déroutant, ambitieux, misanthrope. Mais si tout cela n'était qu'une façade ? Une marque imposée par son pays vis à vis de la femme, cette « Unnecessary Woman » comme le note si justement le titre original de ce roman ?

Un livre-bibliothèque aux mille références. Une lecture-cadeau. Et en voici un petit aperçu par un poème d'Alvaro de Campos (alias Fernando Pessoa maintes fois cité) :
Je ne suis rien.
Je ne serai jamais rien.
Je ne peux vouloir être rien.
À part ça, j'ai en moi tous les rêves du monde.

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Il m'a été rarement donné par un auteur cette expérience, cette invitation à vivre auprès de son personnage. Je viens de passer des heures avec Aaliya, je pourrais presque dire une amie tellement que nous étions proche, elle m'a raconté sa vie. Cette femme de 72 ans vivant à Beyrouth, libraire à la retraite, férue et amoureuse de littérature, de musique, traductrice depuis 50 ans, vivant seule après avoir été répudié, elle m'a raconté les années de guerre, les difficultés avec sa famille, sa mère, ses demi-frères, mais aussi les bons moments avec son amie Hannah, ses voisines toujours présentes et solidaires.
J'ai été séduite par le personnage, l'écriture, les digressions qui rendent si vivant ce roman, merci à Rabih Alameddine pour ses quelques jours passés à Beyrouth en compagnie d'Aaliya.
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