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EAN : 9782868207142
556 pages
Presses Universitaires de Strasbourg - PUS (12/04/1995)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
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Professeurs et étudiants strasbourgeois, exilés à Clermont-Ferrand pendant la guerre, tous arrêtés pour suspicion de résistance (il me semble), beaucoup sont passés par le « 92 » (une caserne de Clermont transformée en prison) puis par le camp de Compiègne, c'est un peu l'expérience commune de base et ce qui sert d'introduction. Ensuite, les témoignages montrent un grand éventail d'expériences, certains ont été libérés juste après leur arrestation, d'autres ont été torturés par la Gestapo, ont voyagés dans le « train de la mort » et se sont finalement retrouvés dans différents camps.
On reconnait, dans ces témoignages, des sensibilités et des personnalités différentes, au-delà de la volonté d'objectivité exprimée dans l'introduction. Il y a des textes sobres, d'autres remplis d'une saine indignation, et je dois bien dire aussi, malheureusement, que le dernier texte, celui de Charles Hauter, qui n'est plus un témoignage mais la « Réflexion d'un rescapé » m'a paru colporter des rumeurs comme des vérités (cette fameuse histoire des peaux tatouées et des tibias récupérés par « caisses entières » pour faire des abat-jours et un « commerce fructueux »). En comparant les témoignages d'un même évènement, si connu et commenté, on comprend – peut-être mieux que les auteurs eux-mêmes qui n'en avaient pas forcément conscience au moment où ils écrivaient –, l'importance du choix des mots et de la focalisation.
Je pense qu'un lecteur d'aujourd'hui ne manquera pas de noter deux ou trois petites choses par rapport à ce qu'il a l'habitude de voir à ce sujet dans les documentaires récents. En premier lieu, les témoins de ce livre (publié en 1947, c'est important) ne font pas de cas spécifique des Juifs, à part ceux qui sont passés par Auschwitz. Et encore, ce n'est qu'une phrase ou deux, qu'ils éludent rapidement. Marc Klein, dont le témoignage très instructif est malheureusement coupé en trois parties pour s'adapter au plan du livre, après avoir écrit que « la majorité des détenus de Auschwitz I était constituée par des juifs venant de tous les pays de l'Europe, et c'est eux qu'on exploitait et qu'on exterminait au maximum », se dépêche d'ajouter : « on me permettra de ne pas insister sur ce point pour ne pas ranimer des rancoeurs superflues parmi ceux qui sont revenus de cet enfer ». Robert Levy est encore plus laconique : « si Birkenau a été le grand camp d'extermination des Juifs, il ne faut pas oublier qu'un nombre énorme de non-Juifs y fut également assassiné. » C'est tout. Quant aux autres témoins, ils sont davantage occupés par les nationalités, et en particulier le sort qui est réservé aux Français (ce qui est tout à fait normal, bien entendu).
Une dernière réflexion. Mais je crains encore de mal m'expliquer, au sujet de la psychologie des nazis. Il y a quand même énormément de points communs entre tous ces témoignages et l'un d'entre eux est sur l'organisation interne des camps et la relative absence des S.S. à l'intérieur. Une société complètement inédite s'était mise en place, avec une hiérarchie et des rivalités où non seulement les nationalités entraient en jeu mais également les catégories inventées par les nazis : prisonniers de droit commun, politiques, homosexuels, Tziganes, Juifs, etc. On peut dire que les nazis avaient détruits les anciennes valeurs pour en créer d'autres, aberrantes sans aucun doute, puisque ceux qu'ils appelaient les asociaux, c'est-à-dire parfois des criminels, étaient à la tête de ces petites sociétés. Presque tous les témoins de ce livre se plaignent de la malfaisance des kapos, qui étaient souvent de vieux prisonniers de droit commun allemands ou polonais. C'est tout à fait intriguant cette sociologie des camps et ça en dit long sur la mentalité des nazis, qui n'avaient « qu'un but, l'extermination du détenu par tous les moyens imaginables et, en attendant celle-ci, sa dégradation. Ils s'efforcent de le rendre haineux, mauvais pour ses camarades et dépravé. »
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Quoiqu'il en soit ceux qui dans leur jeunesse avaient rêvé que rien de ce qui est humain ne saurait leur rester étranger auront été servis !
Le camp de concentration a dépassé de loin le but que ses créateurs s'étaient assigné. Ces hauts-lieux de la douleur ont été plus que des lieux de destruction de l'opposition anti-hitlérienne, d'expiation inter-nationale ou raciale. Quelque chose de beaucoup plus grand s'est trouvé mis en question, de si grave que même ceux qui ont réalisé le problème n'ont pas le courage de le dire. Et il vaut peut-être mieux que cette expérience unique mais inutile parce que intransmissible, n'apparaisse dans l'histoire des civilisations que comme une énorme farce (« ein uberdimensionaler Witz » disait Ernst). Il paraît que dans des temps très anciens un mauvais sujet avait pénétré dans le sacro-saint du temple d'Isis et avait déchiré le voile de la déesse. Le violateur n'aurait rapporté de son initiation à rebours qu'un rire saccadé, le rire de certains fous. Mais ceci n'est qu'une vieille légende stupide...
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Je m'excuse de dire ces choses. Mais c'est cette dégradation morale qui, au bagne, me bouleversait le plus. Les coups, le travail dur, la contrainte, toutes les souffrances matérielles — au-delà même, toutes les souffrances morales — ne prenaient toute leur horreur qu'au moment où elles aboutissaient, selon le plan satanique de l'ennemi, à faire perdre à chacun le respect de soi-même, sa dignité d'homme. Le bagnard qui reste sans sourciller sous les coups, l'affamé qui donne la moitié de son pain, le pauvre être épuisé qui pousse encore le wagon ne sont pas des esclaves. C'est quand ils crient grâce, c'est au moment où ils consentent à telle ou telle lâcheté, qu'ils perdent pied réellement, qu'ils sont ce que les nazis ont voulu faire d'eux. Comment résister, comment rester soi-même au milieu de tant d'angoisses : la peur d'être frappé, la peur d'être puni, la peur d'être envoyé en transport, la peur d'être isolé, la peur d'être malade, la peur d'avoir faim, la peur de mourir... Combien d'entre nous peuvent dire qu'ils n'ont jamais cédé ?
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Le sénateur Chambonnet est un homme de cinquante ans ou un peu plus, grand et fort. Il a, comme beaucoup d'autres, en juillet 1940, donné son vote à un mandataire infidèle. Mais, républicain, démocrate et patriote à toute épreuve, il s'est bientôt ressaisi. Il fut d'abord en délicatesse avec la police de Vichy, sur laquelle il me raconte de curieuses histoires. Un jour, il reçoit la visite, à fin d'enquête, d'un commissaire des Renseignements généraux : M. le Sénateur, vous ne me reconnaissez pas ? — Non. — J'ai dîné l'an dernier avec vous et M... — En effet. Eh ! bien, vous êtes un fameux salaud ! — M. le Sénateur, les salauds comme moi sont là pour empêcher les honnêtes gens comme vous de commettre trop d'imprudences ». Et l'interrogatoire se termina par un procès-verbal anodin.
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